Ce que cache (ou révèle) l’affaire des caricatures danoises...

par Daniel RIOT
jeudi 9 février 2006

Nous l’avons souligné voilà plusieurs jours déjà : les flambées anti-européennes déclenchées par le « prétexte » des caricatures danoises (qui remontent au 30 septembre) sont soigneusement orchestrées par cinq « chefs » de « lignes » ou de « réseaux » qui annoncent en fait un durcissement généralisé des plus durs des « islamistes » et de régimes « arabes » qui ne sont alliés que temporairement, et d’une manière complètement artificielle.

  1. Le Djihad islamique, qui vient de se démarquer du Hamas en excluant toute trêve de longue durée avec Israël et toute participation au gouvernement que sera appelé à former le mouvement islamiste victorieux des élections législatives palestiniennes du 25 janvier.
  2. Les dirigeants iraniens et syriens, pris au piège de leur activisme et de leurs surenchères : nucléaires et antisémites, àTéhéran ; libanaises et terroristes, à Damas...
  3. Les « Frères musulmans » qui n’ont jamais été aussi puissants depuis bien longtemps et visent à déstabiliser plusieurs régimes, à commencer par l’égyptien, le koweitien et le saoudien...
  4. Les forces « fascislamistes » de toute obédience (sunnites, chiites) qui supportent de moins en moins bien l’esprit de coopération, de concertation, d’intelligence des communautés musulmanes d’Europe avec les autres religions et les autorités des pays européens. Il s’agit là d’un vrai défi qu’il faut relever avec doigté. D’où, d’ailleurs (entre autres), la réaction jugée « surprenante » de Tarik Ramadan dans un « Rebond » de Libération... « Caricatures à traits tirés ». Dépassé, le grand Maître du double ou du triple langage ! Il sait qu’il ne faut plus trop jouer : l’heure est grave...Cette affaire des caricatures a été « montée », comme on le dit d’une mayonnaise...Ou comme d’un « coup ». Qui dépasse ceux qui l’ont lancé... « Nous avons un urgent besoin de confiance mutuelle. La crise provoquée par ces caricatures nous montre combien le pire est possible (à partir d’« apparemment rien ») entre deux univers de sens, quand ils deviennent sourds l’un à l’autre et sont tentés de se définir l’un contre l’autre. Un désastre dont les extrémistes des deux camps ne manqueront pas de tirer parti », écrit Ramadan subitement « sage »... Il sait de quoi il parle.
  5. La nébuleuse Al Quaïda toujours là, entre Asie, Afrique, Europe et Amérique, et qui (certains signes ne trompent pas !) risque de refaire parler d’elle. Avec du sang, des larmes et des réactions occidentales pas forcément adaptées...

Durcissement. C’est le mot d’ordre, en effet. Notamment en Palestine, où l’ampleur des conséquences de la victoire électorale du Hamas est toujours mal mesurée.... « Le Djihad islamique "rejette complètement" toute trêve durable avec Israël », a déclaré Khaled al Batch, un des leaders de ce groupe extrémiste qui, contrairement au Hamas, n’a pas prolongé l’"accalmie" dans les attentats contre Israël décrétée voilà un an à la demande du président palestinien Mahmoud Abbas. La victoire des extrémistes vivifie les extrémismes...

Batch faisait visiblement allusion à la "trêve de longue durée" suggérée la semaine dernière à Israël par Khaled Méchaal, chef du bureau politique du Hamas, pourvu que « l’Etat juif » se retire totalement de Cisjordanie et accepte le « droit au retour » dans leurs foyers des réfugiés palestiniens de la guerre de 1948, ce qui ne peut en aucun cas constituer une base de règlement pacifique : c’est parce que le continent européen a renoncé à ce type de revendication que la paix a pu triompher des « forces de guerres » et de haine...

Durcissement. C’est le mot d’ordre du Hamas qui ne veut évidemment pas se faire « déborder sur sa gauche » (ou plutôt sur sa droite, sur ce « fascisme vert », ce « fascislamisme » qui a le vent en poupe... Faisant allusion au Djihad islamique, Khaled Méchaal a déclaré mercredi au Caire : "Certains croient que le Hamas offre une trêve de longue durée, qu’il attendra de voir ce qu’Israël fera et qu’il l’implorera de nous restituer nos droits. Ce n’est pas cela qui est proposé." : "Nous ne reconnaîtrons jamais la légitimité de l’Etat sioniste", avait déclaré la semaine dernière le même Méchaal, qui vit en exil à Damas depuis qu’il a échappé il y a une dizaine d’années à une tentative d’assassinat du Mossad à Amman. Pour faire la paix, il faut être deux...

Sale temps pour la paix, donc. Et les champions des défenseurs des caricaturistes sans talent danois au nom de la « liberté d’expression » ne se rendent pas compte à quel point ils sont les jouets de manœuvres qui les dépassent. Heureusement, les vrais esprits libres sont lucides. Plantu, par exemple... qui n’hésite pas à montrer cet esprit de responsabilité, qui fait de l’auto-censure non une censure, mais une borne à l’irresponsabilité, donc à l’irrespect, à l’incivilité, et à ce laxisme qui est le contraire de la liberté. Il ne fait certes rien céder d’essentiel, au nom de l’apaisement, ce mot d’ordre « munichois », comme le souligne justement Max Gallo. Mais il ne faut surtout pas tomber et sombrer dans les pièges tendus par ceux que l’on prétend combattre : « Bal tragique à Paris : un mort, Charlie Hebdo ! » C’est dommage : j’adorais cet hebdo. Mais j’aimais aussi France Soir, à une époque. Nostalgie...


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