La France « beauf » et ses icônes : un phénomène de société ?
par Ferdinand
mardi 29 avril 2008
C’était une angoisse à la fin des années 90, la France était-elle en train de se « beaufiser » ? C’est très vite devenu une réalité au début des années 2000, avec l’émergence de la télé-poubelle, la guerre TF1/M6 pour le monopole de la bêtise, le fléau des télé-crochets venus tout droit des abysses pour anéantir la chanson française et le nouveau cinéma populaire qui ferait se retourner Gérard Oury et autres Louis de Funès dans leur tombe. Une France « beauf » qui a fini finalement par s’imposer en élisant son messie : le président de la République lui-même.
Le mot « beauf » a toujours existé dans le langage populaire pour définir généralement les gens dépourvus de goût et de savoir-vivre. Aujourd’hui, il est plus que jamais d’actualité puisque ce phénomène s’attaque à toutes les couches de la société française, en souillant même les plus hautes sphères.
Les premiers symptômes se déclarent en 2001 : la famille M6 donne naissance à Loft Story alors que Star Academy naît dans la famille TF1. C’est le début de l’ère de la télé-réalité, des pseudo-stars à qui l’on va promettre des merveilles, devenir une star de la chanson en cinq mois, avoir l’opportunité de créer sa marque de vêtements par le simple fait d’avoir montré ses ébats sexuels dans une piscine devant les caméras de M6 ! De quoi assassiner les parents qui rivalisent d’exemples pour prouver à leurs enfants qu’il faut bien travailler à l’école et faire des études ! Puis, la télé-réalité va se montrer d’une imagination débordante d’abord en faisant des petits à Star Academy, comme la Nouvelle Star, puis en ressortant des has-been que l’on va tantôt mettre en scène dans une ferme des années 1800 ou un camp militaire !
Mieux, on va même mettre les Français moyens devant un miroir en leur montrant la vie de leurs congénères « beaufs » dans des émissions comme Vis ma vie ou Confessions intimes. Puis comme ils sont intelligents, on va leur montrer des idiots dans Le Maillon faible et on va même jusqu’à les conditionner dans la manière de décorer leur chez-soi avec D&Co, présentée par la très vulgaire Valérie Damidot ! Ainsi, tout le PAF se retrouve assez vite contaminé. Et s’il n’y avait que la télé !
Alors, le « beauf » commence aussi à s’attaquer au cinéma et se trouve vite un porte-parole : Frank Dubosc, passé maître dans l’art de l’incarner. Camping et Disco sont les bibles du « beauf » jusqu’à l’arrivée du petit dernier : Bienvenue chez les Ch’tis qui signe l’apogée d’un cinéma populaire nouveau, le cinéma gras qui se base sur des clichés vulgaires avec à ce jour plus de 19 millions d’entrées.
La dernière icône (ou e-conne) en date de cette nouvelle France qui s’assume est la nouvelle star de M6, Cindy Sander, qui non contente de s’être fait jeter de la célèbre émission, a décidé de partir à l’assaut du public grâce à internet et sa naïveté. Résultat ? C’est nul, mais on l’adore ! Parce qu’elle nous ressemble cette Cindy Sander : battante, elle mène sa vie (qui n’a pas été facile) sur tous les fronts, et veut croire à ses rêves, tout en étant complètement déconnectée de la réalité !
Cette France « beauf » grandit, oui, prend de l’ampleur, si bien qu’il lui fallait un chef spirituel plus puissant que Frank Dubosc, ce chef, elle se l’est choisi, toute seule, comme une grande, le 6 mai 2007, un « changement » politique et un changement d’image de la société portant un nouveau message plein d’espoir pour cette France : le nouveau « beauf » est riche, puissant, passe ses vacances sur les yachts de ses copains milliardaires, porte des Rolex, des Ray-Ban, a une belle femme et l’exhibe, place ses amis « beaufs » dans son gouvernement, accumule les couacs et les assume ! Le « beauf » a donc encore de beaux jours devant lui !