Dictionnaire amoureux d’Albert Camus...

par rosemar
vendredi 29 mars 2024

Mohammed Aïssaoui s'est construit avec l'œuvre d'Albert Camus. Il nous livre avec ce dictionnaire "son" Camus, celui qui illumine sa vie, qui élargit le cœur et l'esprit, qui console des chagrins du monde.
Avec la complicité de Catherine Camus qui lui a donné accès à des documents exclusifs.

Mohammed Aïssaoui est venu présenter son ouvrage lors du Festival de la Biographie :

"Je crois que, comme beaucoup, on découvre Camus quand on est est au lycée, notamment l'Etranger ou La Peste et après, je trouve qu'on n'a pas la maturité nécessaire pour tout comprendre et saisir.

Et j'ai eu la chance d'être accompagné par les oeuvres de Camus tout au long de ma vie, étudiant et même après en tant que critique littéraire, de toujours pouvoir découvrir Camus, parfois de le lire techniquement, c'est à dire comment il écrit L'Etranger, comment il écrit La Peste et plus ça allait et plus c'était une compagnie non pas quotidienne mais presque hebdomadaire.

Il faut lire et relire Camus, parce que, par exemple, ses nouvelles, dont on parle un peu moins, sont juste sublimes : elles exaltent le lyrisme, elles exaltent la beauté, elles exaltent le présent et ce Dictionnaire Amoureux, j'ai vraiment voulu faire avec la complicité de Catherine Camus qui est la fille d'Albert Camus.

C'est un partage que je voulais faire avec les lecteurs. Je pensais, quand j'étais plus jeune, que j'étais le seul à connaître et à comprendre Albert Camus. Heureusement, j'ai découvert que nous étions quelques-uns...

 

Il y a eu un pamphlet d'un ami de Sartre qui voulait casser Camus, 10 ans après sa mort : c'était en 70, Camus est mort en 1960, et donc il a écrit ce pamphlet : Albert Camus, philosophe pour classes terminales, qui était censé être une insulte, censé dénier la qualité de philosophe de Camus.

Or, j'en ai discuté avec Catherine Camus, il n'y a pas de raison que ce soit une insulte, cela veut dire simplement que Camus est accessible au plus grand nombre. Et Camus a énormément de lecteurs, alors que d'autres ont des commentateurs. Camus est lu aujourd'hui par des jeunes et, pour moi, ce n'est pas une insulte que Camus soit confiné à être compris par des adolescents.

Et sa littérature, ses romans, ses nouvelles, son théâtre, Le Malentendu, Les Justes, Caligula sont d'une limpidité extraordinaire. Il y a un critère objectif : c'est que Camus, alors qu' il est mort en 1960, a traversé, a répondu au défi du temps : aujourd'hui, il se lit encore plus que de son vivant.

 

Cela veut dire qu'aujourd'hui Camus nous parle encore, Camus nous éclaire encore, il a ce courage du sens de la nuance.

J'ai vu, il n'y a pas longtemps, une projection d'une série de 4 fois cinquante minutes, qui s'appelle La Peste, ce sera une dystopie, produite par Georges-Marc Benamou qui est un grand camusien, et on voit à quel point Camus nous parle encore... je voulais juste citer cet exemple qui a été frappant. La Peste a été publiée en 1947. En 2020, quand nous avons subi ce que nous avons subi, pour comprendre ce que nous vivions, nous avons ouvert un roman qui a été publié en 1947 et écrit évidemment un peu plus tôt.

Cela a été une des meilleures ventes de 2020, parce que Camus, à travers son regard de la peste à Oran, en fait, décrivait tout ce que nous vivions : les questions administratives, ceux qui voulaient échapper aux règles, ceux qui voulaient avoir des passe-droits, et même les histoires de masques. On se rend compte que La Peste, c'est aussi le roman de la séparation, nous étions séparés de ceux que nous aimions, confinés à rester enfermés, à ne plus comprendre, à rechercher quelque sens, c'est cela qu'on a vécu pendant le confinement.

 

Ce dictionnaire est entrecoupé de petites respirations : ce sont les mots préférés d'Albert Camus... Le fait d'avoir travaillé avec Catherine Camus a été une chance extraordinaire, je l'ai rencontrée il y a 24 ans, c'est une femme qui n'est pas facile d'accès, une femme qui a besoin d'être en confiance pour parler.

En fait, j'ai eu ce sentiment d'être orphelin avec elle. Elle a perdu son père quand elle avait 14 ans, moi, c'est un auteur que j'aime, qui m'accompagne, Camus, c'est mon père, c'est mon professeur, mon frère, c'est mon ami. Quand j'ai envie d'être consolé des chagrins du monde, je me plonge dans une de ses oeuvres.

 

Je voulais que Catherine participe à ce Dictionnaire Amoureux parce que d'abord c'est la meilleure spécialiste de Camus. Et quand je lui ai écrit que j'aimerais connaître les mots préférés de Camus, elle a répondu : "Mais, tu sais qu'il les a donnés ces dix mots préférés", il y a la douleur, le désert, la terre, le monde, les hommes, l'honneur, la misère, l'été, la mer, la mère... et ces dix mots, j'ai voulu leur donner un sort un peu particulier, c'est la définition écrite par Camus lui-même.

Par exemple, sur "les hommes", qui est un de ses mots préférés, j'ai pris une citation dans La Peste, où il dit que c'est l'un des fléaux qui lui a appris qu'il y avait plus de choses à admirer chez les hommes que de choses à blâmer, et pour que quelqu'un dise ça, c'est qu'il croit en l'humanité, et on a envie de croire avec lui..."

 

Le blog :

http://rosemar.over-blog.com/2024/03/dictionnaire-amoureux-d-albert-camus.html

 

Vidéos :

 


Lire l'article complet, et les commentaires