Qui se rappelle du kéynésianisme ?
par Michel Monette
lundi 6 juin 2005
En ce 5 juin naissait John Maynard Keynes dont les théories économiques vont former la base de l’État Providence ou Welfare State. Keynes était une personnalité hors du commun. En connaissez-vous beaucoup qui ont donné leur nom à un courant de pensée. Qui a dit Karl Marx ?
Tout comme Marx, Keynes n’est « ni l’unique auteur, ni l’unique acteur de la révolution qui porta son nom. » Il n’en demeure pas moins le personnage central d’un véritable roman politico-économique qui a marqué l’époque des babyboomers.
Le pire - ou devrait-on plutôt dire le mieux ? - est qu’il n’était pas diplômé en économie.
Keynes, héros du capitalisme
Retour aux années trente : le monde libre
se défend contre une double menace idéologique. Keynes est l’un de ses plus farouches défenseurs. L’interventionnisme d’État qu’il prône est une arme contre le bolchevisme et le fascisme.
Keynes devient un homme influent.
Keynes’s approaches led to the Bretton Woods agreement of 1944, which established the International Monetary Fund and the World Bank, as well as establishing the Welfare State in Great Britain.Avant que vous vous emportiez, sachez lecteurs impertinents que Keynes, décédé en 1946, n’envisageait pas que les institutions financières internationales deviendraient les fossoyeurs de l’interventionnisme d’État.F. David Peat. From Adam Smith to Enron.
Les Trente Glorieuses
Dans le monde capitaliste, on se mit à adopter des politiques qui riveraient une fois pour toute, croyait-on, son clou au chômage. De même, par ses politiques sociales l’État allait compenser pour les imperfections du marché.
C’était parti pour les Trente Glorieuses, « marquées par un certain rattrapage des pays les moins riches sur les pays les plus riches ». Croissance économique, plein emploi, société de consommation, politiques sociales, tout concourut à une amélioration notable des niveaux de vie.
Puis ce fut l’immense mal de tête d’un lendemain de party quand la stagflation vint tout gâcher dans les années 1970.
Vous dites interventionnisme ?
Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage. On qualifia donc le kénésianisme d’interventionnisme. Un mot qui rimait drôlement bien avec communisme au panthéon des idéologies.
Encore aujourd’hui, le mot a une connotation négative. Vous dites que vous voulez que l’État, par ses politiques économiques et sociales, contribue à l’avènement d’une société plus solidaire, plus égalitaire ? Bang ! Vous voilà qualifié de vilain interventionniste.
Pourtant, il n’y a aucune évidence qui puisse appuyer cette charge à fond de train contre les dépenses sociales des États.
The relationship of the economy and public spending is complex, and there is no consistent evidence to support the view either that spending on welfare damages the economy or that it enhances it.Rien, si ce n’est quelques prétendues vérités économiques, ne justifie l’acharnement actuel à discréditer l’État.Paul Spicker. An introduction to Social Policy. The welfare state and economic performance.
Une fois n’est pas coutume, vous me voyez en accord avec un point de vue catholique :
Les médias sont parfois utilisés pour édifier et soutenir des systèmes économiques qui poussent à l’avidité. Le néolibéralisme en est un exemple.Après avoir désertés l’Église, les babyboomers se sont mis à observer les dix commandements du nouveau capitalisme.Conseil pontifical pour les communications sociales. Éthique dans les communications sociales.
Il faut bien appeler un chat un chat. L’intérêt individuel ne sert pas forcément l’intérêt collectif, comme l’avait si bien compris Keynes malgré son attachement au capitalisme, n’en déplaise aux partisans du libre marché.