Invasive et dangereuse : la renouée du Japon

par Fergus
jeudi 8 décembre 2022

Avec son élégant feuillage et ses grappes de fleurs blanches au parfum délicat, la renouée du Japon est belle et séduisante. Hélas ! la nature invasive de cette plante la rend particulièrement redoutable. Désormais omniprésente – non seulement sur le territoire français, mais un peu partout en Europe –, elle menace l’équilibre des parcs et jardins lorsque son expansion n’est pas strictement maîtrisée...

Photo L’est républicain

Les terrains pollués ne rebutent pas la renouée du Japon (Fallopia japonica). Contrairement à la plupart des végétaux, elle supporte en particulier très bien la présence de différents métaux lourds, de même que celle de l’aluminium, si utilisé naguère dans l’industrie. D’où sa parfaite adaptation aux sols des anciens sites peu ou pas dépollués. Une caractéristique qui rendrait la renouée du Japon sympathique aux yeux des amateurs de verdure et d’espaces fleuris si cette plante se bornait à coloniser des friches industrielles ou les abords des voies ferrées.

Hélas ! la renouée du Japon s’épanouit mieux encore dans les terrains sains, notamment dans les sols frais, les lieux humides ou à proximité des cours d’eau. Considérée par les experts scientifiques comme l’une des pires plantes envahissantes de la planète*, la renouée du Japon prolifère depuis des décennies sur le territoire européen où sa nature invasive la rend, au grand dam des botanistes, particulièrement dangereuse pour la pérennité de nombreuses autres espèces de plantes, et par voie de conséquence pour la biodiversité. Et cela d’autant plus qu’à l’action mécanique des rhizomes s’ajoute en sous-sol une production de « composés phénoliques toxiques** » potentiellement mortifères pour les plantes concurrentes.

C’est à un célèbre médecin et naturaliste bavarois, Philipp Franz von Siebold, que l’on doit (au 19e siècle) l’introduction en Europe de la renouée du Japon pour ses qualités fourragères parmi de très nombreux autres végétaux collectés lors de ses séjours au pays du Soleil levant. Contrairement à ce qui a été affirmé naguère, il n’y a pas eu de dispersion de graines de renouée du Japon mais une conquête de la presque totalité du continent européen par clonage naturel.

La renouée du Japon est une plante vivace herbacée qui se développe en peuplements denses. Les parties aériennes – jusqu’à 3 m de hauteur*** – disparaissent presque totalement en hiver. Seuls subsistent alors de manière visible des bourgeons au ras du sol. Ce n’est pas de là que vient le danger pour les espaces verts, mais de la partie souterraine de la plante. Les rhizomes d’un pied de renouée du Japon peuvent en effet atteindre plus de 2 m de profondeur et s’étendre sur une distance de 7 à 10 m pour, à l’instar du bambou traçant, donner naissance après enracinement à de nouveaux pieds colonisateurs.

Photo ENS Lyon

Lutter contre la présence de la renouée du Japon n’est pas facile. On peut certes utiliser des produits désherbants ou, comme certains jardiniers, du gros sel, voire une solution à base de vinaigre blanc. C’est efficace, mais cela détruit tout aussi sûrement les plantes voisines. Et surtout, ces moyens n’atteignent pas la totalité du réseau racinaire souterrain. Seul l’arrachage des rhizomes en profondeur est radical pour éradiquer cette plante invasive. C’est évidemment inenvisageable dans un petit jardin.

Dans les régions exposées à la présence de la renouée du Japon, le mieux est encore d’être attentif à l’émergence de cette plante aux tiges creuses rougeâtres afin de pouvoir l’arracher le plus tôt possible en totalité – rhizomes compris – avant qu’elle n’ait entrepris de s’étendre. Autre solution pour les espaces à protéger de cette plante invasive : faire pâturer des chèvres ou des brebis : ces animaux sont en effet friands de la renouée du Japon. Mais rares sont les particuliers qui disposent de très grands jardins. Reste la vigilance.

La renouée du Japon est considérée comme l’une des 100 pires espèces invasives de la planète par l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature).

** Source : département de biologie de l’ENS de Lyon.

** Au printemps, il arrive que les tiges puissent croître de plus de 4 cm en une seule journée !


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