Tout en Batz …

par C’est Nabum
jeudi 20 juillet 2023

 

La loterie enchantée.

 

Un Festival de chants de marins et de la mer se tenait à Batz-sur-Mer en ce début de juillet. Outre les têtes d'affiche de la spécialité deux personnages vinrent mettre leur grain de terre au cœur du marais salant. Curieuse idée que de demander à un Lorrain pur jus et un ligérien septentrional de venir constituer le fil bleu de l'animation.

Parce que ces deux-là animent chacun de leur côté une émission sur Ondes Bleues la Radio, l'instigateur à la fois de cette antenne, d'une maison de production et de ce Festival estival a renouvelé l'expérience qu'il avait osé lors de la première édition. Cette fois, notre homme avait tenu compte des imperfections initiales pour offrir une place plus cohérente à ceux qui devenaient en somme l'Interlude de la fête.

Si le rôle est ingrat et impose de rester sur le pont tout au long de ces deux journées, nos deux lascars se mirent en devoir de ne jamais se répéter tout du long de leur douzaine d'interventions, les plus nombreuses au cœur du marché des artisans et des auteurs, quelques autres autour de l'incontournable buvette, chœur sacré de telle manifestation.

Ce principe acquis, le duo constitué pour l'occasion, ne se soucia guère de préparer un programme, un guide à moins que ce ne fut un cadre bien trop rigide pour eux. Ils se laissèrent porter par l'air du temps, leur fantaisie et leurs répertoires respectifs sans omettre de réagir à des réactions dans le public.

À l'inverse des groupes qui se succédaient sur la grande scène, aucune chanson de Michel Tonnerre ou Hervé Guillemer ne vint s’immiscer dans un programme de chansons choisies parmi leurs compositions ou chansons traditionnelles. Curieusement, le public averti n'eut pas l'air de se plaindre de cette entorse à ce qui semble être devenu la règle en la matière.

Plus troublant encore, le chanteur et son Cuatro n'avertissait nullement le Bonimenteur de sa sélection qu'il établissait semble-t-il selon son bon plaisir. Le défi constitua alors pour son compère de rebondir à la seconde chanson par un conte qui évoque le même thème ou un contexte analogue. Un curieux exercice de cogitation en quelques minutes pour trouver et modifier un récit qui pourra faire suite cohérente.

Des spectateurs, plus attentifs que les autres, se prirent à ce jeu et attendaient avec impatience ce que ferait le palabreur pour répondre au chanteur. Une forme de joute verbale ou de tournoi d'improvisation qui enchanta tout à chacun. Bien sûr, ce n'était là qu'une question de réglage, d'opportunisme et de contrefaçon aimable, ce qui ne leurrait personne et c'est bien là l'essentiel.

Il conviendrait peut-être d'inverser les rôles une autre fois même si pour le chanteur, les paroles et la musique ne s'improvisent pas et n'admettent guère des variations et des trahisons. Toujours est-il que ce fut une passe d'arme des plus pacifiques et fort agréable qu'il conviendrait de renouveler si des organisateurs se satisfont de ne pas connaître le programme.

En ce monde de la standardisation, du formatage, de la distraction et de répétition à l'identique, pareille aventure risque fort de désarçonner les tenants de l'absence de risque et de surprise. Assurer un programme à l'identique de ce qu'on peut écouter sur YouTube est devenu le crédo des programmateurs de la certitude. La fantaisie et l'imprévisible n'étant pas leur tasse de thé.

Laissons-les à leur confort et leur valeur sûre, il se trouvera bien d'autres insensés pour accepter de jouer à ce petit jeu avec eux. C'est d'ailleurs ce qu'ils feront en s'adjoignant un troisième larron pour sortir des sentiers battus lors du prochain Festival de Loire. Ils auront nom « Souffleurs de Vent » sans nulle intention de déclencher la tempête.

À contre-mode.


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