Soyons Francs...ou Gaulois ?
par olivier cabanel
mercredi 22 août 2018
Nos ancêtres les Gaulois, affirment les livres d’histoire... mais alors, pourquoi sommes-nous appelés français, plutôt que Gaulois ?
Comment tout cela a commencé ?
Il faudrait donc tirer un trait sur Alésia et Vercingétorix pour comprendre comment nous en sommes arrivés là, car finalement, si la France a pris ce nom, elle ne le doit pas au célèbre chef gaulois, mais surtout à une certaine Clotilde.
Bien sûr, officiellement, la France devrait son nom à son premier roi, le mérovingien Clovis, lequel avait épousé une blonde d’origine scandinave, Clotilde, qui lui avait donné 4 enfants, Clotaire, Childebert, Clodomir, et une fille, Clotilde, dit « la jeune » appelée aussi Chrothieldis, ou Chrothilda.
Sous le règne de Clovis, ce qui allait s’appeler plus tard la France était divisé en deux clans, les Francs Ripuaires, du côté du Rhin, et les Francs Saliens, plutôt centrés sur la Belgique et la Hollande, dont Clovis était le roi, et, s’il faut en croire l’historien André Trabet, entre ses alliances et ses victoires, Clovis parvint à dominer l’ensemble des tribus qui occupaient une grande partie du territoire de la France actuelle.
Revenons un peu en arrière...
A la fin du 5ème siècle, Vienne était incorporé au royaume des Burgondes et son roi, un certain Gondebaud, n’était pas un tendre : il avait, entre autres, assassiné ses frères, Gondemar et Chilpéric II, roi de Lyon.
Il avait par contre épargné les 2 filles de Chilpéric, dont Clotilde, laquelle allait devenir l’épouse de Clovis.
Comme on le voit, l’unité du royaume de France était loin d’être une réalité.
On sait que Clotilde, très catholique, poursuivait le but de convertir son roi de mari à sa religion, et lors d’une bataille que Sigibert, allié de Clovis, menait contre le redoutable Alaman Chonodomar, Clovis s’étant engagé à devenir catholique, si le Dieu de Clotilde lui donnait la victoire...
Il fut vainqueur, mais attendit tout de même 3 années avant de tenir parole, et c’est ainsi que lors de son baptême, fut établi l’alliance de la royauté Franque, avec l’église catholique, alliance qui ne sera dissoute qu’en 1905, par la loi de séparation de l’église et de l’état, loi dont manifestement nos chefs d’état récents n’ont pas encore pris la mesure.
Dès lors, Clovis multiplie les victoires, franchit la Loire, tue de ses mains le roi Wisigoth Alaric II, allié des auvergnats... puis ira encore plus au Sud, jusqu’à Toulouse qu’il prendra en 508, faisant de Paris sa capitale, définissant ainsi l’ombre du contour de ce qui allait s’appeler France.
En résumé, Allié avec les burgondes, il est victorieux des Gallo-Romains, à Soisson..., des Wisigoths à Vouillé, et plus tard, des Alamans à Tolbiac. lien
Mais rien n’était fait...
Au décès de Clovis, Clotilde se retira à Tours, et pour mieux assoir le domaine Franc, envoya ses fils combattre Gondebaud, le burgonde roi de Vienne... elle n’avait pas oublié les crimes que ce dernier avait commis en tuant Chilpéric, son père.
les 4 fils de Clovis
L’esprit de vengeance qui animait Clotilde continua en effet après la mort de son époux, et s’exerça même après la mort de Gondebaud, en 516, contre les fils de celui-ci, Sigismond et Gondemar. lien
D’après Grégoire de Tours, elle aurait déclaré à ses fils « que je n’aie pas à me repentir, mes très chers enfants, de vous avoir nourris avec tendresse, partagez le ressentiment de mon injure, et mettez vos soins à venger la mort de mon père et de ma mère ». lien
Et c’est en réalité à Vézeronce, un petit village du Nord-Isère, que la bataille eut lieu, entre Francs et Burgondes, un certain 25 juin 524, bataille finalement emportée par les fils de Clotilde, dont Clodomir, même si celui-ci y trouva la mort, permettant ainsi, 10 ans plus tard, la réalité du royaume de France...
