Voyage vers l’Orient : le caravansérail...
par rosemar
jeudi 25 mars 2021
"Le caravansérail est formé d'une cour immense entre quatre murs. Sur deux faces, une galerie couverte pour les chevaux ; aux quatre angles, une chambre pour les voyageurs." Voilà la description d'un caravansérail que fait Eugène Fromentin, dans son récit de voyage, intitulé Un été au Sahara...
Le mot "caravansérail" nous éblouit avec ses cinq syllabes, ses sonorités variées et contrastées de gutturales, de fricative, de sifflante, sa voyelle "a" répétée... Le mot nous laisse entrevoir un long cortège de voyageurs, une colonne de nomades dans le désert, des chameliers, des oasis enfin retrouvées...
Il nous étonne par ses échos, ses redondances : terme rare, réalité perdue et lointaine, le caravansérail nous emporte vers un orient mystérieux, des déserts arides, des paysages inondés de soleil et de lumières.
Composé de deux mots exotiques, ce terme oriental désigne une vaste hôtellerie, où logent des caravanes, des voyageurs et des bêtes de somme.
Le terme "caravan"" est issu du persan "karvan" et s'applique à un groupe de voyageurs, le nom "sérail" vient du turc "saray" qui évoque un palais, une grande maison, une cour...
Lieu d'échanges, lieu de rencontres et de repos, le caravansérail est l'image même d'une sorte de halte, d'apaisement après un long voyage dans le désert...
Ce mot suscite le rêve, le dépaysement, l'immensité des paysages désertiques...
Il suggère de grandes demeures orientales, des décors simples ou plus somptueux, des façades blanches, des ciels, des oasis irradiés de luminosité.
Le désert et ses mystères, ses éblouissements, du sable à perte de vue, des ondoyances de dunes....
Des ciels d'une immensité étoilée, des couleurs chatoyantes de sable doré, roux, blanc, des vaguelettes sur les dunes, des éclats d'ocre...
Le caravansérail est, aussi, un hâvre de paix, de bonheur : après une longue marche dans le désert, on peut s'y reposer, se détendre, évoquer ses voyages.
Mot à la fois apaisant et plein d'exotisme, le caravansérail résonne de sonorités poétiques, éclatantes de mystères et d'étrangeté...
Voilà un mot peu commun qui séduit l'imagination : lié à des paysages lointains, à la magie de l'orient, le caravansérail nous attire, nous donne envie de partir à l'aventure... de découvrir de nouveaux horizons...
Le caravansérail nous offre des promesses : des paysages étonnants aux teintes contrastées, la solitude d'un monde encore intact.
C'est ce monde que décrit Eugène Fromentin, dans son récit de voyages, il évoque notamment les ciels algériens avec une poésie et une délicatesse dignes d'un peintre :
"Le soleil allait se coucher et dorait, empourprait, émaillait de feu une multitude de petits nuages détachés du grand rideau noir étendu sur nos têtes, et rangés comme une frange d'écume au bord d'une mer troublée. Au delà commençait l'azur ; et alors, à des profondeurs qui n'avaient pas de limites, à travers des limpidités inconnues, on apercevait le pays céleste du bleu. Des brises chaudes montaient, avec je ne sais quelles odeurs confuses et quelle musique aérienne, du fond de ce village en fleurs ; les dattiers, agités doucement, ondoyaient avec des rayons d'or dans les palmes ; et l'on entendait courir, sous la forêt paisible, des bruits d'eau mêlés aux froissements légers du feuillage, à des chants d'oiseaux, à des sons de flûte. En même temps un muezzin, qu'on ne voyait pas, se mit à chanter la prière du soir, la répétant quatre fois aux quatre points de l'horizon, et sur un mode si passionné, avec de tels accents, que tout semblait se taire pour l'écouter. Le lendemain, même beauté dans l'air et même fête partout. Alors, seulement, je me donnai le plaisir de regarder ce qui se passait au nord du village, et le hasard me rendit témoin d'un phénomène en effet très singulier. Tout ce côté du ciel était sombre et présentait l'aspect d'un énorme océan de nuages, dont le dernier flot venait pour ainsi dire s'abattre et se rouler sur l'extrême arête de la montagne. Mais la montagne, comme une solide falaise, semblait le repousser au large ; et, sur toute la ligne orientale du Djebel-Sahari, il y avait un remous violent exactement pareil à celui d'une forte marée. Derrière, descendaient lugubrement les traînées grises d'un vaste déluge ; puis, tout à fait au fond, une montagne éloignée montrait sa tête couverte de légers frimas. Il pleuvait à torrents dans la vallée du Metlili, et quinze lieues plus loin, il neigeait.
L'éternel printemps souriait sur nos têtes."
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