Sarkozy, la légende du siècle ?

par Voris : compte fermé
vendredi 28 novembre 2008

"Le seul dirigeant révolutionnaire c’est Sarkozy, qui va conduire en ce XXIe siècle la révolution citoyenne qui rendra la République au peuple" (Roger Karoutchi). Le 20 octobre 2008, de retour de Camp David où il vient de rencontrer George W. Bush, Sarkozy s’exclame : "J’ai réussi le coup du siècle !" Nul doute, Sarkozy veut entrer dans l’Histoire. Mais il ne suffit pas de proclamer que l’on va marquer le siècle pour que cela marche...

Empressons nous de préciser que le fameux "coup du siècle" se résume à l’obtention d’une réunion du G10. L’emphase a accouché d’une souris, tout comme pour les Grenelle, la croissance avec les dents, la fin annoncée du capitalisme financier, et les déclarations bourrées de prétention du type "Je veux si je suis élu, président de la République, que d’ici deux ans plus personne ne soit obligé de dormir sur le trottoir."

Doit-on croire davantage le chef de l’Etat lorsqu’il déclare, à la manière d’un Malraux, "le 21e siècle sera religieux" ? ("Un des défis (du 21e siècle) est celui des conditions du retour du religieux dans la plupart de nos sociétés", déclare Sarkozy en janvier 2008).

Quand Sarkozy se voit en homme de l’avenir avec plusieurs distances d’avance, d’autres le comparent plutôt à des hommes du XIXème siècle.

Il en est ainsi du blog "L’air de Paris" qui le compare à Adolphe Thiers :

La petite taille (Thiers mesurait 1 mètre 55), les tics nerveux (ses "tics du bras et du buste")



L’égocentrisme : "Tout part de sa personne, tout y revient aboutir", notait un commentateur de l’époque cité par Georges Valance, auteur de "Thiers, bourgeois et révolutionnaire" (Flammarion, 2007)

Sa monopolisation du discours et son inaptitude à l’échange : "Quand M. Thiers parle, aucun autre homme ne peut placer un mot".

Sa recherche de l’adulation des foules et son souci permanent d’être le point de mire de tout le monde : L’entourage de Thiers devait "beaucoup écouter, toujours approuver, admirer même le plus possible".

Pour le reste, on sait que Thiers dut réprimer la Commune dans le sang avant de livrer le pays à l’Ennemi. Pour le premier danger, Sarkozy s’est pour l’instant contenté de s’en prendre à Mai 68 qu’il veut "liquider" et d’arrêter des suspects de l’ultra-gauche vite accusés par l’Exécutif d’être à l’origine d’un mini attentat contre la SNCF. Pour le second danger, en dépit d’une fusion du sarkozisme avec l’atlantisme et l’Amérique de Bush, malgré l’obamania, le peuple français ne dit pas encore "Nous sommes tous Américains !"
 
Mais depuis quelque temps circule sur Internet un texte de Victor Hugo d’une incroyable acuité et d’une impressionnante actualité :

Que peut-il ? Tout. Qu’a-t-il fait ? Rien.

Avec cette pleine puissance, en huit mois un homme de génie eût changé la face de la France, de l’Europe peut-être. Seulement voilà, il a pris la France et n’en sait rien faire. Dieu sait pourtant que le Président se démène : il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ; ne pouvant créer, il décrète ; il cherche à donner le change sur sa nullité ; c’est le mouvement perpétuel ; mais, hélas ! Cette roue tourne à vide. L’homme qui, après sa prise du pouvoir a épousé une princesse étrangère est un carriériste avantageux. Il aime la gloriole, les paillettes, les grands mots, ce qui sonne, ce qui brille, toutes les verroteries du pouvoir. Il a pour lui l’argent, l’agio, la banque, la Bourse, le coffre-fort. Il a des caprices, il faut qu’il les satisfasse. Quand on mesure l’homme et qu’on le trouve si petit et qu’ensuite on mesure le succès et qu’on le trouve énorme, il est impossible que l’esprit n’éprouve pas quelque surprise. On y ajoutera le cynisme car, la France, il la foule aux pieds, lui rit au nez, la brave, la nie, l’insulte et la bafoue Triste spectacle que celui du galop, à travers l’absurde, d’un homme médiocre échappé.

(Victor HUGO, dans "Napoléon, le petit", réédité chez Actes Sud)

Que changer à ce texte ? Rien ! Il est tellement éloquent. Sauf...
Sauf peut-être le début, en inversant : "Que peut-il ? Rien. Qu’a-t-il fait ? Tout." Avec la mondialisation, l’Europe, la dette qui prive de marges de manoeuvre financières, et la crise, Sarkozy ne peut pas faire grand chose. Mais, fort heureusement, il a pour lui le pouvoir de la communication et la quasi totalité des médias pour s’employer à nous laisser croire qu’il peut tout faire, et que toutes les bonnes idées, toutes les bonnes actions émanent de sa seule personne : "Tout est possible !". 

N.B Vous trouverez la citation de Roger Karoutchi reprise en introduction de cet article sur le blog de Jean-Luc Mélenchon.


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