Retour sur Match
par Jean-Stéphane
vendredi 7 octobre 2005
Les grandes rencontres de Paris Match : Ségolène Royal : « Que le meilleur gagne ». Par Jean-Marie Rouart, de l’Académie française.
L’interview de Ségolène Royal accordée à Jean-Marie Rouart de l’Académie française pour Paris Match, que je vous encourage à lire, est un exemple de communication politique comme il en existe beaucoup dans la presse people aujourd’hui. Elle est axée principalement sur la présidentielle de 2007, les enjeux familiaux et personnels d’un couple en politique, mais pas seulement ; des questions de société, de moeurs et de morale sont aussi abordées. Ségolène et François, leurs enfants, forment "une famille très unie", une famille modèle et heureuse, avec une forte image éthique et morale, de quoi se démarquer de notre principal adversaire pour 2007, abonné lui aussi à la presse people, aux prises avec de banales histoires de coucheries.
Ségolène Royal marque son autonomie face à son compagnon, premier secrétaire du P.S., et plus largement face aux politiques masculins socialistes, qui n’ont pas, selon elle, ses centres d’intérêt tournés vers la famille, la lutte contre la pédophilie, contre la prostitution ou la pornographie. "C’est une question qui n’intéresse pas les hommes, et il y en a beaucoup au P.S.". C’est facilement rejouer la guerre des sexes. Je ne pense pas que des propositions sociales, tant sur l’égalité hommes-femmes, la lutte contre l’esclavage, que sur la protection des mineurs, ne soient pas partagées par des hommes comme par des femmes. Regrouper "les" hommes ainsi, comme une identité informe, un troupeau, est une vision certes facile pour Paris Match, mais terriblement réductrice. Ségolène Royal appelle de ses voeux "le développement de l’esprit critique" face aux médias et à la pornographie ; elle aurait pu dans Paris Match poser cette question : au-delà de notre identité sexuée, quelles valeurs rassemblent les individus ? Voilà qui aurait fait réfléchir lecteurs et lectrices de Paris Match dans les salles d’attente, plutôt que de les opposer.
Mais revenons sur l’essentiel de l’interview : les présidentielles, et l’annonce de sa candidature à la candidature. Ségolène Royal se présente plutôt comme disponible à la fonction suprême, et au passage elle élimine définitivement Lionel Jospin de la vie politique : "je pense que lui aussi souhaite passer la main et aider une nouvelle génération." Voilà notre ancien Premier ministre, champion de la gauche plurielle, relayé en aide de camp. De toutes façons, personne n’arrêtera Ségolène, "Vous vous sentez capable de battre Sarkozy ? Oui, je m’en sens capable, lui ou un autre". Déjà intrônisée Zapatera, Ségolène compte principalement, à travers cet entretien, capitaliser le vote des militant(e)s lors du congrès... et ramener toutes ces voix dans le giron de son mari ; pour François, voilà une bonne opération, ou comment instrumentaliser le congrès, en reposant la question du candidat pour 2007, repoussant ainsi les questions de fond. Car force est de constater que nous ne parlons plus que de cet entretien accordé à ParisMatch et des commentaires "machistes" qu’il a engendrés. François Hollande peut paraître alors sur le plateau de France 2, genre candide, je n’étais pas dans la confidence, on veut bien le croire, mais plein d’admiration pour sa campagne... compagne présidentiable....