Vous n’y couperez pas
par C’est Nabum
mercredi 21 août 2024
De la coupure en général.
Il est des mots que l'on met à toutes les sauces et qui rendent autant de services que de sévices. La coupure est de ceux-là, se plaisant à faire paradoxalement le lien dans bien des domaines différents, établissant un pont langagier qui n'est pas prêt de céder sous le poids de la novlangue ; du moins il convient de l’espérer.
Puisque ce billet ira rejoindre ses compères de la chose écrite, ouvrons cet article qui reste à faire par la coupure de presse comme me l'a suggéré un lecteur d'Agoravox lors d'une circonférence de rédaction. La susnommée coupure peut donner dans le saignant, trancher avec les idées reçues, couper les cheveux en quatre ou bien encore couper l'herbe sous le pied à une réputation. En ce sens, elle taille autant qu'elle cisaille, elle rafraîchit plus rarement derrière les oreilles même quand les nouvelles sont fraîches. Le plus souvent, retournant aux sources de sa nature profonde, elle plombe l'atmosphère en faisant porter le chapeau à d'autres. De celle-ci, il convient de se préserver en la considérant avec suspicion, tant se dissimulent désormais dans cette immense cohorte, des informations si peu recoupées qu'elles sont parcellaires, tronquées ou bien encore totalement erronées.
Autre domaine d'expression de la formule, la monnaie qui jadis fut sonnante et trébuchante avant de tomber sous le coup de la dématérialisation. Néanmoins, j'appartiens encore aux dinosaures qui aiment à payer en petites coupures au point d'avoir un couteau dans mon porte-monnaie. L'inquisition bancaire et fiscale entendent couper court en gelant définitivement le liquide pour s'en prendre exclusivement au petit peuple, laissant les gros requins de la finance se tailler la part du lion de la fraude et de la dissimulation monétaire.
Archaïque pour les uns, nécessaire pour les autres, la coupure d'énergie demeure un moyen d'expression syndicale dont on fait gorges chaudes. Que ce soit l'électricité ou le gaz, la pratique demeure dans les tuyaux de la contestation tandis que le blocage des péages est une forme de coupure qui donne toute satisfaction au citoyen ordinaire. Seules les forces de l'ordre s'opposent à cette pratique en usant de la matraque pour apporter plaies et bosses en lieu et place de la coupure.
Dans le monde audio-visuel et maintenant informatique, la coupure de réseau quoique fort rare provoque émoi et inquiétude. Elle peut même entrainer une réaction en chaîne qui parfois nous prive de notre lien à ses terribles servitudes. Le bon fonctionnement de la Planète peut même être mis en péril par une coupure de la vaste pieuvre numérique. Désormais le sans-fil, ne supporte plus la coupure, ce qui semble aller de soi quand on prend les mots au pied de la lettre.
Il demeure un univers qui aime à couper les cheveux en quatre à longueur de temps et de campagne électorale où la coupure de son ferait le plus grand bien à un peuple las de se faire farcir les oreilles d'inepties et de mensonges, de turpitudes et de combines. La relation entre les dirigeants et le peuple a depuis longtemps cessé de fonctionner sans que les premiers reconnaissent que les seconds ont coupé les ponts avec eux. Ils se gargarisent d'une légitimité qui n'a plus lieu d'être d'autant plus avec un Monarque qui nie le suffrage universel.
Pareille situation conduit immanquablement à des extrémités coupables, de quoi en perdre la tête ou bien la retrouver sur un pique. Le tranchant de ce couperet devrait inciter chacun à reprendre le fil du dialogue et du respect plutôt que d'aiguiser sans cesse le fil de la lame. Je crains cependant que nous ne couperons pas à une période trouble qui risque fort d'être saignante. Les couteaux sont sortis, les langues blessent et attisent la haine et l'esprit de rébellion sans que jamais notre bon prince ne plaide coupable dans cette crise dont il est entièrement responsable.
Coupez ! On fera une nouvelle prise prochainement. Tôt ou tard nous retournerons aux urnes pour trancher le différend et couper les vivres à tous ceux qui se moquent ainsi de nous ...