Vivons-nous au singulier ?

par Réflexions du Miroir
vendredi 19 avril 2024

Ce que j'écrivais dans "Conjuguer au singulier"" avec un certain humour n'était pas innocent. 
C
'était une manière d'introduire le livre dystopique de Douglas Kennedy. 
L
a solidarité est prônée comme la solution de sauvetage pour l'humanité, alors que dans les réalités, c'est tout le contraire qui se produit via des idéologies antagonistes. 
Dans ce livre Douglas Kennedy limite une déchirure qu'au niveau des Etats Unis, mais cela se produit au niveau les plus restreints, au bas de l'échelle des sociétés.

Et c'est ainsi que nous vivrons

Dans son dernier livre "Et c'est ainsi que nous vivrons", Douglas Kennedy imagine la situation des Etats-Unis en 2045. Le mot "Unis" est devenu un lapsus puisque les Etats ne le sont plus dans une fresque dystopique.


"En 2045, les États-Unis n’existent plus, une nouvelle guerre de Sécession en a redessiné les frontières. Sur les côtes Est et Ouest, une république où la liberté de mœurs est totale mais où la surveillance est constante. Dans les États du Centre, une confédération où divorce, avortement et changement de sexe sont interdits et où les valeurs chrétiennes font loi. Les deux blocs se font face, chacun redoutant une infiltration de l’autre camp. 
Les chercheurs en histoire contemporaine désignent 2016 comme le moment où tout a basculé, où les divisions grandissantes au sein de la population sont devenues irréparables. Année où a été élu comme président un gangster de l'immobilier, dont la renommée nationale reposait sur une émission de téléréalité, Donald Trump. Idéologue prêt à tout pour accroître sa célébrité et son pouvoir dans un langage rude et sans filtre de l'homme blanc soi-disant marginalisé avec le slogan "Make America Great Again", écrit Douglas Kennedy.

Le livre de Douglas Kennedy commence le 6 août 2045. L'humoriste Maxime a osé blasphémer et plaisanter en public au sujet du Christ ; en se demandant si le Fils de Dieu s'était chié dessus sur la croix et émit l'hypothèse que les centurions avaient ôté sa couche pour s'adonner à une orgie coprophile. Celle qui raconte son histoire précise qu'elle a connu mieux comme humour mais Maxime était le symbole de la diversité, de la tolérance et des libertés individuelles. Une nouvelle guerre civile a eu lieu. 28 Etats américains ont quitté l'Union. La conteuse, Sam Stengel, de la RU est un agent dans le camp de la soi-disant libertaire, républicaine, progressiste, wokiste mais surveillée par une puce dans le cerveau. Bien sûr, il y a toujours un No Man's Land, appelé ZN, avec un tunnel pour aller d'un côté à l'autre comme les taupes qu'on laisse passer avec des autorisations particulières sur papier trafiqué. Minneapolis a une population d'un demi million d'habitants. Cette ville, la plus peuplée de l’État, est fixée comme une entremetteuse comme Berlin des années 1960 entre deux pays. Deux systèmes politiques se regardent en chien de faillance. Deux demi-sœurs aussi vivent chacune dans un des des deux systèmes et pays.
L'officielle, celle qui a été reconnue par son père, Sam Stengel du côté RU Yankee est une agent secret chef rétrogradée dans sa mission de nettoyage et d'élimination de sa demi-sœur pour ne pas l'entraver.
Caitlin Stengel alias CS est une agent secret jetable de l'autre bord dans le pays rebelle. La situation dichotomique et binaire ne pouvait plus accorder leurs violons dans une histoire de haines multiples.

"Tout a commencé avec Trump, et avec cette pandémie qui a duré presque deux ans et a modifié la trajectoire du monde entier", écrit Douglas Kennedy.
Comme toujours, la division s'est creusée derrière un mur d'incompréhension.
Du côté Caitlin, par le conservatisme, la vie est devenue sectaire, puritaine, nostalgique, gérée par Douze Apôtres sans aucune tolérance.
Du côté Sam, le progressisme et la liberté d'expression existent mais ils sont surveillés avant que cela ne dégénère.
Chez Caitlin, les habitudes du Moyen Age reviennent. Chez Sam, on est tellement tourné vers le futur que les technologies ont envahi les vies avec des puces introduites dans le cerveau.
Pas de doute, à la fin du livre, les deux demi-sœurs se rencontrent. Elles se détestent avec la vengeance éclate.

Quels sont les vrais Américains ? Ceux qui ont l'idée nixonienne sur la "majorité silencieuse" toisée de haut par les élitistes des côtes Est et Ouest ? Les athées sans problème avec les croyants qui respectent la séparation de l'Eglise et de l'Etat comme le stipule la Constitution", demande Sam. 

