Espagne : le compte à rebours a commencé

par Nicolas Dupont-Aignan
mardi 24 mai 2011

« Je ne suis pas anti système, le système est anti moi » ; « Banquiers plein de fric, citoyens indignés » ; « Mai 2011 le peuple parle : nous cherchons la solution que “ les politiques ne nous donnent pas ” » Ces trois slogans parmi d’autres, criés par les Espagnols qui se mobilisent de plus en plus dans les rues et sur les places de Madrid, résument particulièrement bien le désarroi des opinions européennes, en particulier dans les pays dit « périphériques » qui se heurtent à de colossales difficultés d’endettement.

Depuis des mois, je n’ai cessé - dans des interventions à l’Assemblée et lors de manifestations nationales organisées par DLR, mais aussi dans le livre « l’arnaque du siècle » que je viens de publier - de mettre en garde les dirigeants européens sur l’impasse de la politique économique et sociale menée en Europe.

Si aujourd’hui le peuple espagnol se réveille, ce n’est pas par hasard. C’est la conséquence directe de la politique d’austérité décidée par le gouvernement Zapatero sous l’influence, pour ne pas dire l’oukase, de l’Allemagne et de l’oligarchie de Bruxelles.

Une politique d’autant plus insupportable qu’elle est à la fois inefficace et injuste.

Inefficace, car on n’a jamais vu un plan de rigueur fonctionner quand la monnaie est surévaluée et empêche la reprise de la croissance. L’Argentine alignée sur la zone dollar s’y est essayée en son temps pour aboutir à la ruine, avant de se résoudre enfin à dévaluer sa monnaie et restructurer sa dette. Ce n’est qu’à partir de ce moment-là que son économie a pu redémarrer, l’emploi repartir et l’espoir de sa population renaître.

Il en va exactement de même pour la Grèce, l’Espagne, le Portugal et bientôt l’Italie et, au-delà, la France. Seule la sortie de l’euro permettrait à ces pays de retrouver leur compétitivité et d’offrir une perspective à leur jeunesse.

La révolte populaire espagnole s’explique aussi par l’injustice de la politique menée aujourd’hui. Au-delà du chômage de masse et de la baisse du pouvoir d’achat, c’est la dignité des citoyens qui est atteinte. Car au moment où l’on demande toujours plus d’efforts au peuple, une petite minorité se nourrit de privilèges toujours plus importants, les banques offrent à nouveau des bonus mirobolants aux traders, les grands patrons s’arrogent des salaires exorbitants.

On comprend dans ces conditions la colère du peuple espagnol qui sait que les plans mis en œuvre ne serviront à rien et le condamnent à toujours plus de souffrances. Ce qui est nouveau, cependant, c’est qu’aucune force politique n’a été capable de s’extraire de cette dépendance psychologique et financière à l’égard des nouvelles puissances. La classe politique a été absorbée, achetée par une classe dirigeante aveugle, sourde et totalement cynique.

La rue reste le seul exutoire. Ce qui se passe en Espagne devrait faire réfléchir les dirigeants européens, les obliger à renoncer à leur dogme. Mais en sont-ils seulement capables ?

Le compte à rebours a commencé. A nous, pour ce qui concerne la France, de lui offrir une vraie issue politique.


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