La médecine naturelle, un retour durable dans notre quotidien ?

par Mélina Valette et Clarisse Tessont
lundi 1er août 2022

Photo de Clarisse Tessont, illustrant la Zoothérapie

 

La société nous donne la liberté d'assouvir chacune de nos envies, même les plus futiles. Mais aujourd’hui on observe une réelle prise de conscience qui appuie le fait qu’il est tout à fait possible, voire même nécessaire de consommer autrement (consommation d'énergies, agro-alimentaires, sociales…). On réalise d’ailleurs que cette perception compte aussi pour la médecine. De nos jours, nous faisons principalement appel à la médecine de référence, la médecine conventionnelle, qui utilise des médicaments et traitements. La médecine traditionnelle passant par les thérapies naturelles et spirituelles est une idée vers laquelle se tournent de plus en plus les Européens. Une partie des consommateurs s'intéresse aux conditions environnementales et sociales de production de ce qu'ils achètent. Des pratiques anciennes telles que l’achat à proximité, le troc ou le stop sont revues et ajoutées à nos pratiques modernes. Selon des études faites en 2020 par la CSA (consumer science & analytics), au moins 44% des Français ont recours à la médecine naturelle et cela, pour des raisons de composition, d’efficacité, de santé, etc...1 On se demande donc si au 21ème siècle, se soigner autrement par la médecine traditionnelle serait une alternative crédible ?

 

Mais qu’est-ce que c’est la médecine naturelle ?

Même si aujourd’hui celle-ci fait de plus en plus sa place dans nos mœurs, la médecine naturelle à finalement toujours été là. En effet, elle est la base de la médecine que nous connaissons et constitue la coutume dans d’autres cultures. Différents pays d'Afrique, d’Asie ou d'Amérique Latine font de nos jours, appel à cette médecine pour répondre à certains de leurs besoins. En Afrique, jusqu'à 80 % de la population a recours à la médecine traditionnelle pour des maux primaires et en Chine on retrouve des préparations traditionnelles à base de plantes qui représentent entre 30 et 50 % de la consommation totale de médicaments.2 Nous allons donc plutôt utiliser le terme de "médecine traditionnelle”. Selon la définition officielle de l’OMS : “la médecine traditionnelle se rapporte aux pratiques, méthodes, savoirs et croyances en matière de santé qui impliquent l’usage à des fins médicales de plantes, de parties d’animaux et de minéraux, de thérapies spirituelles, de techniques et d’exercices manuels (séparément ou en association) pour soigner, diagnostiquer et prévenir les maladies ou préserver la santé”.3

La médecine traditionnelle englobe donc de nombreuses pratiques. Pour les plus connues on a l'ostéopathie qui repose sur des manipulations manuelles du système musculo squelettique. Mais il existe également la phytothérapie qui consiste en l’usage des plantes médicinales. Se servir des pierres et cristaux (lithothérapie) ou des animaux (zoothérapie) sont aussi des moyens thérapeutiques. Par l'intermédiaire d’un animal formé il est possible de débloquer le langage et la motricité chez certaines personnes. Ou alors, sous forme de cataplasme, l'ortie est un anti-inflammatoire en phytothérapie. Il existe évidemment une multitude d’autres domaines en médecine traditionnelle. 

Mais même si la médecine traditionnelle fait ses preuves, elle reste une médecine non conventionnelle qui n’est pas reconnue officiellement au niveau médical francais. Elle fait alors face à un scepticisme dû à ses résultats variables et non prouvés scientifiquement. En effet, la phytothérapie, par exemple, s’appuie sur des extraits bruts issus de la totalité de la plante ou de celle d’un de ses organes. De plus, dans une espèce de plante, un sujet peut être plus efficace qu’un autre, les méthodes de croissance, un environnement ou une région différente peuvent apporter des effets différents ou les limiter. Cela justifie alors la formulation des médicaments que nous connaissons, qui s’appuient sur le principe actif de la plante qui va véritablement agir sur l'organisme et qui est donc bien plus fiable et maîtrisé : “ c’est l’origine végétale du principe actif qui détermine le caractère naturel des soins basés sur les plantes ”,4 explique Loïc Plisson, diplômé d'état en kinésithérapie. La médecine conventionnelle est alors la médecine de référence car son efficacité à été démontrée et ses pratiques ont été scientifiquement prouvées et approuvées : “la force des médicaments est de s’appuyer sur des protocoles cliniques et précliniques, ainsi que des résultats reproductibles censés garantir leur innocuité…”,5 ajoute Loïc Plisson. Le médicament doit être efficace à tous les coups lorsque le maux est correctement ciblé et il ne doit pas être dangereux pour celui qui le consomme.

Photo de Mélina Valette, bracelet lihothérapie

 

La médecine est-elle facilement accessible ?

En France, toute personne à accès à la médecine, mais il n'est pas possible d’avoir des médicaments sans passer par un professionnel. La médecine conventionnelle doit être pratiquée et appliquée par des professionnels tels que des médecins ou pharmaciens qui sont les garants de la santé publique.

