Les salariés de Poly Implant Prothèses déterminés

par Fred83
mercredi 21 avril 2010

 Il n’a pas été dur de trouver le siège de Poly Implants Prothèses (PIP). Il a suffit pour cela de suivre l’épaisse fumée noire qui s’élève dans le ciel de la Seyne-sur-mer alimenté en permanence par les employés.

Les locaux sont couverts par des banderoles. « Les gros se sont gavés et les petits ont trinqué » dit l’une d’entre elles. Par dessus le portail, nous interpellons quelques salariés regroupés dans l’entrée et l’un d’entre eux vient nous ouvrir. Vite rejoins par deux autres de ses camarades. Nous leur expliquons être des citoyens inquiets de leur situation et voulant faire connaître leur situation.

Ils nous présentent donc la société.

PIP est une entreprise créée en 1991 spécialisé dans la création d’implants mammaires. Au milieu des années 2000, la société était la n°3 mondial du secteur et réalisait 80% de son chiffre d’affaires hors Union Européenne, donc en dollars. La baisse de la valeur du dollar ainsi que l’arrivée sur le marché de concurrents asiatiques aux produits certifiés CE ont lentement fait plongé la marge et le chiffre d’affaires de l’entreprise. Les difficultés rencontrées avaient déjà conduit à un premier plan de sauvegarde qui avait décidé du licenciement d’une trentaine de salariés en 2009. Cela n’a pas suffi et les conditions s’aggravant, une procédure de liquidation judiciaire a été lancée. Les 97 employés restants sont sur le carreau.


Dit comme ça, PIP a l’air d’une société comme les autres, une PME française subissant la mondialisation sans avoir les moyens d’y faire face. Mais en grattant un peu...

Dès le début des années 2000, la direction a remplacé le gel de silicone par une autre formule à l’insu des clients et des médecins. La formule a été présentée aux cadres et aux employés comme ayant été analysée en laboratoire et ayant les mêmes propriétés que le gel d’origine. Bien évidemment, les tests n’ont jamais eu lieu et une enquête en cours de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (afssaps) a montré que les implants réalisés à partir de cette formule avait un taux de rupture deux fois supérieurs aux implants classiques.

Cette enquête a précipité la décision de mise en liquidation judiciaire. Lorsqu’on demande aux employés comment est-ce qu’ils ont participé à cette procédure et comment s’est déroulé le dialogue, ils nous répondent qu’il n’y a pas eu de dialogues, qu’ils ont appris la mise en liquidation après sa prononciation la 31 mars 2010.

A partir de cette date, plus aucun salaire ne sera versé et ceux jusqu’à leur prise en charge par l’état qui n’interviendra pas avant Juillet (dans le meilleur des cas). 3 mois sans salaires, sans revenus, sans rien. Il y a des familles complètes qui travaillent ici – père, mère et fille – qui devront jusqu’à l’été compter sur la solidarité de leurs proches et de leur camarade. Inutile de préciser qu’aucun membre de la direction n’est depuis venu les voir et s’inquiéter de leur sort.

Tout cela explique pourquoi « les petits ont trinqué » est inscrit sur la banderole. Mais pourquoi « les gros se sont gavés » ? Les réponses pleuvent en cascade. Déjà les employés soupçonnent la dernière direction d’avoir volontairement laissé couler l’entreprise. Elle n’aurait rien fait pour, par exemple, recouvrir certaines factures impayées et des factures auprès de fournisseurs n’auraient jamais été réglées rendant l’approvisionnement incertain. Les salaires perçus par la direction étaient à la limite de l’indécence. Comment peut-on se verser un salaire de 12000€ quand on est en train de procéder au licenciement d’une centaine de smicards ? Interrogé sur l’intérêt de laisser plonger une société capable de leur verser un si gros salaire, la réponse vient comme une évidence : les avantages de l’exonération fiscale et de la zone franche arrivaient à terme...
 
Julien
www.alterjournaliste.fr
 

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