L’Afrique victime de l’exode de ses personnels médicaux

par Henry Moreigne
mercredi 9 août 2006

Le 7 avril dernier, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) rééditait, simultanément dans les différentes régions du globe, une journée mondiale de la santé. Très symboliquement présent dans la capitale zambienne, le Dr Lee Jong-Wook, directeur général de l’OMS, a stigmatisé le fait que l’Afrique est en train de se vider de ses agents de santé au profit des pays riches. L’insuffisance en personnels de santé expliquerait en grande partie le fort taux de mortalité du continent africain.

Pour le Dr Jong-Wook, la Journée mondiale de la Santé est certes l’occasion de saluer la remarquable contribution du personnel soignant à la santé mais aussi de pointer les choses qui fâchent. Le constat est amer.

Partout dans le monde, les systèmes de santé ont du mal à former, rémunérer et fidéliser leur personnel. Dans les pays développés, la demande d’agents de santé augmente à mesure que la population vieillit et que les affections chroniques gagnent du terrain. Pour répondre à cette demande, les pays riches font de plus en plus souvent appel à des agents qualifiés, originaires de pays en développement aggravant de ce fait pour ces derniers la pénurie de personnel.

Or, sans personnel sur qui compter, il est impossible de mettre les avancées en matière de soins à la portée de ceux qui en ont besoin. On ne peut prévenir et soigner efficacement les maladies sans agents de santé à qui confier les tâches d’évaluation, de prestation et de suivi. Le manque d’effectifs compromet les moyens de riposte en cas de pandémie de grippe humaine, mais aussi plus spécifiquement en Afrique pour combattre la progression du sida souvent en délivrant de l’information aux populations et en luttant contre "la médecine" traditionnelle.

Cette carence en personnels ne concerne pas seulement les praticiens, mais aussi les enseignants, instructeurs, administrateurs et personnels d’appui.

Cumulant les handicaps, l’Afrique est également confrontée à des difficultés économiques, à la détérioration de ses infrastructures sanitaires et à des troubles sociaux quand ce ne sont pas des guerres.

Le Nigéria, le Ghana et la Zambie figurent parmi les pays les plus affectés par l’exode de main d’œuvre médicale au profit principalement du Royaume-Uni des USA, du Canada et de l’Australie.

Un rapport spécifique a été réalisé par l’organisme onusien, sous la plume du Dr Tim Evans. L’auteur affirme que 25% des agents de santé africains travaillent dans les pays occidentaux. Plus qu’une saignée, le phénomène est qualifié de fuite des cerveaux voire de pillage des ressources humaines africaines. Ainsi, la Zambie ne disposerait que de 600 médecins pour 11 millions d’habitants, soit un praticien pour 14 000 habitants, quand dans le même temps le Royaume-Uni enregistre un rapport de 1 pour 600.

A court terme, le Dr Evans préconise que las pays riches aillent recruter en Europe de l’Est, région encore épargnée par le problème d’insuffisance en personnel de santé. On sait pourtant que, plus à l’est, l’ex-URSS est confrontée à une paupérisation importante d’une partie de la population et des infrastructures sanitaires.

L’accès aux soins de l’ensemble des populations, parce qu’il découle d’un partage des richesses, demeure incontestablement un grand défi de notre millénaire.

 


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