Réchauffement climatique : phénomène naturel ou provoqué par l’homme ?

par maamar farah
mardi 6 février 2007

Au début, nous pensions tous que l’été indien, ce long intervalle qui prolonge la belle saison au-delà des limites imposées par le calendrier, allait faire quelques embardées supplémentaires, piétinant les plates-bandes de l’automne, avant de s’essouffler sur les premières pentes de novembre. Mais non ! L’été indien, plus vigoureux que jamais, pousse, pousse. Décembre, janvier et peut-être plus encore. Le retour des pluies et neiges ? Elles manquent visiblement de régularité et de consistance pour nous rassurer.

C’est ainsi que les records de chaleur ont été enregistrés partout. Les arbres de Central Park ont fleuri bien avant le printemps, alors que les noisetiers bourgeonnent en Russie, où l’on n’en croit plus ses yeux : les ours sont devenus insomniaques et la douceur inhabituelle pour ce pays de grand froid dérègle toutes les habitudes ! La neige est vraiment rare et les thermomètres enregistrent les températures les plus élevées depuis 1879. En France, Lille a un climat de Côte d’Azur et Marseille flirte avec le Sahara.

Les météorologues sont désorientés. Ils font appel aux climatologues pour nous expliquer un phénomène qui doit être sérieusement étudié, et pas seulement « traduit » au jour le jour pour les profanes que nous sommes, à partir des cartes satellites. Il y a un dérèglement sérieux, c’est sûr ! Ce ne sont pas les habituelles surprises du dimanche, ni les petites perturbations que l’on accueille avec le sourire : il y a un problème assez grave et il nous faut plus qu’un bulletin météo pour en saisir toute la complexité.

Les années les plus chaudes depuis 1850

En effet, si le météorologue interroge le ciel pour nous dire s’il va faire beau ou mauvais le lendemain, il est incapable de nous donner des explications satisfaisantes sur le long cours. Bien sûr, nos météorologues ont tendance à nous rassurer. C’est l’anticyclone des Açores... Oui, pas de doute. Cet anticyclone est devenu aussi populaire que n’importe quelle marque de lessive. Ou alors, l’air glacial provenant du pôle Nord a été stoppé dans sa progression vers l’Europe. Habituellement, il se baladait sans problème ; mais, cette année, il a dû attraper un rhume et s’est retrouvé au lit... El Niño. Qui ne connaît pas El Niño, petit bambin joufflu comme un cumulus, léger comme un zéphyr, mais méchant comme une vague d’ouragan. Non, ce n’est pas El Niño... Et puis, il faut faire vite avant la pub et le journal ! Conclusion optimiste : l’hiver va recouvrer ses droits très bientôt.

Mais si, effectivement, pluies et neiges de « saison » nous réconcilient avec monsieur Hiver, faisant oublier à certains le scandale d’un Noël sans flocons blancs, des spécialistes anglais nous prédisent une année 2007 plus chaude encore que tout ce que nous avons vu cette décade et la précédente ! Une vérité déjà : dix des douze dernières années sont les plus chaudes depuis 1850.

Les glaciers des Alpes disparaîtront d’ici 2050 !

Et puis, il y a les tempête, habituelles pour la saison, mais particulièrement violentes et meurtrières cette fois-ci, comme celle qui a sévi il y a une semaine en Europe du Nord. Les météorologues relèvent la « longue durée » des vents qui ont accompagné cette tempête.

Par ailleurs, un phénomène inquiétant est en train d’alerter les experts en climat, mais aussi les écolos et les industriels du tourisme et des sports de montagne. Les glaciers sont en train de fondre d’une manière inquiétante. Selon une étude publiée ce lundi par l’agence de l’ONU pour l’environnement, 30 glaciers de référence ont perdu environ 66 centimètres d’épaisseur en moyenne en 2005. Mais la perte depuis 1985 est de l’ordre de 10,5 mètres ! Prévision des climatologues : les glaciers des Alpes disparaîtront d’ici 2050 !

En Afrique du Nord, le désert avance plus vite que prévu et les spécialistes prédisent que le Sahara gagnera une centaine de kilomètres dans quelques décades, installant sable et désolation sur une zone connue actuellement comme étant la steppe et les hauts plateaux. Autant dire que le Sahara sera aux portes de la Méditerranée dans certaines régions.

