De la langue française à la « langue créole » : le délire de Jean-Luc Mélenchon
par Giuseppe di Bella di Santa Sofia
mercredi 25 juin 2025
Quand j’ai lu les dernières déclarations de Jean-Luc Mélenchon, j’ai ressenti un mélange de colère et d’incrédulité. Lors d’un colloque sur la francophonie à l’Assemblée nationale le 17 juin 2025, le leader de La France Insoumise a osé suggérer qu’on rebaptise la langue française en "langue créole". Pire, il a affirmé qu’elle "n’appartient plus aux Français". Ces mots, rapportés par Le Figaro, m’ont profondément choqué, comme ils ont dû heurter beaucoup de ceux qui chérissent notre langue comme un trésor national. En tant que Français, je me demande : Mélenchon cherche-t-il à provoquer pour exister, ou a-t-il perdu tout sens des réalités ?
Une gifle au patrimoine français
Je me souviens encore des heures passées à l’école, à apprendre les conjugaisons, à réciter du Molière ou du Victor Hugo. La langue française, c’est plus qu’un outil de communication : c’est une histoire, une identité, un fil qui nous relie à des siècles de pensée, de poésie et de combats. Alors, quand Mélenchon déclare qu’elle est devenue une "langue créole", fruit d’un métissage qu’il célèbre avec une jubilation presque théâtrale, j’ai l’impression qu’il crache sur cet héritage. Oui, le français a emprunté des mots à l’arabe, au latin, au grec et à tant d’autres langues. Mais en faire une "créole", comme s’il s’agissait d’un patchwork sans racines, c’est nier ce qui fait sa singularité : une langue codifiée, portée par une nation, et aimée par des millions de gens qui se reconnaissent en elle.
Mélenchon prétend que la langue "n’appartient plus à la France" parce que vingt-neuf nations l’ont adoptée comme officielle. Mais n’est-ce pas justement la force de la France d’avoir rayonné à travers sa langue ? Pourquoi la réduire à un bien commun vague, comme s’il fallait s’excuser de l’avoir façonnée ? Sa rhétorique, qui se veut progressiste, sonne comme une capitulation face à ceux qui veulent effacer notre histoire. Je ne suis pas de ceux qui idéalisent le passé colonial, loin de là, mais nier le rôle central de la France dans la francophonie, c’est comme arracher les pages d’un livre pour n’en garder que les marges.
Un calcul électoral cynique
Je ne suis pas naïf : Mélenchon n’a pas lancé cette idée par pur amour de la philosophie. Derrière cette provocation, il y a un calcul froid. Depuis des années, La France Insoumise courtise un électorat précis : les jeunes des banlieues, les populations issues de l’immigration, les urbains progressistes qui vibrent aux discours sur la diversité et l’antiracisme. En 2022, il a cartonné dans des endroits comme la Seine-Saint-Denis ou Marseille, où son message de justice sociale et de rejet des élites trouve un écho. En vantant une langue "créole", il flatte ces électeurs, leur disant : "Votre histoire, vos origines, tout ça fait partie de la France". C’est malin, mais c’est aussi manipulateur.
Le problème, c’est qu’il oublie une partie des Français. Et pas des moindres. Les classes populaires, celles qu’il prétend défendre, ne sont plus toutes derrière lui. Beaucoup d’ouvriers, d’employés, de gens des petites villes se sont tournés vers le Rassemblement National, qui parle de souveraineté et d’identité en des termes simples. Les études du CEVIPOF le montrent : le RN est aujourd’hui le premier parti chez ces électeurs. En s’attaquant à un symbole comme la langue française, Mélenchon leur tourne le dos. Il croit peut-être marquer des points auprès de sa base, mais il risque de creuser encore plus le fossé avec ceux qui se sentent déjà abandonnés par la gauche.
Je pense à un ami, ouvrier dans le Nord, qui vote RN depuis 2017. Quand je lui ai parlé de cette histoire de "langue créole", il a éclaté de rire, puis s’est énervé : "Il veut quoi, Mélenchon ? Qu’on renie tout ce qu’on est ?". Ce genre de réaction, je l’entends partout, dans les cafés, sur les marchés. Mélenchon croit peut-être faire un coup d’éclat médiatique, mais il alimente la colère de ceux qui ont l’impression qu’on leur vole leur pays.
