7 octobre 2023 : l’hommage aux victimes françaises

par Sylvain Rakotoarison
vendredi 5 avril 2024

« Les visages des suppliciés du 7 octobre nous tendent un miroir où se reflète un peu de nous, dans chacun d'eux. De ce que nous étions, de ce que nous serons à leurs âges, de ce qu'ils ne seront jamais. (…) Leurs visages sont là, comme autant de vies interrompues. Des histoires de famille où s'entrebâillait parfois un gouffre indicible et où, comme l'odeur de l'espérance, le parfum des collines de Jérusalem se mêlait à celui des sous-bois d'Île-de-France ou des ruelles du Vieux-Port. » (Emmanuel Macron, le 7 février 2024 à Paris).

Dans quelques jours, ce sera le 7 avril 2024, dimanche prochain. Cela fera six mois que les terroristes islamiques du Hamas ont torturé, violé et massacré plus d'un millier de personnes en Israël. Ce massacre du 7 octobre 2023 restera dans l'histoire d'Israël comme une faille béante de la sécurité de ce pays si détesté par certains pays musulmans. Les assaillants ont aussi enlevé des centaines de personnes dont certaines ont été "exécutées" et dont les corps n'ont pas été encore restitués, ou d'autres sont encore retenues en otages depuis six mois avec cette inquiétude sur leur sort.

La riposte de l'armée israélienne depuis six mois est également terrible, à l'image de cette horreur, tuant jusqu'à plus de 30 000 personnes à Gaza selon l'organisation terroriste. L'objectif est d'éliminer tous les terroristes du Hamas qui menacent matin midi et soir le peuple israélien depuis des dizaines d'années. Qui veulent le détruire par antisémitisme viscéral. De nombreux innocents ont péri à cette occasion, des femmes, des enfants, et aussi des bénévoles d'organisations humanitaires (le gouvernement d'Israël a même présenté des excuses pour l'un des derniers bombardements qui était, selon lui, une "erreur").

Mais il faut revenir aux fondamentaux. Israël ne fait que riposter à une agression massive du Hamas. C'est le Hamas l'agresseur et il savait très bien quelles allaient être les conséquences des assassinats qu'ils ont commis. Ils savaient que c'est le peuple palestinien qui en serait la première victime et les terroristes du Hamas, dans une sorte de suicide collectif, sont dans la violence totale, gratuite, certains si heureux de faire dans la cruauté (jusqu'à se filmer fiers de tuer des Juifs).
 

Je reviens sur l'hommage que la France a fait aux 42 victimes françaises du 7 octobre 2023. Cela s'est passé le 7 février 2024 dans la cour d'honneur des Invalides à Paris sous la présidence du Président de la République Emmanuel Macron (on peut revoir la cérémonie et lire le texte intégral de l'hommage à ce lien).

Évoquons rapidement le sujet des hommages nationaux. Emmanuel Macron ferait-il trop d'hommages nationaux ? C'est un peu dérisoire comme polémique, tout est bon pour critiquer. D'une part, le Président ne fait pas que cela, et on le sait très bien puisqu'on le critique pour de nombreux autres sujets de son action. D'autre part, la France a le droit voire le devoir d'honorer ses citoyens qui l'ont servie ou qui ont contribué à son rayonnement, ou encore qui méritent tout le soutien de la Nation, comme c'est le cas pour toutes les victimes des attentats. On ne reproche pas aux familles d'organiser des funérailles de leur membre. C'est pareil pour la France, grande famille nationale qui honore dignement ses plus dignes représentants. J'attends aussi un hommage aux victimes de la pandémie du covid-19 (par exemple, cet ami très cher, un prêtre, aumônier d'un CHU, qui a perdu sa vie il y a maintenant déjà quatre ans pour être resté auprès de malades qui allaient mourir). C'était la guerre, avait-il dit et bien des personnes sont mortes sur ce front si soudain et si nouveau.

Du reste, sur ces tristes victimes du 7 octobre 2023, on a plutôt critiqué l'absence d'hommage national et les familles ont attendu longtemps, quatre mois, pour avoir l'expression de notre solidarité nationale. C'était beaucoup trop long. On a expliqué que le nombre et l'identité des victimes n'étaient pas encore tout à fait connus, qu'il a fallu attendre pour avoir une idée bien précise de ceux qui sont morts, ceux qui ont été pris en otages, et les autres, traumatisés à vie, traumatisés à mort.

On a aussi critiqué en expliquant que l'hommage n'était rendu qu'aux seules 42 victimes françaises, et pas au plus d'un millier de victimes que ce massacre a faites. Là aussi, il est de tradition que chaque communauté nationale s'occupe de ses morts, comme c'est le cas de chaque famille. Mais je ne doute pas que les autres victimes qui n'étaient pas françaises ont été bien entendu associées à cet hommage aux Invalides, et même les victimes de Gaza : « Leurs destins ne sont pas les seuls que le déchirement du Moyen-Orient continue de broyer dans cette tornade de souffrance qu'est la guerre. Et toutes les vies se valent, inestimables aux yeux de la France. Et les vies que nous honorons aujourd'hui sont tombées, victimes d'un terrorisme que nous combattons sous toutes ses formes et qui nous a frappés en plein cœur. La France, recueillant ses enfants, parmi d'autres de ses enfants, dont elle n'oublie aucun, refusant les séparations, comme les divisions, refusant l'esprit de mort, de chaos et de clivages que nourrissent précisément les terroristes. Jamais en nous, nous ne laisserons prospérer l'esprit de revanche. ». C'est la phrase essentielle : « Toutes les vies se valent, inestimables aux yeux de la France. ».
 