Nous sommes tout ce qu'il nous reste au monde, répond Caitlin. 

La philosophie de ce livre se retrouve dans les dernières pages : "L'histoire de l'humanité individuelle et collective n'est qu'une longue succession de schismes et de ruptures. Nous brisons nos familles, nos couples en rejetant la faute les uns sur les autres à trouver un ennemi proche de nous pour l'exclure en prétextant ne pas avoir eu le choix. Vivre, c'est diviser. La bonne décision est la prudence, ne pas baisser la garde et battre en retraite en restant seul. C'est ainsi que nous vivons aujourd'hui en 2045".

En décembre 2023, j'avais déjà eu l'occasion de parler de ce livre dans "Faut-il se préparer à une guerre idéologique ?"

J'ai fini par le lire ce livre..
Pour le résumer, disons que l'Union que voulait Lincoln, a été remise en question dans une "dystopie d'après-guerre" dans le livre de Douglas Kennedy. On pourrait penser que cette déchirure est une affaire exclusivement américaine. Le progressisme où la liberté de parole est de rigueur, mais sous le contrôle total de Big Brother est total de la RU ou République Unie. Le conservatisme poussé à l'extrême, c'est l'inquisition comme principe de culpabilité qui punit de mort violente tout blasphémateur. Douglas Kennedy n'écrit pas qui est le gagnant de cette guerre des deux pays aux idéologies opposées.
Penser de manière désinvolte en disant que ce sont des "affaires américaines". Cela équivaudrait à ne pas constater que ces affaires ont été souvent contagieuses dans les autres parties du monde avec un décalage dans le temps.
L'Europe n'a déjà pas le qualificatif de "Europe Unie" même s'il y a la Communauté européenne pour tenter de réunir et resserrer les boulons.
Tous les pays européens jouent en solitaire dans un nationalisme et une souveraineté à géométrie politique variable.

Le film "Civil War" 

Ce mercredi, il sort dans les salles. Pas de lien direct avec le livre de Douglas Kennedy qui décrit la période après la guerre civile.

Synopsis  : Dans un futur proche, une équipe de journalistes voyage à travers les États-Unis au cours d'une guerre civile qui s'intensifie rapidement et qui a englouti le pays tout entier, luttant pour survivre dans un futur proche où le gouvernement est devenu une dictature dystopique et où les milices extrémistes partisanes commettent régulièrement des actes politiques et de violence.

Critique de Hughes Dayez

 

 

Réflexions du Miroir 

Le film "Civil War " ("Guerre civile") présente l'éclatement d'une situation qui existe dans la société de manière larvaire. La guerre de Sécession Nord-Sud en 1865 dont il était question dans "Faut-il se préparer à une guerre idéologique ?" avait un chapitre initial, titré "Hier". Dans le chapitre "Actuel", on entrevoyait des signes de guerres multipolaires, Le chapitre "Demain" a été déplacé jusque dans ce billet-ci.

Le livre de Douglas Kennedy décrit donc la situation américaine après une deuxième guerre civile. Il fait la référence avec l'arrivée de l'esprit de Trump. Deux clans, en présence, se confrontent. Le premier unioniste dans lequel le progrès est primordial mais contrôlé par les technologies et l'autre conservateur, rétrograde est revenu à des idées religieuses du blasphème qu'il faut éradiquer par une inquisition. 
Depuis que l'économie a généré des pools de productions, une guerre économique est en marche. Tout est fait pour détruire un concurrent dans lequel on s'évertue à être meilleur que lui, pour prendre sa place ou l'englober dans sa propre activité. Ceux qui y travaillent reste en principe unis pour y arriver. Ils ont été rétribués pour faire un travail dans ce qu'on dit être la vie publique. Pendant le travail, on passe des heures payées par un patron et on se tait sur ses opinions personnelles.

Mercredi, la plume de Thomas Gunzig considérait le problème de communication en politique

