Covid-19 : une bonne nouvelle et une mauvaise nouvelle

par Sylvain Rakotoarison
mercredi 20 juillet 2022

« On doit vivre avec ces résurgences du virus, d’autres vagues vont probablement revenir. » (Dr. François Braun, le 20 juillet 2022).

Il y a une bonne nouvelle et une mauvaise nouvelle sur le front de la pandémie de covid-19, trente mois exactement après son début médiatique (l’épidémie a probablement dû commencer bien avant, en décembre 2019 ou encore avant).

La bonne nouvelle, c’est que nous avons atteint depuis quelques jours le pic de l’actuelle vague qui a commencé à la fin du mois de mai 2022, celle du sous-variant BA.5 du variant omicron. En effet, le taux d’admission aux urgences pour covid-19 est en train de baisser, avec 2,8% le 19 juillet 2022. Au pire moment de la crise, le 28 mars 2020, ce taux était de 21,0% (soit 25 4421 admissions aux urgences). C’est rassurant pour l’été, surtout avec cette canicule qui heureusement s’achève, où les services des urgences sont régulièrement saturés hors covid-19 (vacances des soignants, accidents des estivants, etc.). La baisse s’observe aussi pour les actes de SOS Médecin pour covid-19, comme le montrent les courbes réalisées par Guillaume Rozier pour son excellent site CovidTracker.



Le nouveau Ministre de la Santé et de la Prévention François Braun devrait d’ailleurs s’en réjouir, car il était lui-même, encore juste avant sa nomination au gouvernement le 4 juillet 2022, le chef du service des urgences de l’hôpital de Mercy, l’antenne de Metz du CHR de Metz-Thionville (depuis 2010). La Lorraine était une région durement touchée par la première vague. Urgentiste dès 1984 au CHU de Nancy, le docteur François Braun a fait partie de ces médecins urgentistes qui ont contribué à faire des urgences une spécialité médicale à part entière.

L’évolution de la vague actuelle a donc de quoi rassurer même si elle était prévisible, puisque dès le milieu du mois de juin 2022, certains spécialistes évoquaient la seconde quinzaine de juillet 2022 pour envisager la décrue de cette vague.

Plus important d’un point de vue épidémiologique, le nombre de nouveaux cas chaque jour est également en décrue depuis quelques jours. En moyenne sur les sept derniers jours, on est repassé en dessous du seuil de 100 000 nouveaux cas le 16 juillet 2022 (95 413). La décrue semble être aussi rapide que la montée en juin, ce qui correspond à une cinétique ordinaire pour une épidémie, même si on n’est jamais à l’abri de quelques surprises avec ce virus qui n’a jamais cessé de surprendre les spécialistes depuis deux ans et demie.



Rassurant aussi le taux de positivité des tests qui redescend en dessous de la barre de 30% (sur 303 155 tests réalisés chaque jour, 95 413 ont été positifs). Le plus rassurant est l’évolution du taux de reproduction effectif, selon différents calculs. La méthode de calcul de Guillaume Rozier prend en compte la différence entre les suspicions de covid-19 aux urgences à sept jours d’intervalle et la moyenne avec les tests PCR positifs, cela a donné 1,06 au 19 juillet 2022 (on est monté jusqu’à 1,60 pour cette vague), ce qui montre une chute vertigineuse, avec une pente similaire à la montée préalable (pour que l’épidémie régresse, il faut un taux de reproduction inférieur à 1, mais celui, par son calcul, est toujours donné a posteriori ; seule, son évolution est prédictive). Quant à Santé Publique France, son taux de reproduction effectif est à 0,83 au 16 juillet 2022.



La mauvaise nouvelle, c’est que cette vague a fait des victimes et va continuer à en faire. Beaucoup moins que dans les précédentes vagues d’avant 2022, grâce à la protection du vaccin, mais elle en a fait de façon non négligeable malgré tout. Certes, le nombre des admissions à l’hôpital et celui des admissions en réanimation ont subi une forte hausse, mais dans des conditions acceptables pour le système de santé. Jamais les services de réanimation n’ont été en risque de saturation à cause du covid-19 pendant cette dernière vague. En revanche, malgré ces soins, il y a eu une nette augmentation, également, du nombre de décès quotidiens.

Effectivement, cette dernière semaine, on compte hélas une moyenne de 93 décès quotidiens, ce qui fait plus que le nombre de victimes de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice, et cela tous les jours ! Ce n’est plus un crash quotidien d’un Airbus, mais cela reste encore énorme. Ce nombre de décès est encore en pleine hausse, +33% par rapport à il y a sept jours, ce qui est normal compte tenu de la cinétique (la courbe des décès est en "retard" de plusieurs semaines par rapport à la courbe des nouveaux cas).



