Une licence libre pointe le bout de CeCILL

par Baptiste Pailleux
mercredi 6 décembre 2006

Trois institutions publiques en France ont décidé de proposer une solution a un problème qui a trait au logiciel libre en France. Le CEA, le CNRS et l’INRIA veulent donner un cadre precis d’application du concept de « copyleft » pour les administrations.

Le logiciel libre est un concept qui n’a pas attendu que l’informatique se développe et se vulgarise pour faire son chemin. On aperçoit déjà les primitives et vétustes traces de cette idée dans les années 80. Elle exprime le droit de disposer d’un programme avec un certain nombre de libertés...
La possibilité d’utiliser, de modifier et de distribuer ce programme, par exemple, sans la nécéssité d’en être l’auteur ; et à la condition que ce dernier l’ait placé sous l’égide d’une licence de logiciel libre.
GNU Linux et Mozilla Firefox sont deux exemples de l’attrait pour les noms animaliers (« gnu » signifie « gnou » et « fox », « renard ») de la communauté du logiciel libre, certes. Mais ce sont aussi deux exemples de logiciels développés sous une licence de ce type.

La plus répandue porte le nom fort esthétique de GNU General Public Licence. Elle se caractérise par la subtile parodie nommée « copyleft », qui, justement, s’émancipe du cadre du copyright en accordant les droits cités précédemment à qui souhaite distribuer un tel programme, a la condition de fournir le code source de celui-ci.


Ainsi, sur cette planète, une communauté de développeurs se meut, foisonnante, et produit de tels logiciels généralement sans finalité commerciale ni retour financier, et pourtant tout à fait fonctionnels.
Et des entreprises, aussi bien que des institutions et des particuliers, profitent (a priori sans mauvaise pensée) du phénomène.

Mais voilà, peut-on se demander, cela ne porte-t-il pas frugalement atteinte aux pouvoirs légitimes qu’un auteur doit posséder sur sa création ? Comment protéger ses droits dans un tel contexte ? Même si, heureusement, il a libre choix de la licence qu’il appose sur le résultat de son labeur.
Eh bien justement, une partie de la division judiciaire (si ce n’est judicieuse) des pouvoirs français pose cette question, et la pose durement. Cette licence pourrait contredire un principe maître du Code de la propriété intellectuelle, celui qui rend inaliénable le contrôle de la divulgation par l’auteur, et son pouvoir de rétractation, entre autres droits patrimoniaux.
Dès lors, l’application de la Licence Publique Générale GNU devient problématique.

C’est la que nos trois paladins du libre dans la recherche française interviennent. Nombre d’acteurs de ces institutions utilisent et développent des logiciels libres, pour leur propre usage en général, et avant de les partager. Directement confrontés à la question juridique de la GNU GPL, ils ont créé CeCILL. Une licence française, libre, 100% pur porc, qui prétend remplir des objectifs de sécurité juridique et de garantie de son application pour les logiciels qu’elle couvre. Cet acronyme non dénué de charme est issu des noms des trois fondateurs : Ce(a)C(NRS)I(NRIA)L(ogiciel)L(ibre).

Un reproche pas tout à fait calomnieux a été fait à cette licence encore débutante (diffusée depuis le 5 juilllet 2004), concernant sa compatibilité avec d’autres licences libres (notamment la GNU GPL, évidemment), dans le cas de mélange de codes aux licences diverses (qui est plus fréquent qu’on ne le croit).
La question a été efficacement balayée par la sortie d’une seconde version au printemps de l’année dernière, qui donne simplement primeur à la GPL en cas de concurrence. On notera aussi que dans la continuation de sa politique de compatibilité avec les licences internationales, CeCILL sait couramment parler anglais dans une version traduite.

De quoi former une base solide pour laisser naître deux petites soeurs en juin 2006 : la CeCILL-B, qui reprend les principes des licences de type BSD (c’est-à-dire la possibilité de réutilisation d’un logiciel sans contrainte à condition de faire référence « abondamment » à l’auteur original), et la CeCILL-C, qui s’applique aux composants (indépendants ou non) d’un logiciel.
Des initiatives qui titillent modestement quelques fils de débat sur différentes conceptions actuelles des droits d’auteur (DADVSI ou autre), certes un peu tassés.

Déclamons-le sans risque désormais, le choix du logiciel à code ouvert en France, CeCILL limpide !


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