Le Bayrou nouveau cogne, à consommer sans modération
par Daniel RIOT
jeudi 12 octobre 2006
Un livre pour une campagne, bien sûr. Un livre aussi pour changer d’image de marque. Le centrisme « central » se veut à l’opposé du « centre mou ». « Au nom du tiers état », de François Bayrou, publié chez Hachette Littératures, est aujourd’hui dans les librairies. Des discours connus, une préface musclée, qui doivent alimenter bien des débats dans l’optique des présidentielles.
Son livre (1) est bien sûr un programme pour la présidentielle, avec une sélection de discours prononcés depuis 2002. Mais sa préface est un vrai petit brûlot. Le Bayrou nouveau cogne, il est à consommer sans modération...
Ceux qui ironisent sur le titre (Au nom du tiers état) ou sur son « centrisme révolutionnaire », affiché de conserve avec Jean-François Kahn, devraient le lire attentivement. Ses constats sont réalistes, et ses propositions méritent de sérieux débats. La campagne présidentielle est faite pour cela, d’ailleurs.
Le candidat de l’UDF est évidemment dans un registre auquel les centristes ne nous avaient guère habitués. Finis les robinets d’eau tiède, les positions mi-chèvre mi-choux, les chansons sirupeuses... Le « centrisme central », c’est le contraire du centre mou, du « marais ». Et de cet opportunisme qu’Edgar Faure résumait d’une formule célèbre : « Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent. »
Surprenant ? En fait, la famille centriste a toujours compté des personnalités fortes, des tempéraments bien trempés, et des femmes et des hommes de conviction. Bayrou a travaillé avec Pierre Pflimlin : l’ancien président du Conseil n’avait rien d’un mou...
Bayrou sait bien que ce que les centristes ont fait de mieux, y compris sous la IVe si injustement décriée, porte la marque du courage et de l’audace. « L’Europe, une idée révolutionnaire ! », disait justement Robert Schuman.
Bayrou, qui n’hésite pas à citer le philosophe Jacques Maritain, sait bien que l’inspiration démocrate-chrétienne n’est pas « invertébrée »... « Le mariage de la nécessité et de l’idéal », disait Jean Monnet.
Sans doute Bayrou doit-il forcer un peu le ton. C’est difficile de changer une image de marque de doux en dur... Mais pourquoi, comme Jean-Michel Apathie sur RTL, mettre ses convictions en doute ? Pourquoi sa posture serait-elle une imposture ?
N’a-t-il pas raison sur de nombreux constats, à commencer par ceux qui concernent le Parlement, ce « Rotary d’il y a vingt ans », cette République qui a bien des allures de « monarchie finissante » et cette « dictature politico-industrialo-médiatique » qu’il dénonce au risque de se priver... de relations utiles à un candidat à la présidence de la République et à un parti qui veut jouer un rôle central ? Plutôt courageux, non ?
A lire : Quelques extraits choisis dans les « bonnes feuilles » publiées dans 20 minutes.
1) Au nom du tiers état, Hachette Littératures, 253 pages, 16 euros.