Cela fait longtemps que la presse aborde ces questions. Mais, préoccupés par des problèmes plus terre-à-terre, les humains ne prêtaient guère attention à ces constats alarmants, et encore moins aux avertissements des spécialistes nous invitant à limiter l’émission de certains gaz dits « à effet de serre » et à changer nos habitudes de vie.

Etats-Unis et Chine à l’index

Mais les experts n’arrivent pas à se mettre d’accord sur la cause de ces changements déroutants du climat. La politique, en s’invitant dans leur débat, les empêche de désigner le même coupable. Résultat : la communauté scientifique se divise en deux. Le premier camp affirme que le réchauffement, comme le refroidissement, sont des cycles naturels et que, si la Terre se trouve aujourd’hui dans une situation de redoux, ce n’est la faute de personne. Et de nous citer des phases similaires qui ont jalonné l’histoire de notre planète.

Le second camp est plus catégorique : il n’y a rien de naturel dans la dégradation actuelle. L’homme en est responsable. L’effet de serre qui fait pousser les températures et déstabilise les saisons est le résultat des émissions de gaz divers. Cela va des vapeurs dégagées par les activités industrielles au gaz carbonique de nos voitures, en passant par d’autres types d’émanations provenant des climatiseurs, des réfrigérateurs, et mêmes des petits bombes aérosol que nous utilisons quotidiennement.

Certains pays sont montrés du doigt. Parce qu’ils n’ont pas signé les accords de Kyoto - qui fixent les quotas d’émission de ces gaz par pays-, et aussi parce qu’ils ont l’industrie la plus développée. Les Etats-Unis d’Amérique apparaissent comme le principal pollueur de la planète. Mais il y aussi d’autres pays qui participent activement à la dégradation de la couche d’ozone et à l’effet de serre. Nous citerons, par exemple, la Chine qui, pour faire fonctionner son gigantesque parc industriel, a besoin d’énormes quantités de matières polluantes, à l’instar des produits énergétiques. Son taux de croissance époustouflant est l’arbre qui cache la forêt.

Engagements sérieux ou promesses en l’air ?

Il faut plus que l’alarmisme des climatologues pour gagner cette nouvelle guerre contre le réchauffement du climat, menace mortelle pour la Terre. L’implication des politiques est une nécessité absolue en ces temps où l’ultralibéralisme installe une forte mentalité de profit qui tourne le dos aux questions écologiques. Pourtant, les opinions paraissent plus sensibilisées que jamais par la cause de la nature. De par ses effets sur leur vie quotidienne, ce réchauffement n’est plus une vue de l’esprit ou un sujet réservé à l’élite scientifique.

Les pouvoirs politiques, très liés aux milieux industriels, ne sont pas connus pour être des adeptes de la protection de l’environnement. Pourtant, nous avons assisté, au cours des derniers jours, à deux événements qui en disent long sur la prise de conscience autour de ce phénomène :

- Le pavé dans la mare jeté par Nicolas Hulot dans la campagne pour les présidentielles d’avril 2007 a eu le mérite d’inscrire les problèmes écologiques au cœur du débat. On verra, sur le terrain, si les engagements actuels des candidats sont sérieux ou s’il ne s’agit que de promesses en l’air.

- Lors de son dernier discours sur l’Etat de l’Union, Georges Bush a étonné tout son monde en assurant qu’il allait s’engager dans une politique visant à réduire les gaz à effet de serre au cours des prochaines années. Sujet inhabituel dans les thèmes d’un président qui restera dans l’histoire comme le plus féroce défenseur des industries polluantes !

Au moment où les armes tonnent plus que jamais, avalant les centaines de milliards de dollars, il est scandaleux que les gouvernements concernés ne trouvent pas l’argent nécessaire pour la protection de l’environnement.

Le chemin est encore long. Mais puisse cet hiver déboussolé, -où les quatre saisons montrent parfois voir le bout de leurs nez en une seule journée-, donner à réfléchir aux décideurs. La planète bleue n’appartient pas seulement à notre génération. Elle est aussi le bien de nos enfants et de nos petits-enfants. Dans quel état allons-nous la leur léguer ? Réfléchissons-y tous ensemble et mobilisons-nous pour que les ours de Moscou puissent dormir en paix et que les saisons retrouvent leur cycle naturel.


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