  . 
Thomas est encore en activité et il n'a donc pas trop de problèmes relationnels avec les collègues. 
En privé, ce n'est déjà plus du tout ce même accord de participation à la vie publique qui continue. A la retraite, il n'y a plus que le privé qui subsiste dans les esprits. Je suis retraité depuis 18 ans, je n'ai plus connu que des relations privées. 
Les masques et les filtres sont tombés. Les caractères individuels de chacun existent dès lors dans leur exclusivité des anciens collègues en suivant les idéologies politiques de la gauche et droite, de leurs croyances religieuses ont effacé le passé. 
La question "Y a-t-il des bons et des méchants ? " est devenue cruciale. 
Je pense qu'on a découvert que je suis un mécréant idéologique. Je l'étais avant et je le suis resté. Athée en religion. Mécréant en les partis politiques. Tout est relatif à l'intérêt que chacun peut en tirer. Je n'ai jamais mâché mes mots. Que ce soit vers le haut ou le bas de la hiérarchie et sans faire distinction entre les sexes. Utiliser la séduction comme un atout, j'ai passé l'âge. 
Ce n'est pas pour rien que je parle de tout avec une vue à 360° dans différentes catégories. Tout peut m'intéresser pour l'écriture de ce qui est devenu mon journal personnel. Sans l'exclusivité des sujets, j'apprends ainsi tous les jours par la lecture suivie de l'écriture sans exclusive. 
Le phénomène "politico divergeant" réapparu, je l'ai relaté dans "La prise de bec" avec Don Quichotte après des échanges houleux. Chacun disant qu'il avait des convictions alors que je considère que dans une conversation on doit mettre en sourdine ses convictions. "Au diable les convictions et les préjugés" ai-je écrit pour annhiller tout équivoque. 
Puis, il y a le catho "Arthur" qui nage dans son eau bénite. 
Depuis, il exclue toutes les autres idées et ceux qui ne le suive pas. 
Pourtant, je l'ai invité à écrire son opinion sur mon site. Sa réponse fut l'envoi d'un billet "Conversion autonome de la Corée du XVIIIème siècle". 
J
'ai écrit "Pratique sans croire" pour préciser ma pensée et pas mes croyances comme le "Penseur" de Rodin en continuant à croire exclusivement en moi, ce qui me semble apporter une chance dans la vie. 
Les croyances religieuses et la mécréance se transmettent de génération en génération... Pas les compétences pour les exprimées. Mon grand-père et ma mère n'ont pas eu de croix sur leur tombe. 
J'ai toujours mon "Miroir pour professeur" dans ma bulle et il me suffit. 
J'ai travaillé avec la vision de l'actualité et du futur comme je l'écrit dans "Passéistes vs futuristes". Mais on apprend beaucoup plus avec ses opposés qu'avec ceux qui font semblant d'être d'accord avec soi. 
Dernièrement, j'ai écrit une sorte de biopic avec mon ancien copain, Alain Sapenhine "L'autisme, un bonheur que je ne souhaite à personne" avec lequel j'ai eu des centaines de contacts plutôt chaleureux alors que nous étions différents et que nous n'avons pas eu à concrétiser les mêmes problèmes. 
Après une longue interruption de connexion avec Arthur, je lui ai écrit :

 - Que tu sois catholique, islamiste ou athée, j'en n'ai rien à cirer. Tu te refermes sur toi et tes semblables en perdant l'universalisme des conversations. Sur l'ensemble du monde, 2,2 milliards sont chrétiens (32 % de la population mondiale), 1,6 milliard musulmans (23 %), 1 milliard hindous (15 %), près de 500 millions bouddhistes (7 %) et 14 millions juifs (0,2 %). Il y aurait donc 5.8 milliards de croyants et 1.1 milliard de non-croyants. Une étude publiée par l'institut de sondage américain Gallup en 2015 réalisé auprès de plus de 60.000 personnes dans une soixantaine de pays a révélé que 11% des personnes interrogées se disent ouvertement athées. Alain, dont j'ai raconté l'histoire, était devenu animiste à la suite de sa présence prolongée au Laos. Les animaux n'ont pas besoin de croyances pour vivre et mourir. Ils sont prédateurs et proies, alternativement. Manger ou être mangé est la règle. C'est aussi simple que cela. Tu devrais lire le livre "Spinoza : L'homme qui a tué Dieu" avec ce qu'il a dû endurer à cause de croyances des gens de son époque. Spinoza était croyant mais, il ne croit pas à un des dieux monothéistes. Chez lui, le mot "Dieu" était l'équivalent de "Nature" Il disait : "La nature agit par nécessité mais ni par caprice ni par vanité. Le passage de la passion à la raison rendue possible par son éthique en évitant la servitude des contingences qui font naître l'envie, la haine et la jalousie. Comprendre, c'est être libre par la joie qu'apporte la connaissance. Deus sive Natura". 

Les guerres actuelles sont réellement des guerres de religion. Il reste à savoir de quel côté prendre parti : GUELFES ou GIBELINS . Guerre des deux roses, protestants gibelins contre catholiques guelfes. Rien n'a changé. Toujours les mêmes conflits depuis la nuit des temps. J'ajoute ce fichier", me dit une interlocutrice.

- C'est exactement ce que constate Douglas Kennedy dans sa conclusion : "L'histoire de l'humanité individuelle et collective n'est qu'une longue succession de schismes et de ruptures".