Condamnant ce qu'il a appelé « le plus grand massacre antisémite de notre siècle », Emmanuel Macron a tout de suite replacé le contexte humain : « Dans les notes de musique d'un lieu de fête ont éclaté les tambours de l'enfer. Et les téléphones de nos enfants, qui jusque-là filmaient les joies de leur vie, sont devenus les boîtes noires de l'horreur. Elles nous hanteront, ces images. Le ciel livide qui se zèbre de missiles. Les brigades infernales qui écument le Festival se répandent dans les plaines, puis dans les villages, fracassent les portes, font irruption dans les foyers, dans les chambres, sous les lits. Les déflagrations, les cris de “Massacrons les Juifs”, les grenades, les hurlements, les pleurs, puis le silence, comme un linceul. Le silence face à l'indicible. La sidération face à la sauvagerie. Les larmes face à la barbarie. ».

Et de poursuivre toujours plus dans le tragique : « La barbarie. Celle qui brûle et qui brise, qui abuse et qui tue. Celle qui déchire les familles, abat une petite fille parce qu'elle ralentit la colonne, happe sur son chemin un enfant en pyjama, en tue un autre au creux même des bras de son père. Celle qui nie la joie, l'art, la culture, la liberté de la fête. Et nos cœurs se serrent aux échos du Bataclan, de Nice ou de Strasbourg. La barbarie. Celle qui fauche cette jeunesse à peine éclose, qui ravage ces kibboutz, souvent forts de convictions pacifistes, prêts à entendre la souffrance palestinienne que les terroristes ont piétinée en prétendant la défendre. La barbarie, celle qui se nourrit d'antisémitisme et qui le propage. Celle qui veut annihiler, détruire et qui pourtant ne peut empêcher des rayons de lumière au milieu de la nuit. Les messages d'adieu de ces jeunes qui savent qu'ils vont mourir et qui envoient à leurs parents une dernière expression d'amour et de gratitude. Cet homme qui s'interpose entre l'explosion d'une grenade et ses deux enfants, sauvant leurs vies, au prix de la sienne. Et le sacrifice de cet autre père qui n'était pas sur les lieux de l'attaque et qui, quand il a reçu l'appel de sa fille prise sous le feu des tirs à Nova, a sauté dans sa voiture pour aller la chercher, allant au-devant de la mort. ».


 

Face à tant de détresse, le chef de l'État a voulu exprimer une note d'espérance : « Ceux qui tuent par haine trouveront toujours face à eux ceux qui sont prêts à mourir par amour. Et toujours, ils verront s'élever contre eux notre pays qui, ce 7 octobre, a été touché dans sa chair. ». En précisant : « Dans ces moments de deuil, dans les épreuves du temps, rien jamais ne doit nous diviser. La France restera unie pour elle-même et pour les autres. Unie pour se tenir au-delà des destins et des différences, au sein de notre nation. Unie dans ces moments de souffrance pour les Israéliens et les Palestiniens, afin d'œuvrer sans relâche pour répondre aux aspirations à la paix et à la sécurité de tous au Proche-Orient. ».

Déterminé, ferme, insistant, le Président de la République a fait de la lutte contre l'antisémitisme un combat universel pour les valeurs : « Nous avons, dès lors, à habiter ce deuil, non pas comme une victoire de la mort mais comme une invitation à leur trouver une place dans nos vies. Et ils sont là, chacune et chacun, pour nous rappeler que nos vies, leurs vies, méritent sans relâche de nous battre contre les idées de haine, de ne rien céder à un antisémitisme rampant, désinhibé, ici comme là-bas. Car rien ne le justifie, rien. Car rien ne saurait justifier, ni excuser ce terrorisme, rien. Alors, nous nous tenons là, quatre mois après, devant ces visages et ces chaises vides, bouleversés de tristesse, aux côtés des familles de ceux qui ne sont plus, chargés d'affection aux côtés de ceux qui soignent leurs blessures et ne cédant rien pour ramener ceux qui sont encore là-bas. Sentiments mêlés que nous vivons ensemble, debout. ».

Face à toutes ces horreurs, on aimerait dire "plus jamais cela", mais on sait que l'âme humaine est ce qu'elle est, avant tout contrastée, que la noirceur peut parfois l'emporter sur les forces de vie, et, surtout, que cette noirceur peut s'installer partout, soudainement, en Ukraine comme à Moscou. Il faut de l'amour pour croire en l'espérance. Et de la foi.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (02 avril 2024)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
7 octobre 2023 : l'hommage aux victimes françaises.
Discours du Président Emmanuel Macron en hommage aux victimes du 7 octobre 2023 aux Invalides le 7 février 2024 (texte intégral et vidéo).
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La naissance de l’État d’Israël.
David Ben Gourion.
Gaza : quel est l'accord entre Israël et le Hamas ?
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