TRUMP vs RICARDO
par politzer
lundi 23 juin 2025
Ricardo, au secours !
Dans un monde où les chaînes d’approvisionnement vacillent et où les tarifs douaniers pleuvent comme des obus, une voix du passé résonne avec une urgence presque prophétique : celle de David Ricardo . L’économiste britannique du XIXe siècle, apôtre du libre-échange et père de la théorie des avantages comparatifs, doit se retourner dans sa tombe. À l’heure où la Chine restreint ses exportations de terres rares et où Donald Trump brandit les tarifs comme une baguette magique, il est temps de crier : Ricardo, au secours !
La guerre des terres rares : un coup de poker chinois
Depuis avril 2025, la Chine, qui contrôle 70 % de la production mondiale de terres rares, a serré la vis. Samarium, gadolinium, dysprosium… ces métaux aux noms exotiques, essentiels pour les batteries, les éoliennes et les missiles, sont désormais soumis à des licences d’exportation draconiennes. Cette décision, une riposte aux tarifs américains imposés par l’administration Trump, a plongé les industries technologiques et de défense dans l’angoisse. Les usines américaines, japonaises et européennes risquent de tourner au ralenti, tandis que les coûts s’envolent.
Einar Tangen, commentateur économique basé à Pékin, ne mâche pas ses mots : les politiques de Trump, avec leurs tarifs de 10 à 25 % sur les importations, sont une “cascane de relations publiques” qui ignore les réalités de l’économie mondiale. En provoquant la Chine, Trump a déclenché une tempête qu’il ne semble pas comprendre. La Chine, elle, joue aux échecs, utilisant son quasi-monopole sur les terres rares comme une arme stratégique. Un accord à Londres en juin 2025 a certes permis une reprise partielle des exportations, mais Pékin garde la main, imposant des restrictions sur les métaux à usage militaire. Ricardo, lui, aurait prédit ce fiasco : rompre les chaînes du commerce mondial, c’est scier la branche sur laquelle nous sommes tous assis.
Trump et le mirage mercantiliste
Au cœur de cette débâcle, une obsession : le déficit commercial américain, qui a atteint 1,2 trillion de dollars en 2024. Pour Trump, ce chiffre est une humiliation, la preuve que la Chine, le Mexique ou l’Europe “trichent”. Sa solution ? Des tarifs, encore des tarifs, toujours des tarifs. Mais Ricardo nous l’a appris il y a deux siècles : le commerce n’est pas un jeu à somme nulle. Quand les nations se spécialisent selon leurs avantages comparatifs, tout le monde y gagne. Les iPhones assemblés en Chine, les voitures allemandes vendues aux États-Unis, les terres rares extraites à Bayan Obo : chaque maillon de la chaîne mondiale crée de la richesse.
Trump, lui, semble lire un manuel d’économie du XVIIe siècle, celui des mercantilistes qui accumulaient l’or comme un trésor de pirate. Résultat ? Les tarifs de 2025, selon le Penn Wharton Budget Model, pourraient amputer le PIB américain de 8 % et coûter 58 000 dollars à un ménage moyen sur la durée de vie. Les consommateurs paient la note, l’inflation menace, et la croissance mondiale vacille, comme l’a noté l’OCDE. Tangen le martèle : Trump “court vers une falaise”, aveuglé par une vision simpliste où les tarifs résolvent tout. Ricardo, au secours !
Les banques dans la tourmente ?
Et pendant ce temps, les marchés financiers retiennent leur souffle. Les rumeurs d’une “fuite des banques” circulent, alimentées par la fermeture de banques en ligne en France, comme Ma French Bank ou Orange Bank, et par une méfiance croissante sur les réseaux sociaux. Si ces fermetures reflètent davantage une transition vers le numérique qu’une crise systémique, la volatilité économique mondiale n’apaise pas les esprits. Les restrictions chinoises et les tarifs américains créent un climat d’incertitude où même les institutions financières les plus solides, soumises aux tests de résistance de la BCE en 2025, doivent naviguer avec prudence.
Ricardo nous rappellerait que la confiance est le carburant de l’économie. En brisant les ponts du commerce mondial, Trump et ses homologues protectionnistes risquent de fissurer cette confiance, poussant les investisseurs à la défensive. La Chine, avec sa planification stratégique, semble mieux préparée à ce jeu de patience. Pékin a déjà diversifié ses partenaires commerciaux et réduit sa dépendance au dollar, tandis que les États-Unis s’enlisent dans une bataille tarifaire coûteuse.
Un appel à la raison
Alors, que dirait Ricardo s’il revenait parmi nous ? Peut-être nous supplierait-il de relire ses Principes d’économie politique : le commerce, lorsqu’il est libre, enrichit les nations. Les tarifs, en revanche, sont une taxe sur les consommateurs, un frein à l’innovation, un cadeau empoisonné aux populistes. La guerre des terres rares et l’escalade tarifaire de 2025 ne sont que les symptômes d’un mal plus profond : l’oubli des leçons du passé.
Il est temps de déterrer Ricardo, de dépoussiérer ses idées et de les brandir face à ceux qui croient que l’économie se gagne à coups de tweets et de barrières douanières. La Chine l’a compris, jouant sur l’interdépendance mondiale comme sur un échiquier. Trump, lui, continue de jouer aux dés, espérant un miracle. Ricardo, au secours ! Sauve-nous de ce chaos, avant que les terres rares ne deviennent le dernier clou dans le cercueil du libre-échange.