Une ignorance des tensions francophones
Ce qui me révolte encore plus, c’est l’aveuglement de Mélenchon face aux réalités de la francophonie. Il peint un tableau idyllique d’une langue universelle, partagée par des peuples qui l’auraient "conquise" contre la France. Mais il suffit d’ouvrir un journal pour voir que c’est plus compliqué. Au Mali, au Burkina Faso, au Niger, des gouvernements et des populations se détournent de la France, accusant notre pays de néocolonialisme. Là-bas, le français n’est pas vu comme une "conquête" joyeuse, mais comme un héritage imposé, parfois rejeté. Au Mali, en 2023, le français a même été rétrogradé au rang de "langue de travail" pour laisser place aux langues locales comme le bambara.
Mélenchon, lui, fait comme si tout allait bien. Il parle de "créolisation" comme d’un grand élan fraternel, mais il ignore que, pour beaucoup de francophones, la langue française reste un symbole ambivalent, lié à un passé douloureux. En la décrivant comme un bien commun détaché de la France, il esquive les critiques adressées à notre pays – sur la Françafrique, par exemple – et se contente d’une vision romantique qui ne correspond pas à la réalité. C’est presque insultant pour ceux, en Afrique ou ailleurs, qui luttent pour redéfinir leur rapport à cette langue. Sa proposition de "langue creole" sonne comme un slogan creux, déconnecté des fractures historiques et actuelles.
Une maladresse qui fait mal
Je veux bien croire que Mélenchon ne cherchait pas à blesser. Peut-être pensait-il ouvrir un débat, bousculer les conservatismes. Après tout, il n’a pas tort de dire que le français s’est enrichi au contact d’autres cultures. Mais la manière dont il l’a fait est désastreuse. Le mot "créole", avec son histoire liée à l’esclavage et à la colonisation, est un choix explosif. Le jeter comme ça, comme un gimmick pour un meeting, c’est irrespectueux pour les complexités historiques et pour les Français. En plus, que la langue "n’appartient plus aux Français", c’est comme dire à des millions de gens : "Votre attachement à votre langue, on s’en fiche".
Je pense à ma grand-mère maternelle, qui m’a appris à aimer les vieux poèmes de Verlaine. Elle serait horrifiée d’entendre qu’on veut renommer sa langue. Et elle n’est pas la seule. Sur les réseaux, dans les discussions, je vois une indignation réelle, pas juste des postures politiques. Mélenchon a sous-estimé à quel point la langue française est un sujet sensible, un lien affectif pour beaucoup. Il aurait pu parler de la richesse de la francophonie, de son rayonnement mondial, sans nier son ancrage français. Au lieu de ça, il a choisi la provocation, et ça fait mal.
Un débat détourné
Le pire, c’est que Mélenchon a peut-être réussi une chose : détourner l’attention. En lançant cette polémique, il nous fait parler de la langue plutôt que de ses propositions économiques ou sociales. C’est du Mélenchon tout craché : il provoque, il divise, et pendant ce temps, on oublie de parler du chômage, du pouvoir d’achat, des urgences du quotidien. Mais à quel prix ? Chaque fois qu’il sort une phrase comme celle-là, il donne des munitions au RN, qui n’attend que ça pour crier à la trahison nationale. Et nous, on se retrouve à se disputer sur des symboles, au lieu de chercher des solutions.
Je ne dis pas qu’il faut figer la langue française dans un musée. Elle vit, elle change, et c’est tant mieux. Mais la dénaturer, la renommer pour plaire à une partie de l’électorat, c’est une trahison de ce qu’elle représente. La francophonie, c’est une chance, un pont entre des peuples, mais ce pont part de France, et Mélenchon semble l’oublier. Il veut une "nouvelle France", mais à force de vouloir tout réécrire, il risque de perdre ceux qui aiment la France telle qu’elle est.
Un appel à défendre notre langue
Je ne cache pas ma colère. Les mots de Mélenchon sur la langue française m’ont blessé, comme ils ont blessé beaucoup de Français. En proposant de la rebaptiser "créole", il a non seulement insulté un symbole national, mais il a aussi montré une déconnexion inquiétante avec les réalités de la francophonie et les attentes des Français. Son calcul électoral, s’il en est un, est d’une maladresse coupable. À vouloir séduire une partie de sa base, il alimente la fracture et fait le jeu de ceux qu’il prétend combattre.
La langue française n’est pas un jouet politique. C’est un héritage, une fierté, un lien qui nous unit, en France et au-delà. Mélenchon aurait pu en faire un sujet de rassemblement, en célébrant sa diversité tout en respectant ses racines. Au lieu de ça, il a choisi la division. J’espère qu’il entendra la colère de ceux, comme moi, qui refusent de voir leur langue sacrifiée sur l’autel de la provocation. Et j’espère, surtout, qu’on pourra un jour parler de la francophonie sans avoir à choisir entre l’ouverture et l’amour de notre histoire.