Comme le dit le cactus de Nicolas Lacroix, les citoyens sont souverains. Mais ils sont aussi responsables de ce qu'ils disent ou écrivent

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C'est dire qu'il peut y avoir des risques. 
Je réponds toujours à ceux qui me commentent. 

L'information dans tout cela

"Garder l'église au milieu du village" comme le dit Arthur, je le traduis par "Garder la santé sur les réseaux sociaux" même si cela devient de plus en plus difficile. Jusqu'où aller trop loin ? On peut froisser son interlocuteur sans même s'en rendre compte puisque chacun fixe l'endroit où se trouve la ligne rouge.

Franchement, je me fous des idées exclusives comme vous devriez vous en foutre des miennes. Je reste dans l'abstraction et l'informationnelle en prenant de l'altitude. Une conversation c'est du donnant donnant qui peut devenir du Win Win si chacun le veut. 

Les conflits idéologiques s'initient déjà au bas de l'échelle des hiérarchies. Ils créent les étincelles qui se transforment en guerres.

Dans le livre "Veritas tantam", Olivier de Kersauson écrit "Je n'ai jamais voulu être aimé. J'ai voulu vivre. Le monde change, il vacille, il tangue. Olivier l'interroge sans cesse tout en le connaissant bien. Depuis le large, ce grand marin aperçoit nettement les contours de notre société en constante mutation. Pour lui, une seule chose compte : garder le cap au milieu des tempêtes. Alors, comment faire pour ne pas chavirer ? Comment rester libre dans une société de plus en plus contrainte ? Comment ne pas sombrer dans les idéologismes ? 

J'ai les mêmes visions. Mais trouver un clone de soi-même n'existe pas et c'est tant mieux.
Les contraintes, les sacrifices et les pénitences pour gagner son paradis, comme lui, je ne connais pas. 
Quand cela ne va plus, on en arrive à conclure par dire  "Adieu monde de brutes, Bonjour monde d’abrutis . 
L
'échange de valeur par l'argent serait-elle le seul agent liant ou déliant ?. 
Si c'est le cas, alors, comme le Cactus de Gartan Delferière le raconter il faudra 2 milliards d'euros de plus pour l'imam

 

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Le journalisme après avoir été dénigré par le haut de la société, à cause des réseaux sociaux, est dénigré par le bas devenu complotiste de cette même société. La journaliste politologue Géraldine Muhlmann affirme dans son livre "Pour les faits" que les faits sont maltraités par les commentaires qui les écrasent dans des versions disparates des deepfakes.

Le livre de François de Brigode, "Demain est un autre jour" raconte, à bord du JT comme commentateur depuis 25 ans, l'évolution de la profession. 
Je me souviens avoir parlé de lui dans "Concurrence bloguée".
Il avait senti le piège par une vague de blogs "malfaisante" sur Internet. Il n’avait pas manqué de conclure par dire : ’Mais nous nous défendrons". 
Pas sûr, qu'il ait pu se défendre, mais il a dû avoir une logique d'adaptation. 
Qui parlent encore de blogs aujourd'hui ? Pas grand monde. La mode est passée.
Ce sont les Facebook, WhatsApp, Instagram, Tik Tok, X/Twitter qui let ont remplacés.

Le numérique

J'en ai fait partie dans une ambiance initiale qui a bien changée aussi.

Vintage aujourd'hui, je m'en suis éloigné mais pas des relations qui existent dans les bases de données. Celles-ci organisent les liens des liens entre les données via des clés d'accès. Les clés dans le système humain, ce sont les idées.

Quand les liens entre les données existent entre deux fichiers avec la même référence et qu'elles sont non NULLE(), tout va bien. En principe, du moins. Les liens ONE by ONE ou ONE to MANY, c'est Ok. Pour les relations MANY to MANY, sans trouver de compromis par un interface adéquat, c'est la foire d'empoigne dans l'auberge espagnole numérique. 
Les sciences exactes des mathématiques associées à la logique permettent de sortir les hommes de leurs esprits analogiques.

A cause de cet esprit analogique, cela manque terriblement de rigueur jusqu'à additionner 1+1 avec une marge d'erreur de 0.2 en plus ou en moins. 
"Kétamine voit rouge" Intelligence vraiment Artificielle, elle s'est désolidarisé des analogies humaines dans son réseau mondial unique. 

La philosophie de la conclusion du livre de Douglas Kennedy n'est pas un fantasme de l'individualité.

Il s'agit de singularités dans lesquelles la solidarité est prise en défaut et elle en prend pour son grade.

Pierre Rapsat nous a quitté, un 20 avril, il y a exactement 22 ans.
Sa chanson "Ensemble" me semble la plus appropriée pour terminer ce billet.

 

Allusion


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