La madone en Palestine
par Stéphane W.
mardi 5 décembre 2006
Investie comme candidate du Parti socialiste aux prochaines élections présidentielles, Ségolène Royal a commencé cette semaine un périple au Moyen-Orient avec en point phare une visite au Liban et dans la bande de Gaza. Seulement, elle a vite oublié les concepts dont elle s’est fait le porte-étendard comme démocratie participative ou encore respect du choix du peuple.
La madone des urnes (version Hertoghe) est allée cette semaine en première visite presque officielle à l’étranger. Et pour ne pas faire dans la dentelle, elle a décidé de s’en aller là où il y a le plus de mal et de rancœur dans le monde, dans la bouillante région du conflit israélo-palestinien. Après une petite sérénade au Liban où elle fut reçue presque en reine de France (le roi Chirac ayant pris quelques heures de repos), elle a posé ses bagages et son contingent en Palestine, en plein dans la bande de Gaza.
Au cours de sa rencontre avec Mahmoud Abbas, le chef de l’autorité palestinienne, elle a choisi un discours ferme et touchant, comme nous le rapporte Associated Press : Je tiens à vous rendre un hommage particulier pour les efforts que vous accomplissez pour la constitution d’un gouvernement palestinien qui représenterait un progrès substantiel vers la reconnaissance des principes du Quartette pour la paix au Proche-Orient, a-t-elle déclaré.
Dans la crise que traverse le Proche-Orient, les principes sont connus : le peuple palestinien a droit à un État souverain et viable et Israël à une sécurité durable, a-t-elle estimé, ajoutant avoir constaté lors de sa visite dans la Bande de Gaza les frustrations et les angoisses du peuple palestinien.
Voila qui est bien dit. Mais il y a quelque chose d’assez surprenant et de presque embêtant dans ses éloges et dans ce discours un peu trop politically correct. Dans sa course à la candidature du Parti socialiste, elle s’est présentée aux Français comme étant celle qui innoverait dans la façon de faire la politique, en associant un peu plus les citoyens aux décisions importantes du pays. Ainsi, elle grantissait qu’avec les jurys citoyens, l’avis du public aura été donné, soulignant que les gens ne s’intéressent à la politique que si la politique s’intéresse à eux. On n’est jamais déçu avec la démocratie participative, rajoutait-elle, pour rassurer les Français.
Pourquoi donc ne pas commencer elle-même par respecter les choix du peuple, d’un peuple, le peuple palestinien ? Les Palestiniens ont décidé que celui qu’ils aimeraient avoir comme chef serait issu de la formation politique du Hamas. Ils ont rejeté le choix de Mahmoud Abbas, préférant indirectement Ismail Hanniyeh comme premier ministre. Pourquoi donc, si la destinée des Palestiniens est si préoccupante pour la madone des urnes, n’a-t-elle pas saisi la première occasion de réaffirmer par un geste simple tout le bien qu’elle pense de la place du peuple en démocratie ? Abbas n’est pourtant pas le (premier) choix du peuple. Ou bien, ce qui est bien pour la France (démocratie participative) n’est-il peut-être pas aussi bien pour les autres ?
Bizarre, bizarre... Vous avez dit bizarre, comme c’est bizarre !