Ętre comme les deux doigts de la main

par C’est Nabum
lundi 19 août 2024

C'est pas le pied.

Voilà bien une expression sur laquelle il convient de se pencher pour tirer les choses au clair. D'une part parce qu'elle ne précise pas quelle main on met ici au feu de l'actualité et d'autre part parce qu'elle manque cruellement de précision. On peut ainsi s'étonner qu'elle figure en bonne place dans les manuels scolaires.

Pour donner un coup de main à ceux qui aimeraient éclairer leur lanterne, je vais donc explorer les tenants et les aboutissants de cette formule qui a eu souvent la main lourde quand elle est employée à la légère. C'est donc du bout des doigts et de la langue que je vais vous prendre par la main pour vous mener par le bout du nez sur le chemin escarpé des circonlocutions interlopes.

En premier lieu, établir une distinction quelconque entre la dextre et la sénestre serait réitérer l'anathème sur les gauchers. Il n'y a lieu de pointer d'un doigt vengeur ces derniers. Laissons donc à chacun le choix de prendre la main qu'ils veulent pour chercher la meilleure association possible parmi leurs cinq doigts.

En écrivant ceci, dans le contexte d'une époque si sensible aux différences, je constate que j'exclus de mon raisonnement tous ceux qu'un accident de la vie ou les hasards de la naissance ont privé d’un ou plusieurs doigts. J'espère qu’ils ne me montreront pas d'un doigt vindicatif pour me vouer aux gémonies. Le traitement de cet épineux problème ne tient hélas pas compte des cas particuliers auxquels j'apporte toute ma sympathie.

Sans vouloir mettre les pouces, j'ai le sentiment qu'il convient d'éliminer d'entrée de jeu celui qui se distingue des quatre autres, avec cette envie folle de leur tourner le dos. Je n'imagine pas qu'un seul de ses confrères en pince pour lui, même s'il est probable que l'index se fait un devoir de conserver avec lui des relations de bon voisinage ce qui nous écarte de cette union forte, sincère et amicale célébrée par l'expression sur laquelle nous nous penchons.

Reste donc à déterminer deux des quatre doigts restants pour établir un duo qui s'accorde en tout point. On pourrait ainsi établir une complicité du fait de leurs missions respectives. Ainsi celui qui explore le nez pourrait se complaire avec celui qui fouille le canal auditif. L'index et l'auriculaire seraient ainsi des candidats idéals. Hélas, ils sont fort éloignés autant morphologiquement que géographiquement. Je doute de leur complicité réelle.

Leurs deux voisins prennent le relais pour postuler au couple digital idéal. Le majeur et l'annulaire font ainsi figure de duo idéal pour célébrer des relations étroites, fortes et indestructibles. Ceci aurait été vrai dans les siècles passés mais depuis, l’annulaire a la fâcheuse tendance à changer assez souvent d'alliance. Il n'est pas ce compagnon fiable en toute circonstance. Le majeur doit s'en méfier.

Cet argument vaut aussi pour la cohabitation de l'annulaire et de l'auriculaire. Si la rime semble les apparenter, ils ont un mal fou à s'accoler. Le petit doigt se montrant récalcitrant à se joindre spontanément à ses collègues. Je fais une nouvelle fois fausse route.

L'index et le majeur fièrement levés tandis que leurs compères se replient sous eux est bien le signe de ralliement de ceux qui en les écartant légèrement espèrent la victoire tandis qu'en les croisant ils repoussent le démon. Ils seraient ainsi les heureux élus si le signe amour avec les doigts n’était venu semer le trouble dans ma réflexion avec le pouce et l’auriculaire fièrement dressés.

Ne sachant plus sur quel pied danser et de manière franchement indélicate, je me vois contraint de renoncer à trouver réponse satisfaisante à une question pour laquelle il est inutile de faire des pieds et des mains. Je vous épargne cependant le doigt d'honneur pour ne pas sombrer davantage dans le ridicule. Je passe la main.


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