Christian Blanc soutient Sarkozy...
par Charles André
vendredi 26 janvier 2007
Christian Blanc vient d’annoncer, dans le Figaro, son soutien à Sarkozy.
Si la nouvelle, venant d’un homme culturellement de centre-gauche et aujourd’hui apparenté UDF peut surprendre (euphémisme) et faire jaser les mauvaises langues, cette décision semble se fonder sur une analyse rationnelle : diagnostic commun et forte convergence de priorités d’action.
Christian Blanc a livré l’essentiel de ses motivations dans son interview au Figaro et donne des explications supplémentaires sur le site d’Energies2007.
D’autres, notamment sensibles au positionnement et aux dénonciations de Bayrou, ou séduits par la virginité, seront déçus. Ailleurs, on déplorera peut-être l’"abandon" du chantier démocratique. Pas moi.
Bayrou n’est selon moi que postures. Certes, sa rebellitude, son discours républicain et démocratique sont séduisants. Son insistance sur la gravité de la dette publique est également louable. Mais ses qualités politiques s’arrêtent là : en dehors des questions institutionnelles et démocratiques, son projet est archi léger et old school, son positionnement (le seul qui lui permette d’exister) facile. Même la façon dont la dette est traitée par l’UDF est symptomatique : on interdit, par une norme constitutionnelle, le déficit de fonctionnement. Rien sur la réforme de la gestion et de l’organisation de la fonction publique (l’UDF préconise l’alignement des régimes spéciaux sur le régime général de retraite d’ici... 2020 !).
Bref, il est selon moi normal que Blanc ne soutienne pas Bayrou : Bayrou, c’est avant tout une geste, quand Blanc est un homme de terrain, de projets, d’action.
Surtout, la France a besoin d’un grand élan réformateur, d’une énergie ardente, d’une résolution sans faille et d’un projet résolu. Au-delà des slogans, Sarko l’incarne et l’assume plus que tout(e) autre. Retour aux premières "amours" (après de grands moments de doute liés à sa nervosité, ses slogans mitterrandiens, son goût des forts, des héros, des shérifs et des cow-boys...) : Sarko est le premier homme politique contemporain qui m’ait réellement impressionné par son audace en prônant, il y a déjà plus de deux ans, l’autonomie des universités. Certes, il y a plus sexy ; mais je me suis vite lassé de Pamela Anderson...
Oui, Sarko est (aujourd’hui à tout le moins) celui qui me semble le
plus capable et volontaire en matière de modernisation de notre modèle économique
et social (un modèle ?). Or, c’est en premier lieu à ce niveau que le
temps presse ; car les constructions institutionnelles et démocratiques
ne sont possibles que lorsque l’avenir est envisagé avec optimisme.
De
la même manière que le projet européen a connu son plus grand élan
pendant les Trente Glorieuses et ne sera relancé que lorsque ses moteurs
français et allemand cesseront de pâtiner, la France ne repartira pas
de l’avant sans en avoir fini avec ses archaïsmes. Blanc le disait d’ailleurs excellemment il y a peu
: notre responsabilité est immense. Ne nous trompons pas de
priorité (gouverner, c’est choisir ; pour choisir, il faut des
critères...) : l’élan économique est premier. Demandez à un RMiste quel
est son voeu le plus cher...
Je suis, personnellement, pour la création d’une grande force de pression citoyenne, issue de la société civile, sociale-libérale. Je suis pour le rééquilibrage des pouvoirs, un renouveau de la délibération démocratique, une association bien plus forte du peuple aux décisions qui le concernent. Le soutien de Blanc à Sarkozy ne va pas dans ce sens. Dans ce domaine, on peut donc légitimement considérer avec quelque étonnement le "nouveau" (pas si nouveau : Blanc a pris ses distances avec Bayrou depuis quelque temps déjà et n’a pas sa carte à l’UDF -ni nulle part ailleurs) positionnement de Christian Blanc : qu’a-t-il fait du "ni à droite, ni à gauche", où est passé son combat contre la confiscation de notre démocratie par une caste ?
Je crois simplement que (comme le souligne "Le gros Laroka" sous le billet d’explication de Blanc) la revitalisation de notre économie est plus importante que les réformes institutionnelles ou l’hypothétique fin du clivage gauche/droite. Et ceci me paraît parfaitement fondé : avant de s’intéresser à la politique, chacun doit pouvoir choisir son destin personnel.
Redonner un élan à notre pays, voilà l’enjeu de 2007. Entre les congés payés ou la création de la Sécurité sociale -autorisés par le développement économique- et le rassemblement politique des bonnes volontés, qu’est-ce qui vous semble fondamental ?
N’oublions pas, par ailleurs, que la fracture démocratique est apparue avec la "crise" et le chômage de masse...
Nous devons donc avant tout nous employer à créer cette société
innovante, du libre choix, des talents et de la créativité.
C’est avant tout par une économie dynamique et par un élargissement du
champ des possibles que nous en finirons avec le fatalisme ambiant
- (qui donne du grain à moudre aux partisans de la décroissance, de la
table rase, du tous pourris, c’est la faute aux patrons/aux Arabes.)
D’ailleurs, en bon bisounours, je considère qu’une entrée résolue dans l’économie de l’innovation signifierait la fin des cloisonnements, de la rigidité, du chômage de masse, des positions sociales figées. Ce choix-là (l’innovation comme modèle économique, pas simple norme d’augmentation du budget de la recherche publique !), engendrera ensuite l’avancée vers des associations choisies, des contre-pouvoirs par les réseaux...
Nous sauverons nos solidarités et mettrons fin à la dette par une croissance dynamique, une plus grande sélectivité des dépenses, un Etat qui cesse de se disperser, des évaluations systématiques. Par par des normes constitutionnelles. Là encore, et même si les promesses à tout-va sont un gros caillou dans ma chaussure, Sarko est celui qui emprunte le plus résolument ce chemin. N’oublions pas qu’on fait avec ce qu’on a.
Maintenant, il reste, pour ceux qui suivront Christian Blanc dans ce soutien, à se montrer extrêmement énergiques et persuasifs : pour montrer que la "peur" qu’inspire Sarko -notamment aux bobos- n’est rien par rapport aux besoins du pays, pour faire comprendre que nous devons, avant toute chose, entrer avec enthousiasme dans le XXIe siècle, pour reprendre foi en l’avenir ou, encore, pour peser en faveur du renouvellement démocratique. Que les vraies bonnes volontés soient nombreuses à se rassembler autour de Sarko pour noyer ces boulets qui débectent certains.
Et puis, si nous ne pouvons mettre en oeuvre le dernier chantier démocratique de l’intérieur, nous le ferons du dehors. Nous sommes résolus, et nous ne sommes pas les seuls.
Et maintenant, en avant (marche ?) !