L’Europe européenne

par Luc
lundi 17 octobre 2005

Regardez bien cette image : c’est la carte de l’Europe, telle que vous pouvez la voir sur tous les billets de banque en cours days les pays qui ont adopté l’Euro. L’Europe y est représentée en couleur foncée. Nos voisins et amis non-européens y sont représentés en couleur claire. On reconnaît le Maroc, l’Algérie, la Tunise et ... la Turquie !

Comme j’ai eu déjà l’occasion de le souligner, la Turquie est un pays d’Asie et non pas un pays d’Europe. La construction de l’Europe avec les États européens est déjà suffisamment compliquée comme ça sans y ajouter des pays d’Asie mineure.

En plus, c’est quand même extraordinaire de proposer à la Turquie d’entrer dans l’Union européenne, alors qu’elle refuse de reconnaître un des États de l’union : Chypre ! On peut noter que l’Europe a pris soin de ne pas froisser la Turquie en ne la conduisant pas devant la Cour de justice pour l’occupation militaire illégale d’un territoire désormais européen ; mais comment pourrait-elle le faire, alors que son Tribunal pénal "international" s’est hâté de faire l’impasse sur quelques crimes de guerre en Croatie, rien que pour amener le protecteur autrichien des Croates à lever ses objections à l’entrée de la Turquie dans l’Europe ? (voir Interview du Président de Chypre du 7 octobre).

D’ailleurs, dès l’annonce officielle, à Luxembourg, de l’ouverture des négociations de l’entrée de la Turquie dans l’Europe, la Turquie a fêté l’événement en procédant, avec son aviation militaire, à des violations massives de l’espace aérien grec, au-dessus des îles de Chios, Lesbos et du Dodécanèse. Vous trouvez ça normal, vous ? Pas moi.

J’ai noté dans un billet de la semaine dernière le silence apparent de Chypre et de la Grèce à l’annonce de l’ouverture de ces négociations d’entrée de la Turquie dans l’UE. J’en discutais avec un ami chypriote grec ; il me disait que la clef de cette situation vient du fait que les Américains (et leurs alliés anglais) veulent faire main basse sur le pétrole du Moyen-Orient. Pour cela, ils ont besoin de Chypre, où se trouvent deux grandes bases militaires britanniques très importantes, qui ont servi de base arrière pendant la guerre en Irak. De plus, les Américains veulent y construire une base immense pour mieux peser sur le Moyen-Orient. Dans cette histoire de superpuissances, Chypre, déchirée par l’invasion turque, n’a pas grand chose à dire. Elle subit, et c’est tout. Quant aux Anglo-Américains, l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne leur permet de s’installer aux portes de l’Iran, de l’Irak et de la Syrie. Le pays est un simple pion sur l’échiquier de la guerre du pétrole.

On est donc bien loin des idéaux de la Construction européenne ... Et la France, qu’a-t-elle à dire à ce sujet ? Plus rien depuis le 29 mai, qui a sabordé le projet de constitution qu’elle avait elle-même élaboré, et dans lequel, je le rappelle, le premier article du premier titre de la première partie s’énonçait ainsi :

"L’Union est ouverte à tous les États européens qui respectent ses valeurs et qui s’engagent à les promouvoir en commun. "

Pour en savoir plus :
1. La Turquie est-elle en Europe ? (Chez Luc)
2. La Turquie se félicite des assurances pour sa pleine adhésion à l’UE. Son armée s’offre une fête au-dessus de l’Egée grecque. (Info Greece)
3. Interview du Président de Chypre (Info Greece)
4. La Construction européenne est morte (Chez Luc)

Crédit image : Luc


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