Du grenier au marais

par C’est Nabum
lundi 10 juillet 2023

Mettre mon grain de sel.

Né dans un grenier à sel dans un village ligérien, le hasard de l'existence me conduit, bien des années plus tard, à venir animer un festival de Chants de marins au cœur du marais salant, à Batz-sur-Mer. Le gars de Loire n'est certes pas le plus adapté pour remplir le rôle d'un monsieur Loyal en territoire maritime mais il faut bien tenir le las (la grande perche) et former des meulons. Tout ceci mérite bien des explications.

Tout a commencé de manière fort curieuse lors d'un séjour estival dans la Presqu'île. Comme les joies de la plage ne sont pas forcément ma tasse de thé, j'avais décidé de visiter le petit musée du sel à Saillé. Ce jour-là, quelques choristes flanqués d'un guitariste et d'une accordéoniste, offraient une sérénade aux visiteurs.

J'appris plus tard qu'ils constituaient l'avant garde d'une joyeuse bande, adepte du chant de marins tout en se démarquant de la tradition puisque, hérésie suprême, des femmes sont du nombre. Les Fous de Bassan du Pouliguen, puisque tel est le nom de ce groupe, venaient de croiser ma route. Tout en discutant au terme de ce petit concert impromptu, j'émis l'improbable proposition de leur envoyer un ou deux textes de mon cru pour qu'ils en fassent une chanson.

Une année plus tard, revenant sur les lieux du crime, j'assistais à un concert sur le port du Pouliguen de cette joyeuse troupe qui me fit l'honneur de chanter deux de mes compositions : Les Paludiers et le Mousse. Ce fut alors le point de départ d'une curieuse aventure qui conduisit par deux fois un Bonimenteur de Loire à partager la scène avec une chorale de chants de marins.

Depuis deux autres textes sont au programme du groupe tandis que le guitariste Jean-Jacques, me fit le plaisir d'enregistrer quelques textes de Loire. De fil en aiguille ou d'étier en œillet, un lien d'amitié s'établit qui coïncida avec la naissance d'une webradio : « Ondes bleues la radio », aventure dans laquelle je fus partie prenante dès sa naissance.

C'est ainsi que le gars du Loiret au pied fort peu marin, se trouva à enregistrer chaque semaine une heure de contes, fariboles et chansons évoquant la Loire pour une antenne dédiée à la mer. On ne peut que s'étonner qu'il se trouve des auditeurs pour écouter mes sornettes d'eau douce. Mais c'est ainsi, il ne faut plus chercher à comprendre alors qu'en terre ligérienne, la chose demeure toujours aussi peu évidente.

La petite radio a grandi, une maison de production est née, des événements sortent de l'esprit bouillonnant de son instigateur, dont ce Festival de Chants de marins qui a jeté l'ancre et son podium à Batz-sur-Mer pour de longues années on l'espère. Pour ne pas faire comme tout le monde, le Capitaine Vincent a tenu à ce qu'un duo de terriens fasse le lien avec les chanteurs de la mer.

L'un vient des Vosges, l'autre de la Loire septentrionale, ce sont pourtant ces marins d'eau douce qui font le lien entre les différents groupes. C'est manière sans doute de reconnaître que de la rivière à l'Océan, c'est la même histoire au fil des flots et de l'histoire. Nous tenons ainsi à rappeler aux vieux loups de mer qu'ils ne seraient rien sans les chie dans l'eau de l'intérieur.

Quant au sel, des paludiers aux faux-sauniers, ce fut une longue et difficile histoire que je ne cesse de narrer tant elle a marqué durablement les mémoires de l'intérieur. Nombre de récits sont liés à cette effroyable gabelle qui sévissait par chez nous tandis que les gabelous n'avaient de cesse de traquer les contrebandiers du sel.

Bien des existences basculèrent dans cette guerre impitoyable que le pouvoir mena contre ceux qui voulaient apporter un peu de réconfort à des gueux accablés par un impôt inique. Ce peut-il que rien n'ait changé depuis ?


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