Il faut donc insister sur cette courbe : même si quasiment toutes les contraintes sanitaires ont été levées (port du masque, passe vaccinal, etc.) et qu’on en parle beaucoup moins dans les médias, cette maladie est toujours présente, durablement présente, et n’est pas anodine, elle tue encore considérablement.



Du reste, François Braun l’a rappelé, le fait que la courbe des nouveaux cas s’effondre ne signifie pas que la vague est terminée. Cela signifie au contraire qu’on n’en est qu’à sa moitié, et qu’il y aura autant de malades et de victimes, de décès, dans l’autre moitié, dans la période où le nombre de nouveaux cas s’effondre, espérant qu’il s’effondre sans remonter par la suite. Après tout, les 100 000 nouveaux cas quotidiens restent un nombre très élevé et le virus continue encore à beaucoup circuler même s’il tend à circuler moins fortement.

Ce constat impose donc que l’extrême vigilance reste de mise, que certains heureusement continuent à adopter (masque et gel dans les endroits très fréquentés et confinés comme les hypermarchés, les transports en commun, les salles culturelles, etc.), mais aussi, car il faut insister aussi sur ce point-là, continuer, pour les personnes dits à risques (à savoir immunodéprimées ou âgées de 60 ans et plus), à être à jour de rappel du vaccin (en principe, une dose tous les six mois).

Car c’est aussi l’une des leçons de ces dernières vagues par rapport à celles d’avant l’été 2021 : ces vagues sont beaucoup moins mortelles, heureusement, pour deux raisons, la première est la baisse de la virulence d’omicron (qui s’est accompagnée d’une forte augmentation de sa contagiosité), et la seconde, importante, est l’effet de la vaccination.

Même si le vaccin réduit très partiellement le fait d’attraper la maladie (au contraire des vaccins "classiques" d’avant-covid-19), l’intérêt du vaccin réside avant tout dans le fait d’éviter de développer la forme sévère du covid-19, celle qui peut conduire aux soins intensifs voire au cimetière. Le covid-19 deviendra une maladie dont on ne se souciera plus, du moins pour la santé publique, que lorsque toutes les personnes à risques auront été vaccinées et à jour de rappel. Ce qui, malheureusement, n’est pas encore le cas. Les deux premières doses ont été reçues de manière quasi-générale (93,0% des personnes âgées de 12 ans et plus), mais c’est seulement les deux tiers pour la dose de rappel, c’est-à-dire la troisième dose (64,4% des personnes âgées de 12 ans et plus).

Il y a eu un début de prise de conscience pour faire la deuxième dose de rappel (c’est-à-dire la quatrième dose) au milieu du mois de juin 2022 avec le début de la vague en cours (chez les personnes à risques car ce deuxième rappel leur est réservé), mais cela s’est estompé avec le début des départs en vacances.



Invité de la matinale de ce mercredi 20 juillet 2022 sur LCI, le Ministre de la Santé et de la Prévention François Braun a donc souhaité délivrer un message de prudence. Il est sûr que cette vague ne sera pas la dernière vague, chaque fois qu’on a imaginé cela, on s’est trompé. Il faudra donc toujours faire attention, mais tout en continuant à vivre malgré tout, à voir sa famille, ses grands-parents, ses amis.

Par son caractère mondial, cette saloperie ne cessera d’engendrer encore et encore des variants ou sous-variants toujours plus contaminants. Heureusement, on a aujourd’hui une parade, elle est quasi-miraculeuse si l’on considère le temps très court qu’il a fallu pour la confectionner. Cette parade, c’est le vaccin. Qui nous protège pour la plupart. Il n’est donc pas interdit de se mettre à jour de protection. C’est la collectivité qui en bénéficiera autant que soi-même.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (20 juillet 2022)
http://www.rakotoarison.eu


(Toutes les courbes proviennent de Guillaume Rozier et de son excellent site CovidTracker).


Pour aller plus loin :
Covid-19 : une bonne nouvelle et une mauvaise nouvellse.
François Braun.
Covid-19 : 150 000 décès en France et l’omicron BA.5 en pleine hausse.
Attention, le covid-19 est de retour !
"The Covid Resilience Ranking : The Best and Worst Places to Be as Covid Travel Curbs Fall Away", 30 mars 2022, Bloomberg.
Paul Krugman, "France’s Economy Is Having a Good Pandemic", 14 janvier 2022 dans "The New York Times".
Gestion de la crise du covid : la France au tableau d’honneur !
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