Sarkozy - July : baisers volés
par Bernard Lallement
mardi 27 décembre 2005
Serge et le petit Nicolas s’embrassent, et après ? Cela concerne leurs vies privées. Prévenance n’est pas pacte, rappelait René Char. July est l’ami d’Alain Juppé depuis plus de vingt ans sans que personne y ait trouvé quelque chose à redire. En revanche, l’anonymat du photographe, voleur d’évènements en l’occurrence, rebute franchement. Pourquoi donc dissimuler son identité, aurait-il honte de ses épreuves, seraient-elles tronquées ? De même, on ne trouve aucune indication sur le lieu exact et les conditions de ces prises de vue. Selon Daniel Schneidermann, qui dévoile l’information dans son blog, elles pourraient dater du 30 mars 2005, à l’occasion d’une réunion du comité de soutien à Florence Aubenas.
L’honnêteté, intellectuelle, commanderait à son auteur de se faire connaître. A défaut, il court de risque de se voir assimiler à ces folliculaires à gages, qui sévissaient sous la IIIe République, dont les feuilles de chou les employant rapinaient sous couvert d’informer.
Quand écrire donnait du sens
A juste titre, ils dénoncent les « informations déformées ou carrément bidon, charlataneries ». Aussi aimerions-nous bien savoir comment ils qualifieraient cette présentation de photos sans indication de source ni de circonstance. Informations déformées, ou bidon, ou charlataneries ?
A titre de légende, l’éditeur, qui a également participé à la rédaction de l’ouvrage, indique : « Eh oui, vous l’avez reconnu. Serge July, le patron de Libération. À sa création en novembre 1972, ce quotidien a fait une promesse : Libération luttera contre le journalisme couché. »
Malheureusement, outre qu’une telle citation est inexacte, en 1972, Libé n’était nullement sur le point d’être créé. Il le sera en février 1973. Le premier numéro sortira le 18 avril, une diffusion régulière en kiosque commencera le 22 mai de la même année. Nos Vychinski médiatiques semblent peu au fait de l’histoire d’un quotidien qu’ils se complaisent, non parfois sans quelque raison d’ailleurs, à cingler. Cela fait un peu charlatan sur les bords, et vaut, à leur encontre, tous les argumentaires.
Quant aux rapports entre les médias et la politique, j’ai déjà eu l’occasion de dire mon point de vue, qui rejoint celui de l’ancien directeur et fondateur du Monde : « le journaliste est le confident de tous, et l’ami de personne. » Mais c’était au temps où écrire donnait du sens.
Photos : AFP - Gilles Bruno