En attendant le débat...
par Yann Riché
vendredi 26 janvier 2007
Et voilà, la campagne électorale part en couille. Il n’y a pas d’autres mots. La bataille de l’image au sein des médias est violente.
D’abord, les attaques contre Ségolène qui, il faut bien le dire, à force de ne rien proposer et de parfois se contredire, prête le flanc aux attaques faciles.
Car Ségolène se balladurise et se raffarinise.
Comme Edouard Balladur, elle pêche à la même période d’un excès de
confiance. Elle refuse le débat et comme Balladur, elle est coupée d’une
partie de son parti. Cet excès de confiance, elle l’a montré. Trop
montré, et elle est ainsi devenue désinvolte en disant, en décembre, que
de toute façon, quoi qu’elle fasse, quoi qu’elle dise, tout lui réussit. Au
plus haut des sondages, la confiance engrangée dans la primaire du PS
devient finalement un désavantage, comme si le but était de remporter
cette primaire et non l’élection présidentielle.
Comme Balladur, elle doit affronter un ami de trente ans ; différence
de taille cependant, elle n’est pas l’amie de François Hollande mais sa
compagne, ou lui son compagnon, et ils ne se sont pas trahis. Mais cela
fait désordre, ce François Hollande chef du PS qui a tout reconstruit et
qui se fait voler la vedette parce que c’est une femme,
alors qu’il travaille d’arrache-pied depuis 1995 pour faire du PS un
parti de gouvernement, et donc devenir le candidat naturel du PS.
Elle se raffarinise ensuite avec, nous l’avons tous en mémoire, l’expression les gens qu’elle a récemment remplacée par les Français (il était temps). Ces gens un peu "France d’en bas", venant d’une énarque de gauche qui paye l’ISF, ça fait un peu condescendant. Ensuite, il y a cet épisode de bravitude, tout comme dans la positive attitude, il y a beaucoup de creux, le creux que l’on retrouve sur la vraie bourde de sa campagne concernant le délai beaucoup plus rapide qu’en France de traitement des affaires par les tribunaux chinois, ça c’est de la bourde, de la bonne.
Enfin, elle veut se placer au coeur du rôle de la présidence en traitant les affaires internationales, ce qui est d’importance dans notre monde. Mais là aussi beaucoup de maladresses. Il y avait eu avant la Chine le Liban, et cela se conclut avec le Canada. De bourde, on pourrait dire qu’il n’y en a pas. Sauf que... regardons d’un peu plus près, et souvenons-nous que de Gaulle, cette gaffe, il l’avait faite. Justement, cette gaffe est connue, pourquoi la refaire ? Je n’ai pas la réponse.
Il faut reconnaître aux équipes de l’UMP une efficacité supérieure à celle des équipes de Fabius et de DSK pour utiliser la moindre faille et pilonner sans cesse de manière insidieuse la candidate socialiste. Alors que les socialistes sortent des rapports sur le bilan de l’inquiétante rupture tranquille de M. Sarkozy, les troupes umpistes font circuler une rumeur fausse sur une SCI qui aurait permis à M. Hollande et à Mme Royal d’échapper à l’ISF. Le démenti a été fulgurant et convaincant de la part du couple corrézo-poitevin, ils payent l’ISF et pour un montant de 830 euros et des bananes. Mais contre-choc, ils payent de l’ISF, rappelons-nous aussi qu’ils se sont rencontrés à l’ENA (je suppose). Bref, pour des gens proches des gens, ils ne font pas la différence dans la proximité.
Et Sarkozy, lui, n’attaque pas ; MAM, Pécresse, Devedjian, tous attaquent. Sarkozy attend son heure, alors que Royal doit se séparer d’Arnaud Montebourg pour humour déplacé, puis après avoir soutenu Frêche, juste avant la bourde Montebourg, s’est prononcée quatre jours plus tard pour son exclusion du PS (ça navigue à vue).
Mais voilà que l’autre erreur fatale vient de Hollande, qui en portant plainte pour calomnie, prête toute l’attention qu’il ne faut pas à cette affaire en amenant la politique devant les tribunaux : tout cela s’américanise.
Autre erreur, l’attaque contre Sarkozy sur l’enquête des RG. Cette attaque précipitée par le PS montre à quel point le camp Royal est fébrile. Car une attaque trop vite menée déclenche une réponse rapide du ministre de l’Intérieur, qui dément avoir donné un quelconque ordre, et une mise au point des RG sur ce dérapage.
L’attaque glisse sur Nicolas, alors que Royal glisse ou stagne dans les sondages.
L’UMP encore, qui manipule habilement l’information que l’on peut lire dans Le Monde sous le titre : "L’UMP offre le gîte électoral aux élus dissidents de l’UDF".
Dans cet article, le journaliste explique entre autres que le cercle de réflexion Société en mouvement
est un mouvement anti-Bayrou. Membre de l’UDF et participant aux
réunions de Société en mouvement (qui est un cercle de débat
participatif, bien avant ceux de Mme Royal), je suis surpris de cette
réflexion qui vise à réduire l’électorat de l’UDF aux seuls élus
actuels, alors que nous le savons, le centre droit s’est recentré à
gauche en termes d’électorat. On le sait aussi, le débat au sein de l’UDF
a été fort au sujet de la position de François Bayrou et de celle de Gilles
de Robien ; le désaccord est profond, Bayrou rompant les liens avec
l’UMP. On le sait, Baguet a quitté l’UDF pour soutenir Sarkozy. Le
Monde affirme que Santini hésite. Attendons de voir, plutôt que de supputer.
En fait, jusqu’à présent pour l’UMP, l’UDF ne représentait pas de
danger, maintenant que les sondages de Bayrou sont plus favorables et
qu’il y a un décollage certain, le risque d’avoir une surprise Bayrou est pris très au sérieux.
En effet, si la première manoeuvre de déstabilisation de Ségolène
aboutissait, (la balle est maintenant dans le camp de Ségolène, qui n’a
pas d’autre choix que de réussir la présentation de son programme avant
la mi-février), alors la gauche, en tout cas une partie de la gauche, se
rabattrait vers le candidat Bayrou, dont le profil de social-démocrate
pro-européen séduit. Et tout comme Sarkozy, il possède un avantage clé
: il n’est pas issu de l’énarchie. Si seulement en plus il était une
femme...
Et dans tout cela, encore une fois : point de programme ! Point de débat.
Ah si ! Vous pouvez chercher des petites fiches argumentaires sur le site
du PS, et encore une fois, le niveau des attaques est bien bas. Je vous
laisse vous faire votre avis sur la méthode, désolante.