En médecine traditionnelle, les soins par des méthodes naturelles sont à portée de tous. Certaines applications, souvent de manipulation du corps, sont prodiguées par des spécialistes comme des acupuncteurs ou kinesitherapeutes. Mais même si les autres domaines requièrent de la prise d’information, ceux-ci sont abordables par n’importe qui. Il faut être bien informé sur les dosages et recommandations pour en faire bon usage. En France, près de 5% des intoxications sont dues à des ingestions de plantes, il est alors très important de se fournir d’informations fiables. Il suffit de se renseigner auprès de professionnels comme des naturopathes, lithotherapeutes, zoothérapeutes ou pharmaciens, ou bien sur des sites, des livres ou chez des boutique spécialisées.

Les éléments nécessaires pour les soins se trouvent facilement en magasin ou sur des sites, et pour certains, ils peuvent être récoltés à même notre jardin ou nos campagnes. Le consommateur n’a donc pas besoin de justifier son besoin de soin et il lui est accordé sans ordonnance. A ce moment-là, le consommateur est responsable de l’action qu’il apporte à sa santé. L’un des objectifs du développement de la médecine traditionnelle est que le consommateur puisse prévenir et soigner ses maux par lui-même et donc qu’il soit autonome à propos de sa santé.

 

La médecine traditionnelle est-elle une alternative durable ?

« C'est à la suite d 'un énième voyage d'études au Tibet que je me suis aperçue que les plantes sauvages médicinales disparaissaient à vue d'œil. Qu' il y en avait de moins en moins d'année en année. Une problématique mondiale puisque certaines plantes sauvages sont menacées à court terme d'extinction » a constaté le Docteur Aline Mercan6. En phytothérapie et aromathérapie, les plantes médicinales sont principalement composées de plantes sauvages. Leur culture étant très onéreuse, le choix pour les commercialiser se porte sur leur cueillette dans la nature. Évidemment, avec le développement de cette médecine, la demande est toujours plus grande et la flore en pâtis. Pour extraire quelques millilitres d'huile essentielle, il faut une grande quantité de plantes. Leur cueillette intensive diminue les chances de renouvellement de la flore et augmente les risques de disparition des espèces. On retrouve également cet effet du côté des rhinocéros menacés par la médecine traditionnelle asiatique. L’ivoire est dite thérapeutique alors qu’il n’y aurait réellement aucun effet, mais la coutume perpétue ces croyances.7 

Or, on retrouve le concept de sustainable health (santé durable) dans les objectifs de développement durable par l’ONU, qui consiste en l'amélioration de la santé et du bien être en protégeant l’environnement et ses ressources. Celui-ci à été posé pour cause de l’impact du secteur de l’industrie pharmaceutique sur la planète mais il serait aussi intéressant qu’il soit appliqué pour la protection des ressources utiles à la médecine traditionnelle. Car la médecine naturelle serait un point majeur pour diminuer la pollution liée à l’industrie pharmaceutique.

Photo de Clarisse Tessont, illustrant la Phytothérapie

 

Pour finir, au 21eme siècle, la médecine traditionnelle constitue-t-elle une alternative crédible ?

Pour des raisons de développement durable et d'évolution des mœurs, on sait qu’aujourd’hui il est essentiel de trouver des solutions sûres. La médecine conventionnelle est nécessaire pour les consommateurs, elle apporte des résultats fiables et validés scientifiquement par des études. Mais pour des raisons de composition, d’efficacité, de santé et d'éthique, les consommateurs se tournent vers les soins au naturel. La médecine traditionnelle fait donc son retour et apporte de l'autonomie. Elle permet donc d'éviter des visites chez le médecin qui sont parfois peu nécessaires au consommateur mais aussi la prise de médicaments menants parfois à des effets secondaires non désirés. La médecine traditionnelle est plutôt dédiée aux maux primaires ou à la prévention, si le consommateur est correctement renseigné. Mais elle n'est pas capable de soigner avec certitude. Celle-ci est donc assez limitée et nous parlerons plutôt d’option et non d’alternative à la médecine conventionnelle. 

 

Médecine traditionnelle : qu'est-ce que c'est ? ; Futura Santé [En ligne] ; disponible sur : https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-medecine-traditionnelle-4216/

Médecine traditionnelle : qu'est-ce que c'est ? ; Futura Santé [En ligne] ; disponible sur : https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-medecine-traditionnelle-4216/

Définition officielle de l’OMS

PLISSON Loïc, Se soigner naturellement par les plantes, Se soigner autrement [En ligne], disponible sur : https://sesoignerautrement.net/se-soigner-naturellement-plantes/

PLISSON Loïc ; Se soigner naturellement par les plantes ; Se soigner autrement [En ligne] ; disponible sur : https://sesoignerautrement.net/se-soigner-naturellement-plantes/

DE LA MORANDIÈRE Elisabeth ; Plantes médicinales, des espèces en danger ; Top santé [En ligne], 3 Février 2022

KINDO Yann ; Les rhinocéros menacés par la médecine traditionnelle asiatique ; Mediapart [En ligne] ; 9 juin 2013 ; disponible sur : https://blogs.mediapart.fr/yann-kindo/blog/090613/les-rhinoceros-menaces-par-la-medecine-traditionnelle-asiatique

 

Bibliographie
 

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