Avant

par Chem ASSAYAG
mercredi 12 octobre 2005

Regarder en arrière peut être utile à condition de ne pas être ligotés par notre passé.

- Avant nous mangions des produits sains, non traités aux pesticides, vermicides, insecticides et autres OGM...

- Avant les rivières étaient propres, les bords de mer limpides, nos bois et forêts affichaient une étonnante diversité...

- Avant nos villes et nos écrans de télévision n’étaient pas défigurés pas une publicité omniprésente et envahissante...

- Avant les écrivains écrivaient de vrais romans avec des personnages et une histoire, dans une langue châtiée et sans faute d’orthographe...

- Avant il existait une vraie solidarité entre les générations ; les anciens conseillaient les jeunes, ces derniers les aidaient et les respectaient...

- Avant les élèves admiraient et respectaient leurs professeurs, arrivaient à l’heure aux cours et ne portaient pas de tenues provocantes...

- Avant les gens étaient plus aimables, souriaient dans le bus ou le métro, laissaient leur place aux personnes âgées ou aux femmes enceintes...

- Avant tout le monde avait un travail, une place dans la société, un rôle précis...

- Avant il n’y avait pas ce culte obsédant du corps, de la jeunesse et de la beauté...

- Avant le respect de la parole donnée était réel, les engagements tenus, le sens du devoir répandu...

- Avant les familles ne se séparaient pas, les enfants avaient deux parents et une seule maison...

- Avant chacun connaissait l’Histoire de son pays, qui n’était pas ouvert à tous et à toutes comme un moulin...

- Avant les emplois n’étaient pas menacés par des délocalisations lointaines, par un capitalisme financier triomphant...

- Avant tout était plus simple, plus clair, plus humain...

- Avant nous étions mieux.

En ce début de millénaire, la rengaine de « l’Avant » a saisi la France. Que nous soyons de gauche ou de droite, citadins ou ruraux, cadres supérieurs ou ouvriers, jeunes ou vieux, nos regards sont tournés vers le passé, vers une réalité imaginaire, tellement plus agréable et sécurisante. Nos peurs nous aimantent vers les temps anciens, dans une nostalgie frénétique, où, pour tous les sujets, nous trouvons des repères et des certitudes pour nous dire que « avant c’était mieux ». Nous sommes pris dans un immense tourbillon collectif, où faute de pouvoir regarder et appréhender le présent en face, nous nous réfugions dans les chimères des grandeurs et des bonheurs anciens.

Mais cette cécité du présent a un coût, elle nous ligote, nous emprisonne, nous ankylose ; nous sommes devenus incapables d’imagination, de créativité, d’optimisme. Nous sommes devenus des infirmes incapables de forger les outils du présent et de l’avenir, incapables d’accompagner l’évolution de notre monde. Au lieu d’utiliser le passé pour le dé-passer, en faire quelque chose de neuf, nous nous contentons de la posture de celui qui marche à reculons, de celui qui regarde perpétuellement en arrière. Ainsi, à force de penser et d’idéaliser « l’avant », nous sommes des éclopés, des malades, des rêveurs, pour lesquels il est impossible d’aller DE l’avant.


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