SDF, le logement en France, un merveilleux problème

par Le bateleur
mardi 9 janvier 2007

Le choix du problème est très souvent une phase non explicitée, ce qui permet de faire disparaître les concurrents impliqués dans la résolution du problème retenu.

C’est le cas de la question du logement en France, cristallisée par la question des SDF. Ce choix est-il réellement pertinent... pour les Nombreux ?

On s’en est rendu compte soudainement, les SDF sont autre chose que les clochards et pour cette raison ne peuvent être pris en compte par la charité publique comme les cow-boys prenaient en charge les vaches entre deux étapes de convoiement (lieux confinés, hygiène minimale, soupe populaire, espaces à dormir très exigus).

Tout le monde s’émeut donc de constater que l’un de ceux que l’on voit « dormir à la belle étoile » pourrait être sa fille, son fils...

Ceux qui ont en charge notre destin, les hommes à la plastique absolue, capables de se mouler dans la forme la plus surprenante à l’instant même de son apparition, ont réagi, comme à l’accoutumée, en formulant des propositions et notamment des intentions de loi.

Il faut dire qu’en ce siècle « logiciel », les idées et programmes, c’est ce dont on manque le moins.

Bien sûr, il aurait fallu s’occuper de cette humanité transformée en moulin, avant, bien avant ! Et que ce soient les fils d’un légendaire chevalier errant qui déclenchent ce flot de suggestions pour traiter (ou traire  ?) le problème est très significatif de la manière dont fonctionnent les affaires de la cité, l’irréel répondant à l’imaginaire, avec de petits passages par la réalité sordide... mise en lumière pour le petit écran.

Comme toujours, l’éclairage saturé permet de rejeter un peu plus dans l’ombre, voire dans l’obscurité totale, les lieux générateurs de ces « problèmes  » de logement.

Paradoxalement, la France se désertifie, les mouvements de population suivant les concentrations opérées à coups de TGV et de sections d’autoroute, alors que dans le même temps de petites gares sont supprimées, et des routes nationales, déclassées.

Quel serait la réalité du problème si l’on se préoccupait avant tout d’aménager du territoire au service des hommes et non d’organiser le pays en fonction d’objectifs supérieurs (?) qui ne prennent pas en compte la réalité et entendent la plier, l’orienter, la mettre en conformité avec ces besoins (Les objectifs de Lisbonne).

Objectifs qui supposent des concentrations de population à haute valeur ajoutée avec les conséquences naturelles, à savoir :

- augmentation de la demande de la part d’une catégorie ayant un fort pouvoir d’achat

- modification du parc immobilier pour répondre à cette demande (expulsion des centres-villes et de certains réseaux de banlieues bien desservies)

- en même temps attraction d’une population à pouvoir d’achat réduit, nécessaire pour garantir à l’agglomération le confort indispensable (commerces, propreté, sécurité...)

- renforcement des réseaux de transport en commun dans l’agglomération (avec tendance à l’extension), suppression concomitante de réseaux à destination de « l’arriéré pays ».

Cet angle de vue de la réalité n’est pas générateur de croissance.

Tout du moins pas autant que celui qui conduit à un gros effort pour aider les propriétaires de logements vacants (fausse contrainte aidant, et subventions pour ceux qui comprendront les enjeux) et ceux qui ont les moyens d’en construire de nouveaux.

L’immobilier est en effet un fort facteur de croissance économique puisqu’il est difficile d’en délocaliser une partie importante, l’activité principale ayant lieu (à ce jour) sur le lieu de construction.

C’est ainsi qu’on « trait » le problème.

Et peu importe qu’il eût été moins coûteux de repenser les transports afin de renverser la tendance et les exodes (car bien évidemment, ce sont les populations pauvres qui, baisse d’impôt direct aidant, paieront, indirectement, l’addition).

Peu importe que la qualité de vie obtenue du fait des « solutions  » choisies diminue pour la majorité des pendulaires ou de ceux qui, ne se résignant pas à des trajets de plus d’une heure, préfèrent, pour un temps croient-ils, le statut de SDF.

Voilà encore un merveilleux problème propre à produire, à court terme, un supplément de croissance, et à faire apparaître dans le grand cahier comptable de la France des volumes dans la partie recettes.

Que d’importants déficits de tous ordres soient les conséquences de ces choix n’est pas préoccupant, dans un premier temps, car comme pour tous les grands projets, ces coûts seconds, ces dettes prévisibles ont été externalisés.

La majorité de la population paie déjà un tribut de plus en plus lourd sous forme de contraintes et de renchérissement des loyers ; plus tard, assurément, elle règlera également ce lourd déficit structurel et social, qu’on lui a mis de côté.

A moins que la démocratie réelle qui pointe le bout des oreilles à l’horizon ne...

Alfred Sauvy s’attaqua aux puissants lobbies malthusiens : alcool, logement, automobile. Il prit position dès 1950 contre la gratuité de l’espace que l’automobile utilise avec désinvolture, et annonça la paralysie de la circulation et le bouleversement des villes. Il s’insurgea contre la "désertification" de la France profonde au profit de certaines régions et des villes, et il dénonça les nuisances et les négligences des pouvoirs publics à leur endroit.


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