Covid-19 : 150 000 décès en France et l’omicron BA.5 en pleine hausse

par Sylvain Rakotoarison
samedi 9 juillet 2022

« La situation sanitaire actuelle, si elle est marquée par une reprise épidémique importante à l’échelle européenne sous l’effet de la diffusion du sous-variant BA.5 d’omicron, permet d’exclure le recours aux dispositions exclusivement permises par le cadre de l’état d’urgence sanitaire, de même que la mobilisation des mesures les plus contraignantes dans la vie quotidienne de nos concitoyens. » (Projet de loi présenté au conseil des ministres du 4 juillet 2022).

Un triste seuil a été franchi en France pour l’épidémie de covid-19 : il y a eu plus de 150 000 personnes qui sont décédées à cause du covid-19 depuis le début de l’épidémie, il y a deux ans et demi. Ce vendredi 8 juillet 2022, effectivement, selon les statistiques officielles, 150 017 décès dus au covid-19 ont été enregistrés, 74 de plus que la veille. C’est énorme : cela correspond à une mortalité équivalente à une quarantaine d’années de mortalité routière actuelle. Dans le monde, le covid-19 a déjà entraîné près de 6,4 millions de décès répertoriés, il est probable que ce soit bien plus.

Et ce n’est pas terminé, hélas. En France, plus de 400 personnes meurent encore du covid-19 chaque semaine. Ce nombre est d’ailleurs en train de croître, j’y reviens plus loin. Depuis le début de la campagne présidentielle, on fait comme s’il n’y avait plus d’épidémie. Les élections, mais aussi la guerre en Ukraine, sont des sujets qui ont monopolisé tout le printemps 2022, certes avec raison, car ces sujets sont essentiels. Mais cela ne doit pas faire oublier qu’il faut garder la vigilance. Le covid-19 n’est pas une maladie anodine et peut entraîner des complications traumatisantes, une hospitalisation, etc.



Le seuil des 100 000 décès avait été atteint le 15 avril 2021 après quinze mois d’épidémie. Quinze mois plus tard, le seuil des 150 000. Cela fait beaucoup mais c’est deux fois plus faible que précédemment, alors que le virus n’avait pas baissé en intensité avant le variant omicron (en janvier 2022). La seule différence, c’est qu’entre-temps, la population française s’est massivement vaccinée. Du reste, ces dernières semaines, il y a une nette recrudescence des rappels du vaccin contre le covid-19.

L’épidémie n’est pas finie et depuis la fin du mois de mai 2022, elle a repris, et s’est accélérée ces deux dernières semaines. Il s’agit d’une vague du sous-variant BA.5. Les médias parlent d’une "septième vague" mais dans mon décompte, ce serait plutôt la "neuvième vague", la troisième depuis le nouvel an. Comme d’habitude, elle a commencé très progressivement mais à partir de la deuxième quinzaine de juin 2022, le nombre de nouveaux cas s’est envolé, comme on peut le voir dans les courbes réalisées par Guillaume Rozier sur son site Covidtracker (qui reprend les données de Santé Publique France).



Encore plus contaminante qu’avec les précédents sous-variants d’omicron, la vague BA.5 a déjà dépassé la vague de mars-avril 2022 et se rapproche de celle de janvier-février 2022. La différence, c’est le comportement social et les contraintes sanitaires : le port du masque n’est pas obligatoire et il ne s’agirait plus de le rendre de nouveau obligatoire, il n’est que recommandé dans les lieux sociaux confinés comme les transports en commun. Le problème, c’est que peu de personnes le portent actuellement, même si cette proportion a augmenté depuis deux semaines.

Comme surtout l’Allemagne et l’Italie, la France subit de plein fouet cette vague avec environ 100 000 à 200 000 nouveaux cas par jour. Il faut insister pour dire que les personnes fragiles, immunodéprimées ou âgées, ont de réels risques d’avoir des complications s’ils sont atteints du coronavirus et la seule parade reste la vaccination à jour de rappels (tous les six mois). Le deuxième rappel est réservé aux personnes de 60 ans et plus.



La situation à l’hôpital reste encore sous contrôle même si les urgences sont proches de la saturation. Alors que le nombre de personnes hospitalisées pour covid-19 était descendu à 11 000, il est aujourd’hui (8 juillet) à 17 944 et est en forte augmentation. Plus de 1 300 personnes sont admises chaque jour à l’hôpital pour covid-19. On le voit ci-dessous, le nombre d’entrée à l’hôpital a repris le dessus sur le nombre de sorties.



En revanche, même si elle suit de loin la courbe des hospitalisations, le nombre de personnes en soins critiques reste encore très largement en dessous du seuil de saturation. Il était descendu à 800 et est remonté au-dessus de 1 000 (1 027 au 8 juillet 2022). Malgré une légère inflexion, la situation dans les services de réanimation bénéficie d’une moins forte virulence du variant omicron et d’une population massivement protégée.




