Mixité : remise en cause d’un idéal ?

par Moustic33.
mercredi 15 juin 2005

Cela fait deux mois que les trains et métros et Tokyo sont équipés d’un wagon réservé aux femmes, évitant ainsi les mains baladeuses dont les pauvres Japonaises étaient jusqu’alors victimes. Un premier bilan fait état d’un taux de satisfaction élevé, autant du côté des femmes que des hommes, qui disent être heureux de ne plus passer, parfois injustement, pour des pervers. Certains hommes, eux aussi, commencent même à revendiquer leurs wagons réservés... (Le Monde du 13 mai)

Ce type d’initiative ouvre donc un débat, à savoir celui de la remise en cause de la mixité, car c’est bien de cela dont il s’agit. Doit-on, au profit d’un petit problème de société, remettre en cause tout un modèle de vie, dans lequel les individus, quelque soit leur sexe, vivent ensemble sans distinction aucune ?

En effet, la mixité est une condition nécessaire (bien qu’insuffisante) pour promouvoir l’égalité des sexes. Ce principe est, qui plus est, un facteur d’intégration et d’éducation à la citoyenneté. Le remettre en question serait donc assimilé à une sorte de régression sociale.

Faut il en revenir à une séparation des sexes ?

Alors que la mixité est autorisée en France depuis 1957, et obligatoire seulement depuis 1975, qu’est-ce qui aujourd’hui pourrait conduire à sa remise en cause ? Peut être, comme certains le disent, que la mixité n’est pas un facteur parfait d’égalité entre les filles et les garçons, mais elle a au moins le mérite de nous faire tous vivre ensemble en tant qu’individus, nous apporte une vie en commun et un apprentissage certain de la citoyenneté.

Pourquoi, alors, cette vague actuelle de remise en question de ce principe ?

En France, pour ne citer que nous, en 2003 la mixité à l’école a suscité un large débat avant que le ministre de l’époque n’y mette un terme : « La mixité scolaire ne sera pas remise en cause » a affirmé Luc Ferry le 8 septembre 2003. Diverses raisons étaient ainsi invoquées par les partisans d’un retour en arrière : violence, la réussite scolaire...

Autre exemple, la demande de certaines de réserver des plages horaires aux femmes dans les piscines. Que ce soit pour raison religieuse ou tout simplement par pudeur, cette demande est tout simplement rétrograde. Je conçois parfaitement qu’on craigne le regard des autres, mais ce genre de chose est, me semble-t-il, la porte ouverte à toute dérive communautaire ou sexiste.

Après toutes ces réflexions, je prend tout de même la peine d’ouvrir un dictionnaire : Mixte : qui est formé d’éléments hétérogènes et qui participe de leurs différentes propriétés. (Hachette)

La mixité, facteur de socialisation, est avant tout le principe unique qui nous fasse vivre ensemble, nous individus « hétérogènes », quelque soit notre sexe, notre âge, notre religion ou manière de vivre.

Dans son discours du 29 avril 2004 au Sénat, Hélèné Luc, sénateur et membre de la Délégation du Sénat aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, dénonce une atteinte quelle qu’elle soit à cette mixité :

« Il s’agit de dépasser la notion sexuée attachée aux uns et aux autres, pour s’affirmer dans un schéma dans lequel l’enfant, pour prendre le cas de l’école, serait un individu unique au milieu d’autres individus uniques et singuliers tous traités à égalité, tous semblables.

Pour ce faire, il convient alors d’engager un travail important de conscientisation, de détachement des acquis culturels, sociaux, moraux, religieux, que je qualifierais de facteurs exogènes. Ce travail sur soi doit s’adresser à tous, enseignants, parents, françaises et français, élus.

Dès le début de la socialisation, dans la famille, dès l’entrée à l’école, l’enfant ne doit pas être confronté à des notions de hiérarchisation, de différenciation sexuée. Par exemple, les garçons seraient plus turbulents et les filles plus sages.

Cette différenciation sexuée qui conditionne, même si parfois nous n’en n’avons pas pleinement conscience, les études, la vie professionnelle.

Il suffit de regarder les faits, les filles ont de meilleurs résultats scolaires, elles ont, proportionnellement, plus de diplômes que les garçons et pourtant, sorties du milieu scolaire, elles se retrouvent avec une valorisation professionnelle moindre : précarisation du travail, salaires nettement inférieurs à niveau d’étude égal, recherche d’emploi plus difficile, périodes de chômage plus longues. Ce n’est pas un hasard, ce n’est pas une fatalité.

La mixité crée de la socialisation, elle contribue à l’éducation à la citoyenneté, elle met en relation les filles et les garçons pour leur permettre d’échanger et de se comprendre les uns les autres. »

Discours complet sur le site du Sénat


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