Jospin, la tentation d’une île

par Bernard Lallement
lundi 29 août 2005

Feu sur le quartier général !
Tel sera, à n’en pas douter, le leitmotiv de l’université d’été du parti socialiste qui vient de s’ouvrir à La Rochelle. Comme la droite, le rejet du referendum européen a laissé sonnés les socialistes et surtout François Hollande qui avait été un farouche artisan du oui. Désavoué par les électeurs, le Premier secrétaire est contraint de reléguer ses ambitions présidentielles au magasin des illusions perdues, alors que son ennemi juré, Laurent Fabius, ardent partisan du non, se voyait ouvrir devant lui une autoroute pour 2007.


Tous les militants auront, surtout, en tête le résultat d’un sondage que l’Institut Louis Harris a réalisé pour Libération. Lionel Jospin y apparaît comme le meilleur candidat pour représenter les valeurs de la gauche, tant parmi les sympathisants de gauche que parmi ceux des socialistes. Jamais l’ex-Premier Ministre n’a été aussi populaire, depuis qu’il avait annoncé sa décision, en principe irrévocable, de se retirer de la politique. Mais ce qui retiendra, avant tout, l’attention c’est le score de François Hollande. Parmi les sympathisants de gauche il arrive seulement en 10ème position ; loin devant, Arlette Laguillier, placée deuxième, Bertrand Delanoë, Olivier Besancenot et même Laurent Fabius. Et parmi les sympathisants socialistes, le Premier secrétaire arrive juste derrière le porte-parole de la LCR, en ne recueillant que 19 % des suffrages.
C’est dire combien le prochain congrès sera celui de tous les dangers pour François Hollande. A l’image du gouvernement, les éléphants du P.S. répugnent à tirer les leçons du 29 mai : avant tout une défiance envers une représentation politique déconnectée des réalités du pays.
Pourtant, les socialistes savent que pour gagner à l’horizon de 2007 ils sont condamnés à l’unité. Encore faut-il, pour cela, que les velléités carriéristes cèdent le pas à la raison. Or, à voir la pléthore de candidats à la candidature, rien n’est moins sûr : Dominique Strauss-Kahn, Jack Lang, tout récemment Martine Aubry, Bernard Kouchner, au titre certainement du raton laveur cher à Prévert et, bien sûr Laurent Fabius, le seul à avoir peut être une réelle chance de l’emporter, chacun se voit un destin national. Gageons que d’ici le congrès d’investiture d’autres vocations se feront jour. Aussi, inutile de préciser que personne, chez les caciques de la rue de Solferino, ne verrait d’un bon oeil l’improbable retour de Jospin.
Si nous rajoutons les Verts, le PCF, le parti de Chevènement (mais oui il existe encore) l’extrême gauche et José Bové qui se sent, de plus en plus, lui aussi, un avenir national, le camp de la gauche a de fortes chances de ressembler à une auberge espagnole.
A droite la situation paraît bien plus claire. A part François Bayrou, que François Mitterrand voyait bien en Président de la République, Nicolas Sarkozy semble sans concurrent sérieux.
Aussi, l’élection présidentielle de 2007 pourrait-elle très bien devenir un remake de 2002 avec une extrême-droite, tirant profit des divisions de la gauche, présente au second tour.
En un mot, notre avenir politique est à l’image des romans de Houellebecq : désespérant.


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