Blog syndical et liberté d’expression

par Olivier Sanviti
samedi 4 juin 2005

Les décisions jurisprudentielles relatives au droit du blog et des bloggeurs sont encore assez rares en France.

Un jugement du Tribunal de Grande Instance de Bobibny vient d’être récemment publié (TGI Bobigny, 11 janvier 2005 TNS Secodip / Fédération CGT des sociétés d’études) apportant un éclairage intéressant sur l’opposition entre les libertés des salariés et le pouvoir de l’employeur à l’occasion de l’utilisation des NTIC.

En l’espèce, la Fédération CGT des sociétés d’études avait ouvert à la fin de l’année dernière un blog consacré à la société TNS Secodip (société ayant comme activités les études de marché et les sondages) composé de neuf rubriques dont certaines intégrant des tracts, des comptes rendus de négociations internes et autres rapports d’expertise.

Par conclusions du 7 décembre 2004, la société TNS Secodip a notamment demandé la suppression immédiate et sous astreinte des publications litigieuses au motif que ces concurrents ont un libre accès à des renseignements concernant sa situation financière et sa politique salariale. Le fondement juridique principal était en l’espèce l’obligation de discrétion des représentants du personnel et le caractère confidentiel des informations publiées (art. L. 432-7 du Code du travail).

Par conclusions du même jour, la Fédération CGT des sociétés d’études a contesté cette demande qui porterait atteinte à la liberté d’expression du syndicat et a rejetté l’argument du demandeur selon lequel l’article L. 432-7 du Code du travail s’appliquerait aux salariés ou à un syndicat.

Faisant partiellement droit aux arguments de l’employeur, le Tribunal de Grande Instance de Bobigny, statuant en audience publique, contradictoirement et en premier ressort a :

- ordonné la suppression du blog ouvert par la Fédération CGT des sociétés d’études, dénommé http://cgt.secodipfree.fr, des documents figurant dans les rubriques suivantes - syndicat - rentabilité de Secodip - les négociations - le Comité d’Entreprise - et les Délégués syndicaux, dans le délai de huit jours du prononcé du jugement, sous astreinte de 600 € par jour de retard ;

- rejetté la demande en ce qui concerne la suppression des rubriques - travail de nuit - et - accord sur les 35 heures - ;

- condamné la Fédération CGT des sociétés d’études à verser à la société TNS Secodip, la somme de 6.000 € à titre de dommages-intérêts ;

- ordonné l’exécution provisoire ;

- condamné la Fédéréation CGT des sociétés d’études à payer la somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du NCPC.

Le Tribunal a ainsi estimé que la divulgation sur un blog par un syndicat d’informations financières et salariales sensibles, voire confidentielles, à des tiers et notamment des concurrents, pouvait causer un préjudice moral à une société.


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