Ils exaucent le rêve de Rosalie
par C’est Nabum
jeudi 4 juillet 2024
La consécration d'un projet.
Ils vivent dans un des plus beaux villages ligériens, un bel écrin de verdure et d'eau, entre Loire et canal, un espace encore préservé de la folie immobilière qui agite cette métropole qui court après un espoir de grandeur. Eux, coulent des jours heureux dans ce qui fut un village marinier et entendent partager cette histoire avec les touristes et les curieux.
Ils sont fiers d'une épopée qui a été merveilleusement narrée par Annick Sénotier, une écrivaine qui a su restituer l'ambiance qui régnait dans son village lors de l'aventure de la marine de Loire et du canal. Ses livres ont titillé leurs imaginaires, les ont poussés à se revêtir de la tenue des mariniers d'antan avec des rêves plein les yeux.
Ils se sont construits des fûtreaux, il y a quelques années de cela qui n'ont eu de cesse de naviguer en cet endroit où la Loire effectue son grand virage vers l'Océan. Il n'est plus beau bassin de navigation que cet endroit qui laisse entrevoir au loin les tours de la cathédrale d'Orléans tandis que les ruines du château de l'Île sont là pour rappeler opportunément le péril que fera toujours peser la rivière sur ses riverains.
Cette fois, ils voient en grand avec un projet de toue cabanée sur coque aluminium pour répondre aux exigences de l'heure et espérer ainsi donner plus de confort et de temps à leur future embarcation. Le projet mobilise les énergies, redonne vie et dynamisme à une association qui finissait par s’essouffler quand rien de neuf ne sort du chapeau.
La coque métallique fut confiée à un chantier de la Loire d'en bas qui réalisa une merveille d'équilibre et de grâce avec pourtant des dimensions conséquentes. Ne restait plus, si j'ose dire, qu'à l'habiller de bois et d'inventivité pour en faire une jolie toue cabanée à l'allure élancée et aux lignes équilibrées. Il y avait dans l'association d'anciens menuisiers qui se firent un plaisir de reprendre le collier.
Au fil des jours, le projet devenait réalité, exigeant des trésors de patience, d'adresse et de méticulosité tandis que d'autres assuraient l'obscur labeur des grouillots. Un long travail en extérieur avec de fréquentes visites et le regard des curieux pour pousser à la roue et donner envie de produire une belle toue à la hauteur des attentes des uns et des autres.
C'est là le liant le plus extraordinaire qui soit pour souder derrière un projet qui distille fierté, engouement, plaisir et impatience autour de lui. Puis vint le temps de l'échéance, de la réalisation qui laisse souvent un grand vide dans l'équipe tout autant qu'une immense fierté. La mise à l'eau constituant un moment d'une rare émotion, la matérialisation symbolique d'un rêve alors que tout n'est pas encore achevé. Les finitions sauront attendre, place au baptême et à la pose de la Devise : « Rosalie ! »
Rosalie, la vraie avait toujours rêvé d'un beau et grand voyage sur la Loire. Son rêve se brisa à la mort de la Marine de Loire. Elle ne fit de toute son existence qu'un périple jusqu'à Paris par le canal d'Orléans. Pour nos mariniers de Combleux, ironie de l'histoire, les périples sur la Loire ne seront pas une utopie alors qu'au contraire, celui de gagner la Seine par leur canal, risque fort de n'être qu'un vœu pieux. Puisse-t-il briser le mauvais sort de Rosalie et voir sur leur magnifique bateau les tours de Notre Dame...