Retour par la fenêtre ?
par Forest Ent
mardi 22 mai 2007
Le TCE, chassé par la porte, va-t-il revenir ?
M. Sarkozy avait mis dans son programme la promotion d’un "minitraité" européen qui serait ratifié par voie parlementaire. A peine élu, il a effectivement rencontré à ce sujet le président du Parlement, M. Pöterring. Ceci a permis d’apporter quelques clarifications.
Selon M. Sarkozy, ce "minitraité" devrait contenir au moins la première des trois parties du TCE. Selon M. Pöttering, il devrait contenir aussi la deuxième partie. Aucun des deux n’a exclu la troisième.
Mais il suffit ici de considérer que M. Sarkozy souhaite faire ratifier la partie 1 par voie référendaire. Cette première partie dit, en effet, dans son article 22 :
"Le Conseil des ministres exerce conjointement avec le Parlement européen les fonctions législatives et budgétaires.
Le Conseil des ministres statue à la majorité qualifiée, sauf dans les cas où la Constitution en dispose autrement".
A propos de ces derniers cas, ils figurent dans la partie 3. S’il n’y a plus de partie 3, le Conseil des ministres statuera toujours à la majorité. Comme c’est également le cas du Parlement, cela signifie que le pouvoir législatif européen reposera sur la majorité, qualifiée certes au 2/3 et 3/5, mais sans plus aucun droit de veto. Comme un traité s’impose aux lois nationales, cela signifie que la France aura définitivement abandonné sa souveraineté législative au profit de celle de l’UE, et ce sans aucune opposition possible d’aucun des pouvoirs nationaux.
Excusez du peu.
Il ne s’agit pas d’un détail renégociable. Le vote majoritaire était au contraire la motivation première et initiale du TCE.
Un texte qui a de telles conséquences ne requiert-il pas un nouveau référendum, comme l’avaient proposé a minima tous les autres partis ?
Le "non" au TCE avait été voté par référendum en 2005 avec une majorité de 55%, soit plus que celle qui a élu M. Sarkozy, qui a par ailleurs reçu un mandat de nature plus générale que celui-ci.
Quelles sont les raisons possibles à une procédure parlementaire ? On peut en imaginer plusieurs.
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On peut considérer qu’il n’y avait nul besoin en 2005 de passer par un référendum pour un texte soutenu par tous les partis. Mais cela a été fait, et a montré que l’opinion des partis sur ce point n’était pas celle du peuple français. Il serait dramatique de n’en pas tenir compte : les parlementaires ne sont que des représentants, et ils ne devraient pas pouvoir contraindre le peuple à abandonner une part déterminante de sa souveraineté malgré lui.
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On a pu dire que ce nouveau traité serait sans conséquences autres que "d’améliorer" le fonctionnement des institutions. On voit maintenant clairement que ce n’est pas le cas.
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On peut penser que le vote de 2005 était un vote sanction contre le gouvernement. Dans ce cas, ça tombe bien, car on vient d’en changer, et la popularité intacte du nouveau gouvernement serait une bonne opportunité pour donner une reconnaissance populaire à un texte d’une telle importance, et vérifier également la pertinence du mandat.
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On peut penser que ce nouveau texte serait certainement voté par les Français. Ce serait une raison de plus pour le faire.
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On peut penser que ce texte est trop technique pour un référendum. Les Français ne peuvent-ils donc comprendre qu’ils accepteraient de renoncer à toute possibilité d’opposition aux décisions européennes majoritaires ?
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On peut aussi penser que ce référendum se conclurait par un nouvel échec, dont il vaut mieux ne pas prendre le risque pour ne pas paralyser définitivement l’UE. Le risque de signer le traité sans le consentement de la nation est-il donc inférieur ?
Le droit de veto est actuellement le dernier rempart contre l’ultralibéralisme forcené dont fait preuve l’UE. Le supprimer serait sans doute agréable à tous les Bouygues et Lagardère qui entourent notre nouvel exécutif, mais les pires craintes que l’on pouvait avoir sur le quinquennat Sarkozy se trouveraient toutes immédiatement vérifiées.