C’est Gugusse qui allait au violon

par C’est Nabum
mercredi 14 septembre 2022

 

Contre-danse

 

Gugus ne fait plus danser les filles et les garçons. Il y a belle lurette que le pauvre garçon a subi les affres des empêcheurs de s'amuser en rond. Depuis Saint-Louis nous dit-on celui qui confondait le chêne et les chaînes, les glands sont priés d'aller croupir à l'ombre et si l'arbre ne se trouve pas à portée de main, il est même possible de les prier d'aller se pendre ailleurs.

Je devine mon propos abscons pour qui ignore tout de cette merveilleuse langue française que nos élites et nos dirigeants semblent vouloir bouter de nos pratiques langagières. Il est bon de leur remettre les point sur les « i », lettre du reste que l'on retrouve aussi bien dans le violon que dans son ancêtre le psaltérion.

Je devine qu'un seul de ces deux instruments est dans vos cordes. Je ne vais pourtant pas vous souffler dans les bronches pour une méconnaissance assez normale en la circonstance. Le sus nommé psaltérion eut le privilège de devancer son camarade quand il s'agissait d'envoyer paître ailleurs un indésirable.

Mettre au psaltérion équivalait à transcender métaphoriquement les cordes de ce délicat instrument pour qu'elles deviennent les barreaux d'un lieu clos. L'enfermement permettant ainsi à celui qui avait enfreint les règles de la société, à s'offrir une longue pénitence propice à la réflexion, à la méditation et le cas échéant à la prière.

Il était ainsi question et ce, sans se torturer l'esprit, de se mettre au psautier, terme assez voisin de l'instrument pour jouer de la confusion. Dans la cellule, le réfractaire avait ainsi tout loisir de se réciter des psaumes afin de tenter de s’amender. Les époques ont du reste formidablement changé puisque aujourd'hui il est à la fois possible de se retrouver au violon tout en étant au préalable ou concomitamment amendable.

Mais revenons à nos moutons qui sont ainsi tondus et enfermés. Le violon de Saint-Louis avait de quoi vous rendre dingue. Il s'agissait d'une galerie du palais de justice de Paris dans laquelle existait un lieu enclos pour s'assurer des personnes indésirables. La dite cellule était suffisamment à l'écart des salles de justice pour que les emmurés ne viennent pas troubler les audiences par leurs cris et vociférations.

Le violon n'avait rien d'un instrument à cordes vocales, puisque les malheureux risquaient fort de se les briser sans l'espoir de se faire entendre. Les mœurs évoluant, l'enfermement a nécessité de transporter le futur détenu provisoire. Le véhicule en question, toujours pour éviter que notre délinquant à circonscrire soit mis au secret sans faire de salades. C'est alors que le panier à salade fit son apparition pour bien essorer le malfrat avant que lui accorder un violon.

On mesure toute la poésie de langue carcérale et je n'évoque pas ici les écrous et les douleurs qui peuvent s'en suivre quand du poste, le prévenu qui n'avait pas compris se retrouve aux arrêts dans une maison pour détenus. Le violon cessant de jouer de la corde sensible pour entraver le prisonnier de manière plus durable.

En cas de récrimination et même de rébellion, les archets se mêleraient à la danse pour faire feu de tous bois et réduire au silence le réfractaire à la peine. Il n'y a nulle fausse note dans cette histoire même si, pour celui qui est ainsi privé de liberté, le canard serait un moyen plaisant de s'envoler pour jouer les filles de l'air.

J'espère avoir ainsi éclairé votre lanterne, celle-là même où l'on pouvait accrocher quelques individus quand les violons et les prisons débordaient. C'était alors un moyen assez pratique de régler le problème de la surpopulation carcérale tout en maintenant l'harmonie dans une population qui marche en chantant au canon. Un peuple qui connaît la musique, se méfie toujours des chefs d'orchestre, surtout quand celui-ci ne cesse de lui jouer du pipeau.


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