Un point sur la situation

par Forest Ent
mercredi 15 octobre 2008

En exclusivité mondiale Agoravox, une interview d’une personne croisée dans un bar prétendant être ministre de l’Economie et des Finances.

- Madame la ministre des Finances, comment vous sentez-vous dans vos fonctions ?

- Très bien. Si j’étais restée dans ma boîte à New York, là je serais vraiment dans la panade. On dit toujours que je vais être éjectée au prochain remaniement, mais, franchement, qui voudrait d’un portefeuille pareil en ce moment ? Ça a des avantages d’être fonctionnaire.

- En quoi consistent ces fonctions ?

- Je traduis en anglais les courriers de Nicolas, et Laurence me donne parfois des parachutes à repasser.

- Comment sont vos relations avec vos collègues du gouvernement ?

- (Mécaniquement) Nous formons une bonne équipe, unie sous la direction dynamique du présid... euh du Premier min ... du patron, quoi. (Une pause) C’est horrible. Ils n’arrêtent pas de hurler.

- Et avec vos collègues étrangers ?

- (Souriante) Je n’ai plus le droit de leur parler. J’aime autant, parce que pour me faire contredire cinq minutes après... Et ils tirent tous la tronche en ce moment.

- Comment jugez-vous l’évolution du pouvoir d’achat ?

- Ça va. Merci.

- Je voulais dire du pouvoir d’achat des Français en général...

- C’est la première fois que chaque Français peut se payer une villa de 15 pièces avec piscine. En Californie, un coin sympa en plus. Le pouvoir d’achat des Français n’arrête pas d’augmenter. Comparativement. (Mécaniquement) Il faut vaincre la morosité. Le gouvernement a lancé des réformes qui vont débloquer l’économie française, la rendre plus compétitive, allonger les dents... euh... la croissance. Il faut intensifier ces réformes.

- Par exemple ?

- Il faut réduire la dépense publique.

- Alors pourquoi donner aux banques ?

- Ce n’est pas public, c’est privé.

- Quoi d’autre ?

- Il faut arrêter de soutenir les assistés. Vous vous rendez compte que M. Hirsch voulait des milliards d’euros pour ses œuvres ? Je ne suis bien sûr pas contre la charité, mais il faut connaître les priorités.


- Comment les réformes vont-elles améliorer l’emploi ?

- Nous avons subventionné les heures supplémentaires et le temps partiel. Comme cela, les employeurs ont le choix. Nous allons maintenant développer les incitations au travail en supprimant l’assurance chômage. Le sénateur Dassault va proposer une loi.

- Comment voyez-vous la situation économique en 2009 ?

- (Mécaniquement) Il faut vaincre la morosité...

- Non, sérieusement.

- Ah, non, je n’ai pas le droit, ça va mettre la panique.

- Alors une prévision du taux de croissance ?

- Il se peut qu’il soit légèrement inférieur.

- A quoi ?

- (Mutisme)

- Pensez-vous qu’il y ait un risque de récession en France ?

- (Enjouée) Trop tard ! On y est. Je vous ai bien eu, hein ?

- Êtes-vous inquiète de la situation sociale ?

- Sûr que Fadela elle va grave galérer. Wesh.

- Que pensez-vous de la déclaration de M. Strauss-Kahn, patron du FMI, proposant d’utiliser des droits de tirage spéciaux pour les Etats en difficulté économique ?

- C’est un menteur. Quinze fois que je l’appelle pour lui en demander. Il ne me répond même plus. Il dit qu’il va tout donner aux Etats les plus nécessiteux : Louisiane, Floride, Illinois... Quand je pense que Nicolas lui avait proposé mon poste... Comment peut-on encore croire aux promesses des politiciens ?

- Quelle est la cause de la crise financière ?

- C’est le contrôle excessif et tatillon des établissements financiers. Cela leur a coûté cher et ils ont été obligés de développer des produits à fort rendement.

- Pouvez-vous nous expliquer votre plan de soutien aux banques françaises ?

- C’est facile. Elles sont dans la dèche parce qu’elles ont prêté à des banques américaines qui ont fait faillite. Alors on va leur donner plein de sous, et elles iront mieux.

- Et elles vont vous les rendre ?

- (Interloquée) Les rendre ? (Très dignement) Je ferai bien attention. Je ne prêterai qu’à des gens sûrs.

- Comment allez-vous financer ce plan ?

- On pourrait toujours essayer de vendre nos parts de GDF-Suez, mais ce sera difficile. Heureusement qu’on a vendu les autoroutes à temps !

- Mais le président a dit qu’il ne vendrait jamais la minorité de blocage de l’Etat dans GDF.

- (Hilare) Oui, c’est moi qui signerai.

- Et si ça ne suffit pas ?

- Il faudra emprunter.

- A qui ?

- Aux banques.

- Et si elles ne prêtent pas ?

- Je privatiserai La Poste, la police et l’armée.

- Vous pensez les vendre à qui ?

- Je pensais vendre l’armée à la Chine. Elle pourrait en avoir besoin et elle a une monnaie forte maintenant. Enfin, relativement... Elle pourra leur refaire les uniformes, aussi. Michèle n’arrête pas de m’embêter avec ça, alors qu’elle a plein d’armes de destruction massive en parfait état qu’elle pourrait vendre. C’est comme la Boutin. Franchement, elle a raison : est-ce le moment de gaspiller nos économies à construire des HLM alors que c’est la crise et qu’il y a plein de gens à la rue ?

- Et les paradis fiscaux ?

- On avait dit qu’on ne parlerait pas de vie privée. Je précise quand même que je ne suis pas la mère du fils Dati.

- Merci pour cette interview, Madame la ministre. Avez-vous un message particulier pour les Français ?

- (Solennelle) Les Français s’impatientent. Ils ont l’impression que les réformes tardent à produire leur effet. Je leur affirme que ce n’est pas le cas.


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