Déroute du national-islamisme et du médiatique
par Lucien-Samir Arezki Oulahbib
mardi 2 janvier 2007
Je ne crois pas que ce soient les Américains qui aient décidé l’exécution de Saddam, car si c’était le cas, ils l’auraient fait un autre jour, afin de ne pas accroître l’animosité contre eux ; ensuite, le jour dit de l’Aïd est symbole de purification, on sacrifie ses péchés en jetant des pierres contre Satan, or Saddam était un immense péché... Par ailleurs, Saddam est apparu en psychorigide qui évidemment ne pouvait redevenir sensible puisqu’il était déjà mort comme humain. Aucune dignité lorsqu’un chien enragé, devant le fusil, poursuit sa charge. Les human bombs sont-ils « dignes » ?
Aussi sont nuls et non avenus les pleurs hypocrites de certains musulmans et le fait d’entendre diverses voix médiatiques, de la BBC à RFI, (en passant, hélas, par le Vatican, Le Figaro, Libération, TF1 sans oublier LCI), renchérir sur l’exécution de Saddam, parlant en vrac d’huile sur le feu (alors que le feu a commencé à émerger depuis la Révolution iranienne), comparant le nombre de soldats américains assassinés, identique à celui du 11 septembre 2001 (quel rapport, sinon pour signifier que les morts du 11 septembre payent pour les fautes supposées des Américains ?) etc., tandis que, du côté de la Somalie, les mêmes médias avides d’aveuglement donnaient de l’écho à une "manifestation" dite "anti-éthiopienne" dans la capitale somalienne... Et pourtant ! il faudrait plutôt se réjouir de voir, enfin, les ennemis de la liberté fouler à leur tour le sol de l’enfer... Encore une bonne nouvelle : je feuillette le numéro double actuel (25/12/1/2007) de Newsweek (assez anti-Bush depuis deux ans environ) que m’a prêté Iris Canderson (1) de retour de Bruxelles, et que lis-je, page 46 ou 48 (article de Silvia Spring) ? Que l’économie irakienne est en forte croissance ! Malgré les problèmes de sécurité et un chômage encore non négligeable, il y a un boom fantastique dans tous les secteurs, télécommunications et énergie en particulier (41 milliards de dollars cette année). Le PNB a cru de 17% l’année dernière et 13% sont prévus pour cette année 2006. Je crois rêver, et d’ailleurs le journaliste n’arrête pas de prévenir toutes les trois lignes que tout ce boom s’effectue malgré les violences qui cherchent précisément à l’enrayer.
L’argent coule à flots, le pouvoir d’achat a été multiplié par cent pour cent, et les taxes sont passées de 45% à 15%, la consommation de produits introuvables du temps de Saddam bat son plein, en particulier les écrans plats, les automobiles, les téléphones portables (7,1 millions contre 1,4 deux ans auparavant)... La création d’entreprises a explosé (34 000 enregistrées contre 8000 il y a trois ans... Cela me fait penser à cette info que personne n’a reprise : selon la BBC, des brigades islamistes ont détruit il y a quelques jours à Gaza plusieurs cyber-cafés pour empêcher de visionner de la pornographie... Je n’ai pas entendu parler de cela en Irak. Même si, en effet, l’après-Saddam a révélé ce que sa chape de plomb cachait, comme en Russie à vrai dire : le fait que pour survivre, la population s’est gangstérisée, le marché noir était tenu par des mafias, comme en Russie, qui évidemment ne tenaient pas à ce que le marché libre les concurrence, d’où les exactions et les enlèvements d’intimidation, le tout dans un décor de luttes inter-religieuses, alors que, pour une part, il s’agit de défendre ses propres territoires mafieux sans doute construits par affinités claniques et religieuses. Sans oublier les clans baathistes et djihadistes qui ont leur propre agenda... Or, les journalistes occidentaux semblent se délecter de cette situation qui, pourtant, n’a pu être créée ex nihilo du fait seul de l’intervention anglo-américaine. La déliquescence de la société irakienne, la gangrène mafieuse existaient bel et bien avant, comme en Russie, répétons-le, mais elles étaient tenues à distance par la tyrannie.
Au fond, il faudrait analyser à nouveaux frais toute la situation irakienne en cessant de prendre pour argent comptant ce que les politiques racontent dans de prétendus QG de la "résistance", alors que la société civile, malgré les exactions et les exils, tente non seulement de survivre mais de se développer, et je ne l’ai pas lu dans un magazine bushiste, mais docilement démocrate depuis que Fareed Zakaria, le rédacteur en chef de Newsweek, s’est aperçu que la création d’une démocratie ne se fait pas avec des fleurs et qu’il existe des forces hostiles qui font tout pour l’empêcher. Zakaria fait partie de ces gens qui pensent qu’il suffit de vouloir le bien pour que rationnellement les acteurs, convaincus, le réalisent. C’est là une vue de l’esprit, mais au moins Zakaria a-t-il le courage de mettre un reportage contredisant son pessimisme dans son journal ; qui serait capable de faire cela en France ?
(1) Iris Canderson est rédactrice en chef de http://www.resiliencetv.fr