Quelques leçons simples d’une situation compliquée
par Marie-Noëlle Lienemann
vendredi 14 avril 2006
Ouf, Berlusconi est battu. Mais les résultats serrés amènent à quelques leçons qui, au-delà de la situation italienne, méritent d’être retenues :
- Une fois de plus, les sondages se sont trompés et largement. Et cela va toujours dans le même sens, à savoir une totale incapacité de prendre en compte la réalité du vote populaire.
- Le rassemblement de toute la gauche, sans exclusive a priori en direction de l’extrême gauche, a été nécessaire pour gagner. Imaginez le résultat s’il y avait eu la moindre division à gauche.
- C’est à gauche que s’est réalisée la dynamique victorieuse : ce sont les partis comme rifondazione communiste, l’autre dissidence communiste et le nouveau parti laïc qui ont été en très forte progression, tandis que le PDS, membre de l’Internationale socialiste, ou les groupes de centre gauche, stagnent. Primo, quand les partis classiques de gauche n’ont pas un discours, une pratique et des propositions suffisamment offensives, ils laissent un espace énorme à d’autres à leur gauche ; secundo, c’est avec des choix de « ruptures » avec le libéralisme généralisé qu’on peut tenir tête aux poussées idéologiques de la droite. On pourra noter que, de même, en Allemagne, le vote à la gauche du Parti socialiste était fort. D’ailleurs si le SPD l’avait voulu, il y avait une majorité de gauche contre Angéla Merkel. Il a choisi la grande coalition... C’est d’ailleurs ce qu’a tenté d’imposer Berlusconi. La coalition de gauche italienne tient bon. Espérons que l’étroitesse du score ne donnera pas de mauvaises idées à certains...
- En dépit de ses provocations grossières, Berlusconi a rassemblé presque la moitié des voix. Comme Georges Bush, il s’en est tenu à la défense de valeurs fortes, de droite, libérales et néoconservatrices. Une réponse programmatique complexe et modérée n’arrive pas à convaincre suffisamment les couches populaires.
Si la victoire de la gauche est si étriquée, alors que la croissance économique est quasiment nulle, que l’engagement en Irak a été massivement désapprouvé, c’est que l’alternative n’était pas assez convaincante sur le fond idéologique. Il y a urgence à redonner des couleurs au progressisme et aux idées socialistes, partout en Europe.