Ah ! Si j’étais riche ! Parlons-en avec François Hollande

par Zora la Rousse
mardi 6 février 2007

De passage à Saint-Ouen mercredi 24 janvier 2007. Récit d’une soirée « royale » dans le NeufCube, au café La Rotonde, entre une Gauloise blonde avec filtre bobo et le prince charmant de la Madone du Poitou.

Discrimination, un mot sur toutes les bouches et tous les panneaux 4 mètres par 3 du moment. Alors, quand j’ai entendu Monsieur Royal dire : « Je n’aime pas les riches, j’en conviens » sur France 2, mon sang de Gauloise blonde sans filtre du NeufCube atterrée sur son canapé IKEA n’a fait qu’un tour. Je me suis dit : Zora, appelle tout de suite la Halde !
Sans dec’, je plains le prince Chacha de la Madone du Poitou. Être PS, propriétaire à Boulogne, payer l’ISF et ne pas aimer les riches, c’est aussi grave que de s’appeler Éric Raoult et être maire UMP d’une ville qui comporte moins de 5% de logements sociaux, tout en se prenant pour un porte-parole du 9-3.

Cette histoire de riche continuait de me turlupiner, d’autant plus que de la petite phrase, elle, est passée au mal de tête digne d’un problème de baignoire avec un seuil critique de bain remuant à 4 000 euros.

Le Parisien édition 93 (nos « Dernières Nouvelles d’Alsace » à nous les outre-périphéens) nous annonce une halte de de caravane des éléphants présidentiels à Saint-Ouen le 24 janvier. Rappelons que je fais peut-être partie des salauds de riches qui assument aussi de contribuer à la redistribution collective. Sachant que, parallèlement, je ne suis pas encore adhérente du MEDEF, mais pourtant déjà chef de famille et chef d’entreprise avec une nounou à domicile. Je fais tourner à plein le commerce local : pas de courses alimentaires sur Internet et seulement Carrefour Gennevilliers tous les 2 mois (saint de la consommation, pardonne-moi de mes pêchés... ça c’est mon côté bourge décoincée). Je paye la cantine et le centre de loisirs tranche maxi. À Saint-Ouen on est très peu dans ce cas : c’est un peu notre ISF à nous les Bobos du NeufCube (humour). Pas de résidence secondaire, ni de week-end en baie de Somme (je rêve bien d’une garçonnière en Borloo populaire avec mes copines), sans oublier le crédit immobilier qui fait de Chouchou et moi des propriétaires virtuels encore pour 15 ans.
Me voilà donc, en bonne bobo disciplinée qui a lu Le Petit Prince à 6 ans, en train de préparer ma question : comment prendre la bonne décision pour mon désir d’avenir ?

Je sens en effet le doublé gagnant augmentation-promotion à plein nez : Superboss est content de moi. Mais voilà, est-ce qu’après les présidentielles et une éventuelle hausse des impôts, ça vaudra la peine de bosser plus ? Le Petit Prince de Neuilly nous dit que oui, mais pas la Madone du Poitou avec sa démocratie participative. On n’y comprend plus rien dans son programme. Comme j’ai des idées de droite et le cœur à gauche, je m’y perds là-dedans.
Monsieur Royal-Hollande, je vous propose de jouer à « Qui veut gagner mes millions ». Précision importante : vous n’avez pas le droit d’appeler une amie, ni de demander l’aide du public.
Réponse A)  : J’accepte la promotion. Dans la foulée j’augmente ma nounou, je consomme plus, je crée plus de valeurs. Je ne m’inquiète pas pour mes impôts, une nouvelle règle fiscale va être mise en place pour encourager le travail, qui est une valeur universelle et non une idéologie de gauche ou de droite.

OU

Réponse B) : Je refuse la promotion : j’ai fait mes calculs. Entre les impôts qui augmentent, les frais de garde d’enfants, le barème élevé de la cantine et des activités extra-scolaires, c’est plus rentable d’arrêter de travailler. Les revenus de l’assistance sont équivalents à ceux du travail. Pourquoi se fatiguer ? Les autres riches n’auront qu’à payer mes allocs et le chômage de ma nounou qui sera licenciée et qui arrêtera de consommer.

OU

Réponse C) : Je ne peux pas me résigner à arrêter de bosser, comme déjà des milliers de Français, je pars travailler en Belgique à la pression fiscale plus faible et plus fiable à long terme. Au pire, j’ouvrirai un magasin de tuniques Paul & Joe et robes Isabelle Marant et je pourrai continuer mon shopping dans la capitale de la mode située à 1h30 de TGV.