Clodomir
Les avis sont partagés sur l’issue de la bataille, certains donnant même la victoire au camp Burgonde, mais toujours est-il qu’au fur et à mesure des batailles qui suivirent, c’est le camp Franc qui l’emporta.
Si l’on fouille un peu plus dans le détail, la réalité est moins rose, et l’on s’aperçoit que la naissance de notre pays est pour le moins sanglante.
La douce Clotilde ayant pris sous sa protection Thibaud et Gonthier, les deux enfants de Clodomir, puisque ces derniers avaient perdu leur père, se trouva face à une cruelle alternative : Childebert, jaloux de ces 2 enfants, complota avec son frère Clotaire pour les faire disparaitre...
Après les avoir capturé, il envoya un émissaire à sa mère en lui proposant cette alternative : « voulait-elle qu’ils vécussent avec les cheveux coupés, ou qu’on les étranglât tous les deux ? ».
« S’ils ne doivent pas être élevés sur le trône, je préfère les voir morts que tondus »... répondit Clotilde.
Ils avaient 7 et 10 ans...et ils furent donc exécutés sans le moindre état d’âme, ni de leur protectrice, ni de leurs oncles...
Clotaire et Childebert avait un demi-frère, un certain Thierry, que Clovis avait eu de son 1er mariage, et celui-ci n’était pas un tendre non plus : jaloux de Clotaire, il tenta de le tuer lors d’une expédition...lien
Mais revenons à la bataille de Vézeronce.
Capturé par les Burgondes, Clodomir sera décapité, et sa tête sera exposée à la vue de tous.
Les corps de tous les soldats des 2 camps auraient été entassés dans un site au nord-ouest du village, et recouvert de terre, au lieu-dit « Mollard Coyne ». lien
D’autres pensent qu’il s’agirait du tombeau de Clodomir.
En tout cas, c’est bien au Nord-Est de ce village, dans les marais de St Didier, qu’en 1872, un paysan trouva un casque de guerrier, qu’il utilisa d’abord pour abreuver ses poules... avant de le vendre à un brocanteur pour 2,50 Fr... Lequel le revendit à un certain Mr Bron, de Nivolas-Vermelle, qui le céda au Musée de Grenoble. lien
Affirmer que ce casque est bien celui de Clodomir serait présomptueux, mais il faut ajouter qu’il n’était pas banal : en fer et cuivre ciselé, portant des traces de dorure, on y voyait gravé sur le bandeau des oiseaux, des grappes de raisins, une croix, autant de symboles chrétiens. lien
Ce casque trône aujourd’hui dans le musée dauphinois de Grenoble. lien
Étonnant que malgré toutes ces rancœurs, ses assassinats entre proches, le royaume ne se soit pas disloqué...
Etonnant aussi que le rôle de l’épouse de Clovis, soit si peu médiatisé, aujourd’hui encore, tout comme celui de Vézeronce, village dans lequel existe encore un tumulus, sans la moindre protection, régulièrement pillé, et encore plus surprenant qu’aucune fouille officielle n'ait été réalisée sur ce site, alors que c’est bien là que la France est pratiquement née. lien
En effet, c’est bien à Clotilde, animée par sa tenace vengeance, que la France a pris le contour que l’on connait, pas si éloigné de celui d’aujourd’hui, grâce à la victoire de ses fils sur ceux de Gondebaud.
Récemment, quelques citoyens de Vézeronce, amateurs probablement d’histoire, ont décidé, en 2011, de faire revivre la légende de Clodomir, en organisant un festival tous les étés...même si le journal local, le « Dauphiné Libéré » en l’occurrence, a commis une grosse bourde.
En annonçant la manifestation, le journal a fait de Clodomir le père de Clovis ! lien
Comme dit mon vieil ami africain : « le soleil qui brille n’ignore pas un village parce qu’il est petit ».
Le dessin illustrant l’article est de Todd Lockwood
Merci aux internautes pour leur aide précieuse
Olivier Cabanel
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