Démocratie arabe
par Alain Hertoghe
samedi 17 décembre 2005
Le courage irakien et la persévérance américano-britannique feront-ils mentir les Cassandre ? Après avoir évité la guerre du Vietnam et la bataille de Stalingrad, promises par les prophètes du malheur anglo-saxon dès les premiers jours de la blitzkrieg de 2003, après avoir déjoué les pronostics d’une partition rapide du pays entre chiites, sunnites et kurdes une fois Saddam Hussein renversé, l’Irak va-t-il également conjurer les dangers de chaos perpétuel, de guerre civile et de République islamique ?
Non, évidemment, si vous écoutez ou lisez tous ceux pour qui une issue heureuse pour le peuple irakien signifierait une terrible blessure narcissique tant ils ont tenu, depuis trois ans, la chronique d’une catastrophe annoncée... de l’entreprise de Bush, Blair and co.
Oui, si vous restez raisonnablement optimiste au vu de la volonté démocratique des Irakiens, de la participation des principales forces politiques au processus électoral et parlementaire, ainsi que de la détermination de l’establishment politico-militaire américain à ne pas retirer ses troupes d’Irak tant que son gouvernement et sa nouvelle armée ne pourront affronter seul les nostalgiques de la dictature et les terroristes djihadistes.
Ce jeudi 15 décembre, les Irakiens ont montré pour la troisième fois en un an leur choix de la voie électorale. Cette fois, les chiites et les kurdes ont été rejoints dans les bureaux de vote par les sunnites, qui ont ainsi désavoué les groupes armés opposés à la démocratie.
Les forces politiques des trois communautés vont devoir maintenant trouver un terrain d’entente pour gouverner. Mais la recherche - logiquement longue et difficile - d’un compromis historique entre elles devrait être encouragée par l’absence d’un parti politique dominant issu des urnes et par la pression persistante des partisans de la violence.
Aux États-Unis, enfin, le débat houleux en cours depuis plusieurs mois sur le maintien des GI en Irak et la stratégie militaire à adopter pour vaincre l’insurrection arrive à son terme. Ce vendredi, à l’initiative des républicains, la Chambre des représentants devait adopter une résolution affirmant que "fixer un calendrier artificiel pour le retrait d’Irak des forces américaines (...) est fondamentalement inconciliable avec l’obtention de la victoire".
Les Irakiens feront-ils rougir de honte les pythies qui les déclaraient inaptes pour la démocratie ? C’est tout le malheur qu’on leur souhaite...