J’ai testé pour vous une AG de « grévistes en lutte »

par Coeur de la Beauce
vendredi 24 mars 2023

Jeudi 23 mars était l'occasion de redescendre dans la rue pour montrer son opposition à la réforme des retraites version Macron. Votre narrateur a suivi le mouvement, autant par solidarité avec mes collègues grévistes que par commodité ; j'avais des affaires à règler hier après-midi et la perte d'une journée de salaire était un moindre mal.

Ma génération n'en finit plus avec les réformes des retraites, depuis 1995 si je me souviens bien. L'époque où je traversais une partie de Paris pour gagner l'IUFM de la rue de Rome car métros et bus étaient à l'arrêt. On a l'impression que nos princes ne supportent plus de voir vieillir leurs gueux qui ont trimé toute leur vie pour les servir, d'où la nécessité de les achever au boulot. Les révoltes que nous vivons actuellement sont la conséquence du mépris de nos gouvernants pour le peuple, du refus de prendre l'argent là où il est, de consulter le peuple par référendum. Le 49.3, le général De Gaulle l'avait instauré en cas d'urgence ; or il n'y en avait aucune à imposer cette réforme.

Donc je me suis rendu à ce que je pensis être un espace de débats et de propositions, une assemblée générale de travailleurs en grève, à la maison des syndicats de la zone où je réside. Eternel naif que je suis, je pensais que deux cents personnes seraient présentes, de toutes opinions. C'était l'occasion de lancer des pétitions en ligne par exemple pour exiger ce fameux référendum qui nous sortirait de la crise.

Il n'en fut rien. Je me suis retrouvé dans une salle de réunion avec une trentaine de permanents syndicaux (FSU/SUD), d'enseignants détachés (vingt-cinq profs pour une infirmière, une employée de la sécu, deux des impôts...), le tout chapeauté par un prof délégué du SNES. Aucun gréviste du privé, pas un ouvrier, pas un étudiant, essentiellement des gens connus pour être des activistes de lutte ouvrière, du NPA, de LGBT et des insoumis.

Celles et ceux qui me suivent sur Agoravox doivent bien se marrer, et je vous concède que je me suis finalement bien amusé. Car on aurait dit une illustration d'un sketch de Coluche ou de Dieudonné tellement c'était ridicule.

Pour résumer :

- Il faut pousser les lycéens à faire la révolution, tracter devant les bahuts. Un CPE (conseiller d'éducation), clône de Che Guevara, n'y croit pas car selon lui "les jeunes veulent profiter du libéralisme, travailler, avoir des vacances, un smartphone et une maison" (! ?)

- Un prof des écoles de LO hurle après le "capitalisme" responsable de tout, la "démocratie" qui est bourgeoise et inutile.

- Une nana parle des "atteintes aux droits de l'homme" à la sortie des manifs, de la répression (ce qui n'est pas faux, mais la conséquence de casseurs qui ne travaillent pas, ce qu'elle ne dit pas).*

- Tous veulent tracter devant les usines, mais déplorent le peu d'enthousiasme des salariés. Il est vrai que beaucoup préfèrent Macron, moindre mal à une dictature communiste. Il est aussi exact que les syndicats ne les défendent jamais en cas de problème individuel avec leur hiérarchie, bien au contraire. Il est également prouvé que les délégués syndicaux ne se privent pas de se faire muter en utilisant leurs réseaux quand ils expliquent au troupeau qu'il y a des règles à respecter. L'ennui, c'est que rien ne change et que cette comédie dure depuis au moins l'après-guerre.

- Une autre militante aborde une question cruciale selon elle, la banderole pour les sans-papiers à mettre en tête de la prochaine manif. Certains trouvent cela un peu excessif.

J'ai tenté de m'exprimer, sur le 49.3 détourné et la nécessité d'un référendum. Dans l'indifférence générale plus le mépris de quelques uns : "De Gaulle était un capitaliste", "les élections c'est de ma merde" etc.

Il est vrai que les tristes scores de l'ultra-gauche aux élections ne peuvent qu'indisposer nos militants de la révolte. Personne pour leur faire remarquer qu'il ne fallait pas voter Macron au second tour s'ils ne voulaient pas de sa politique (je ne voulais pas me faire écharper à un contre trente)...

Bref, midi sonné je suis rentré manger. Pas de manif avec ces gens qui, par leur sectarisme et leur sottise, favorisent la toute puissance de nos princes. Pas de projet collectif crédible, aucun sérieux. Comment prétendre faire la révolution quand on est propriétaire de deux pavillons, que l'on possède deux voitures, que l'on passe ses vacances à l'étranger ? Car ainsi sont ces professionnels de la représentation des personnels.

Assister à ce type de réunion n'est pas inutile, et permet de mieux comprendre les choses. D'ailleurs, les lycéens verraient cela, ils iraient en courant chez Le Pen et Zemmour, ou ils resteraient chez eux. A quand une véritable représentation des salariés, de tous les salariés, en France, par des bénévoles indépendants ouverts et combatifs ? Quand les Bastille syndicales vont-elles sauter ? Quand pourra-t-on manifester sans subir la loi des sectes d'ultra-gauche, des échappés de loges maçonniques et autres gourous ? Il y a effectivement des révolutions à faire...

 


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