À la guerre comme à la guerre ! L’exemple de Voltaire... (article numéro 1)

par Michel J. Cuny
mercredi 5 mars 2025

Telle qu’elle nous a été restituée par Theodore Besterman, la Correspondance de Voltaire nous livre très vite certains éléments essentiels qui ont marqué la vie du porte-parole le plus ancien, le plus volubile et le plus qualifié de la grande bourgeoisie française en voie de constitution et d’accession au pouvoir suprême.

Alors que nous n’en sommes encore qu’à feuilleter avec précaution les premières pages du premier volume d’une édition qui en compte treize (tous plus épais les uns que les autres), quatre lettres de 1722 – l’auteur n’a que 28 ans – nous sautent déjà au visage.

S’agissant d’autant de preuves de ce que le dénommé Voltaire ne peut plus désormais être considéré autrement que comme auteur (par la plume) et complice (par les revenus qu’il en a tiré pendant près de soixante ans) de divers crimes contre l’humanité, les extraits de ses lettres, s’ils sont donnés ici à profusion, sontune invitation pressante à aller voir de près l’ensemble de sa Correspondance  : chaque page paraît pouvoir s’offrir comme une piste supplémentaire pour ramener le prétendu grand homme à une petitesse humaine dont la découverte menace de produire en nous une sorte de consternation… Se peut-il qu’on (on ?) ait, à ce point, réussi à nous intoxiquer, toutes et tous ?...

Mais voilà, à vingt-huit ans, Voltaire est déjà en situation de patauger dans ceci : l’esclavage, la guerre et le reste, et de savoir que c’est par ce chemin que passe la route de la fortune… Pas que de lui, petit bonhomme, mais de toute la belle et bonne et grande bourgeoisie.

Eh bien, allons-y bravement…

À la marquise de Bernières, [avril 1722] :

« Pour moi, Madame, qui ne sais point de compagnie plus aimable que la vôtre et qui la préfère même à celle des Indes quoique j’y aie une bonne partie de mon bien, je vous assure que je songe bien plutôt au plaisir d’aller vivre avec vous à votre campagne, que je ne suis occupé du succès de l’affaire que nous entreprenons. La grande affaire et la seule qu’on doive avoir,c’est de vivre heureux, et si nous pouvions réussir à le devenir sans établir une caisse de juifrerie, ce serait autant de peine d’épargnée. » 

Au cardinal Dubois, le 28 [mai 1722] :

« J’envoie à Votre Éminence un petit mémoire de ce que j’ai pu déterrer touchant le juif dont j’ai eu l’honneur de vous parler.Si Votre Éminence juge la chose importante, oserai-je vous représenter qu’un juif, n’étant d’aucun pays que de celui où il gagne de l’argent, peut aussi bien trahir le roi pour l’empereur que l’empereur pour le roi ? »
« Je peux plus aisément que personne au monde passer en Allemagne sous le prétexte d’y voir Rousseau [Jean-Baptiste et non pas Jean-Jacques] à qui j’ai écrit il y a deux mois que j’avais envie d’aller montrer mon poème [Henri IV] au prince Eugène et à lui. J’ai même des lettres du prince Eugène dans l’une desquelles il me fait l’honneur de me dire qu’il serait bien aise de me voir. Si ces considérations pouvaient engager Votre Éminence à m’employer à quelque chose, je la supplie de croire qu’elle ne serait pas mécontente de moi et que j’aurais une reconnaissance éternelle de m’avoir permis de la servir.  »

« Mémoire touchant Salomon Lévi :

Salomon Lévi, Juif, natif de Metz, fut d’abord employé par M. de Chamillart [ministre de la Guerre]  ; il passa chez les ennemis avec la facilité qu’ont les Juifs d’être admis et d’être chassés partout. Il eut l’adresse de se faire munitionnaire de l’armée impériale en Italie ; il donnait de là tous les avis nécessaires à M. le maréchal de Villeroi ; ce qui ne l’empêchera pas d’être pris à Crémone.
Depuis, étant dans Vienne, il eut des correspondances avec le maréchal de Villars.
Il eut ordre de M. de Torcy, en 1713, de suivre milord Marlborough, qui était passé en Allemagne pour empêcher la paix, et il rendit un compte exact de ses démarches.
Il fut envoyé secrètement par M. Le Blanc
[autre ministre de la Guerre], à Siertz, il y a dix-huit mois, pour une affaire prétendue d’État, qui se trouva être une billevesée. »
« Il compte faire des liaisons avec Oppenhemer et Vertembourg, munitionnaires de l’empereur, parce qu’ils sont tous deux juifs comme lui.
 »

À Nicolas-Claude Thieriot, [novembre 1722 ?]  :

« Je voudrais bien que quelque bon emploi vous eût nouvellement occupé et empêché de penser à moi. Je vous pardonnerais votre négligence par le plaisir que j’aurais d’apprendre que MM. Pâris auraient enfin fait quelque chose pour vous.  »

Au même, [vers le 1er décembre 1722] :

« Raillerie à part, j’écrirai une épître chagrine aux Pâris s’ils ne vous donnent rien. »

(Suite à l'article numéro 2)

Michel J. Cuny

 


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