Annoncé à 19h30, c’est avec une heure et demie de retard que François Hollande arrive finalement au café. Prince Chacha a dû prendre des cours au Djamel Comedy Club avant de traverser le périph’ : « Avec Ségolène il faut aller au rapport, dans le meilleur sens du terme... Je reviendrai donc à Saint-Ouen, c’est ce qu’elle appelle la politique par la preuve ». Décidément, faut qu’il fasse gaffe aux Montebourdes Prince Chacha, parce que dans d’autres pays et d’autres temps, la preuve du rapport, c’est aussi la preuve de la virginité, et en politique encore plus qu’ailleurs, je crois que ça va être dur à trouver, y compris pour la Madone du Poitou !

Une barmaid interroge le dircab : « Tu crois qu’on peut installer Hollande derrière le bar ? ». Et voilà Prince Chacha en Tom Cruise dans « Cocktail », la musique des Bee Gees en moins, le tout tendance « Les Bronzés  » 40 ans après et sans Weight Watcher. Les blogs c’est superimportant et Prince Chacha a bien été briefé par le dircab : « François, là c’est Olivier du blog de Saint-Ouen, réponds en priorité à ses questions ». Prince Chacha se redresse, il n’aime peut-être pas les riches, mais les aristos du Net oui :
www.lesaudoniens.com : "quelle est la valeur de droite dont vous êtes le plus proche ?"
F.Hollande : la liberté ; droite et gauche ont su combattre ensemble pour la reconquérir. En même temps, elle ne se résume pas à la liberté d’entreprendre. Je souhaite également reconquérir la liberté afin de permettre à chacun d’accéder au bonheur ... »

Quelle transition de rêve, je suis juste à côté, et justement moi aussi je ne demande qu’à accéder au bonheur, si possible avec pas trop d’impôts, comme chez nos voisins européens. Grand sourire, je me lance. Moi c’est, Zora : « Quand vous avez dit "je m’aime pas les riches", ça m’a choquée, je trouve que c’est de la discrimination, d’autant plus que je suis dans votre tranche à 4 000 euros. Je bosse dur, j’ai créé un emploi,, mais demain, je ne sais pas si je vais voter pour vous parce que je trouve que vous n’encouragez pas du tout le travail ».
F.Hollande : "vous gagnez combien ? combien d’enfants ?
(Il est dingue, lui, on est à Saint-Ouen, pas à Manhattan !)
Bon alors, si je calcule, vous avez 3 parts... vous n’êtes pas riche alors, puisque cette mesure s’adressera à partir de 8 000 euros.
Question suivante.

La richesse ? Ce serait donc une affaire de calcul mental, d’addition et de soustraction ? Il compte Royal notre Prince Chacha. Pas de voix à prendre chez les riches, c’est plus simple de faire des maths pour déclarer sa flamme : je vous aime puisque vous n’êtes pas riche.
Bon, et bien, je suis un peu déçue, c’est ça la convivialité de la démocratie participative ? Je crois que je préfère encore lire les SMS dans l’émission de Fogiel ou hurler Patriiiiiiick au concert des Enfoirés. Je rentre dans mon pav’ de banlieue, euh, pardon, ma maison de ville de l’outre-périphérie.

J’allume la télé, et là, je tombe sur France 2 sur Les Arènes de France. Débat : « Les riches ont-ils raison de quitter la France ? »

J’ai vu juste dans mon questionnaire : tous les Français partent au pays d’Hergé. Il y a 10% de Français à Bruxelles, ça a doublé en 10 ans, et pas que des capitaines d’industrie, des familles de cadres sup aussi. Le nombre d’élèves au lycée français a doublé. Stéphane Bern s’inquiète : « quand tous les riches seront partis comment allez-vous aider les pauvres ? ». Assouline, qui a pris la fusée sociale pour passer de trotskiste à sénateur PS répond : « c’est de la fumée ». Je crois bien que c’est ça au fond, la richesse, du brouillard et toujours la télé qui s’enfume avec les tam tam du qu’en-dira-t-on. Mais moi, je m’en fous, ce que je veux c’est ne pas payer trop d’impôt et que les riches restent en France pour que ça profite à tout le monde. Ben oui, je suis blonde. Le sénateur Assouline, à 7 500 euros nets mensuels non imposables, s’énerve : « Sarko a-t-il pensé à Johnny quand il a dit : La France, aimez-la ou quittez-la ?  »

Ce que je sais, moi, la Gauloise blonde du NeufCube (le pays où il faut en faire 3 fois plus pour être entendu), c’est qu’on a besoin d’entrepreneurs qui n’ont pas peur de la diversité, tous comme les hommes politiques. La France, aimons-la, mais pas n’importe comment ni à n’importe quel prix. De toute façon, comme a dit Jacques Séguéla sur En Aparté chez Pascale Clark, votez pour vous !


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