Villepinte : l’honneur des socialistes retrouvé !
par Pelletier Jean
jeudi 15 février 2007
Etape par étape, Ségolène Royal avance sur son chemin, à son rythme, à sa manière fidèle à ce qu’elle s’est assignée comme méthode, comme objectif et comme projet de société. Après avoir avalé tout crus deux (voire trois, si l’on compte Jack Lang) des principaux éléphants socialistes, elle impose à Villepinte son style, sa démarche et ses idées, traçant le portrait en filigrane d’une social-démocratie anglo-saxonne, un peu bâtardisée de socialisme à la française, versus Union de la gauche de la belle époque (le Smic à 1500€, les allocations familiales revalorisées, les petites retraites augmentées de 5%, la réquisition des logements vacants, etc.)
Ségolène Royal a franchi une étape dimanche après-midi à Villepinte devant plus de 20 000 supporters réunis à l’appel conjoint du Parti socialiste, dont elle est la candidate à l’issue d’une pré-campagne active et passionnée, du Mouvement des radicaux de gauche, qui cette fois a renoncé à présenter sa candidate Christiane Taubira et du Mouvement républicain et citoyen dont le président Jean-Pierre Chevènement a renoncé lui aussi à une candidature de premier tour.
Ils étaient tous les deux présents aux côtés de Ségolène Royale pour la soutenir en compagnie de nombreuses personnalités socialistes et du monde du spectacle.
On peut noter un grand absent : Lionel Jospin, dont l’agenda surchargé ne lui a pas permis d’être présent. Il avait la semaine dernière pris la précaution d’expliquer cette absence par le fait qu’il ne voyait pas l’utilité de faire de la figuration assis sur une chaise ! Dixit.. On croit rêver. On le savait suffisant, méprisant, dominateur et sectaire, son échec sanglant, 16,18 % de voix au premier tour en 2002, ne lui a rien appris.
Au même titre qu’il avait annoncé au moment de sa déclaration de candidature qu’il ne serait pas le candidat des socialistes, il continue à « tracer » une route solitaire qui ne croise pas celle des militants de son parti.
Je ne sais pas ce que son passé à une organisation trotskiste lui a enseigné... mais visiblement, il ne sympathise ni avec les militants, ni avec les masses populaires.
Il avait mené une campagne, en restant par ailleurs premier ministre, en petit comité et ne prenant appui que sur son bilan, il s’était dispensé de défendre un projet, un programme, des propositions pour la France.
En se retirant, glacial, le soir du premier tour, il abandonnait à leur sort des militants avec lesquels, de fait, il n’avait jamais cohabité.
Cette stratégie avait cruellement plombé le Parti socialiste et ses militants avec, pour quelque temps. Que l’on ne s’étonne pas que l’élaboration du projet socialiste ait été si laborieuse et aboutisse finalement à un texte fade, sans aspérité, dépourvu de toute proposition concrète.
Par sa précampagne au cours des primaires, sa méthode de dialogue avec les débats participatifs, le questionnement lancé sur le site de Désir d’avenir, elle a mis en mouvement des militants qui se sont prêtés au jeu, un jeu qui leur a fait cruellement défaut toutes ces dernières années.
Ainsi a-t-elle pu présenter son pacte présidentiel avec ses cent premières propositions (d’autres suivront dans le domaine de la culture, de la fiscalité, de la justice, etc.) qui a tout de même plus d’allure que le projet socialiste, car il est porté par une dynamique et il est force de propositions pour l’avenir de la France.
Ainsi contrairement à Lionel Jospin, elle a défini un programme et une ligne politique gauche/droite qui permet un vrai débat de société, projet contre projet.
Mais aussi, contrairement à Lionel Jospin, elle a rallié dès le premier tour les cousins et les cousines du Parti socialiste, à savoir les radicaux de gauche et les membres du Mouvement républicain et citoyen.
C’est en quoi Ségolène Royal avec opiniâtreté et ténacité a su redonner aux socialistes la fierté perdue par les erreurs multiples de Lionel Jospin et de ceux qui l’avaient suivi dans cette funeste aventure.
Elle a su faire dépasser aux uns et aux autres leurs regrets, leurs amertumes, leurs ambitions contrariées pour les rassembler, sauf un... Lionel Jospin.
Maintenant il lui reste du chemin à parcourir, rien n’est gagné. Et pour autant quand on lit la déclaration de Marie-George Buffet, volant au secours de Nicolas Sarkozy, en déniant tout sérieux économique aux propositions de Ségolène Royal, l’accusant de ne pas avoir les moyens économiques de sa politique, on peut s’interroger sur ce que sera la position du Parti communiste (puisqu’elle n’est, malgré ses dénégations, que la candidate de son parti) au deuxième tour... Les Verts eux-mêmes semblent ne pas vouloir décoller autour de leur candidate Dominique Voynet et ne semblent pas constituer un réservoir de voix conséquent...
Il reste à observer le score potentiel d’un José Bové, dont on ne sait encore si sa candidature pourra aboutir, et surtout quel impact aura le pacte présidentiel de Ségolène Royal et de ses cent propositions sur « l’effet Bayrou »... Va-t-elle récupérer une partie de l’électorat flottant qui avait eu, aux dires des sondages, tendance à se rallier à François Bayrou ? C’est la question des dix ou douze jours à venir.