Le dernier indicateur est le nombre de décès quotidiens. Après avoir été stabilisé à environ 30 par jour, il est remonté à la hausse il y a quelques jours, autour de 60 à 70 par jour, en raison de la forte circulation du virus. On ne réussira pas à me convaincre que ce niveau de décès est satisfaisant, admissible, supportable. Certes, il est nettement plus faible qu’en 2020 et 2021 grâce à la vaccination massive, qui montre sa grande réussite, mais le niveau demeure encore beaucoup trop élevé. Le relâchement généralisé en mai 2022, qui était nécessaire tant socialement que pour le moral après deux ans de contrainte, était justifié car la circulation du virus était faible. Avec sa remontée très forte, les gestes barrières doivent absolument être repris par toute la population.



La vague n’en est pas encore à son maximum, tandis que les vacances scolaires commencent. L’avantage est que les écoles sont désormais fermées depuis le 7 juillet 2022, sources récurrentes de contaminations. L’inconvénient, c’est que les touristes sont attendus en France bien plus nombreux que la dernière année comparable, à savoir 2019.

La seule source qui vise à rassurer, c’est l’observation du taux de reproduction effectif. Après être monté très haut, autour de 1,50, il semble se stabiliser depuis quelques jours en dessous d’un plafond et sa redescente semble pour bientôt. Cette valeur détermine la dérivée seconde du nombre de cas, c’est-à-dire la pente de la pente. Il faut que ce taux soit inférieur à 1 pour connaître une baisse des contaminations quotidiennes. On en est encore loin, mais on peut imaginer que ce sera le cas dans deux ou trois semaines (vers fin juillet 2022), ce qui signifiera alors qu’on sera à peine à la fin de la vague, dans le meilleur des cas, à la rentrée scolaire.



La rentrée de septembre 2022 sera alors une période cruciale, de retour de vacances, réouverture des écoles et, je l’espère, de décrue épidémique. Il s’agira alors de bien vérifier son niveau de protection vaccinale pour résister à la vague d’automne qui existera nécessairement comme ce fut le cas en 2020 et 2021.

On pourrait croire à un remake du "Jour sans fin", qui serait alors "l’épidémie sans fin". Mais chaque nouvelle année, la population est progressivement plus résistante au virus que l’année précédente. Au moins la moitié de la population a déjà connu le virus d’une manière ou d’une autre. Les quatre cinquièmes de la population sont déjà vaccinés. À chaque nouvelle vague, de nouvelles immunisations se font dans la population, même si tout n’est pas compris comme le fait que certaines personnes puissent avoir été atteintes trois fois par le covid-19 en deux ans et demi (et d’autres, étrangement, passent toujours entre les gouttes malgré un environnement proche contaminé).

Premier texte de la législature, le projet de loi relatif au maintien provisoire d’un dispositif de veille et de sécurité sanitaire en matière de lutte contre le covid-19, présenté au conseil des ministres du 4 juillet 2022, ne prévoie de remettre aucune contrainte sanitaire malgré cette flambée épidémique : « S’il n’apparaît donc pas nécessaire de proroger le cadre de l’état d’urgence sanitaire ni le régime dit de sortie de crise sanitaire, le maintien d’un dispositif de veille et de sécurité sanitaire s’impose pour les prochains mois et jusqu’à la fin de la prochaine période hivernale afin de suivre l’évolution de l’épidémie et d’être en mesure d’émettre des recommandations ainsi que de prendre les autres mesures nécessaires et proportionnées qu’elle pourrait exiger. ». Cette veille jusqu’au 31 mars 2023 apparaît selon le comité scientifique comme « une normalisation annoncée mais prudente ».

La seule contrainte prolongée jusqu’au 31 mars 2023 sera (si le texte est adopté) « la possibilité de demander certains justificatifs (preuve de vaccination ou test négatif au covid) aux personnes de plus de 12 ans souhaitant se déplacer à destination ou en provenance du territoire hexagonal, de la Corse ou de l’une des collectivités d’outre-mer, ainsi qu’aux personnes intervenant dans les services de transport concernés ». Cette mesure, qui est une mesure décidée à l’échelle européenne, est toutefois sans efficacité pour faire barrage au virus : en effet, actuellement, le virus circule beaucoup plus à l’intérieur de nos frontière qu’à l’extérieur, et faire barrage aux entrées du territoire paraît bien dérisoire si ce territoire est beaucoup plus atteint par l’épidémie qu’en dehors.

Et il faudra continuer à faire inlassablement la promotion de la vaccination contre le covid-19, seule réelle parade actuelle contre cette saloperie qui tue encore beaucoup trop de personnes.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (08 juillet 2022)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Covid-19 : 150 000 décès en France et l’omicron BA.5 en pleine hausse.
Attention, le covid-19 est de retour !
"The Covid Resilience Ranking : The Best and Worst Places to Be as Covid Travel Curbs Fall Away", 30 mars 2022, Bloomberg.
Paul Krugman, "France’s Economy Is Having a Good Pandemic", 14 janvier 2022 dans "The New York Times".
Gestion de la crise du covid : la France au tableau d’honneur !
Covid : fin des restrictions sanitaires et extrême vigilance.
Inquiétudes covidiennes : la pandémie est-elle vraiment terminée ?
Luc Montagnier.
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Martin Hirsch.
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