Mon carnet de campagne : C’est quoi un vote utile ?

par Daniel RIOT
mardi 22 mai 2007

Kouchner le populaire

Vous avez dit « popularité » ? Le PS prend encore un coup sur le crâne ! Kouchner, le nouveau ministre des Affaires étrangères, reste en tête du palmarès des leaders politiques les plus populaires, avec 70 % d’opinions favorables (+ 9 en un mois) pour 20 % de défavorables (- 4), selon un sondage Ipsos, à paraître jeudi 24 mai dans Le Point.

Hors gouvernement, François Bayrou reste extrêmement bien placé : il ne recule que de deux places et se retrouve à la quatrième position, malgré une progression de bonnes opinions (64 %, +6). Loin devant les membres de la chefferie socialiste : le maire de Paris, Bertrand Delanoë (54 %, +6), Dominique Strauss-Kahn (51 %, +7), Jack Lang (50 %,
- 2) et Ségolène Royal (49 %, +1). Au fait, le rang de Hollande m’a échappé...

Voynet verte de rage

Verte de rage, Voynet !... L’opération « biopolitique » lancée par Sarkozy et Juppé a pleinement réussi. Plus écolo que le gouvernement du Fillon ? Impossible...

Malgré le nucléaire, les OMG, les chocs d’intérêts en perspectives et quelques autres pommes de discorde annoncées et inévitables. Hulot est le premier à faire éclater sa joie : « Une vraie révolution culturelle », « une réunion historique », « un nouveau climat »... Et les experts jouent le jeu : le philosophe Edgar Morin, le climatologue Jean Jouzel et le spécialiste de la biodiversité, et Jean-Marie Pelt en tête. Pourquoi bouderaient-ils ?

Voynet enrage et s’étouffe de regrets et de griefs : « La gauche aurait dû faire cela en son temps ». Le « Grenelle de l’environnement » se présente déjà bien... Et les Verts voient leur herbe la plus fraîche coupée sous leurs pieds. Ringards, les « Verts ». Comme les « Roses »...

Un regret à ce propos (comme sur d’autres questions) : que le programme écologique mis au point par Bayrou et Corinne Lepage ait rencontré si peu d’échos durant la campagne présidentielle... La faute à qui ? Aux journalistes politiques paresseux, plus intéressés par le spectacle que par les programmes et aux dirigeants (des Verts et des Roses) qui n’ont fait que du nombrilisme stérilisant. Mais les regrets ne servent à rien. Et les procès en bêtise aussi !

« Mauvais perdant »

Ils ont l’air malins, les dirigeants socialistes ! Ils ont passé leur dimanche à vitupérer contre une « ouverture » qui n’est que « débauchages », « manœuvres », « magouilles », « viles opérations électoralistes »... Xavier Bertrand et d’autres peuvent ironiser : « Hollande est un mauvais perdant ». Il n’a pas été non plus en bon gagnant...

C’est ce qui fait dire à Raymond Forni, ancien président de l’Assemblée nationale et proche de Lionel Jospin, « le temps de François Hollande à la tête du Parti socialiste est passé » : « On ne pourra pas être les derniers révolutionnaires qui maintiennent en vie des partis ou des groupuscules qui ne représentent qu’eux-mêmes. On ne pourra pas maintenir les choses en l’état, cela me paraîtrait suicidaire »

C’est quoi un « vote utile » ?

Pas vaccinés contre une rhétorique dépassée, les dirigeants de la gauche, PS en tête, reprennent le refrain du « vote utile ». Comme disent les politologues de « C’est dans l’air », cela veut dire quoi « vote utile » ? « Utile » à quoi et pour quoi et en quoi un « vote utile » ? Utiles, les Verts ? Utile le PC ? Utile l’extrême gauche qui refuse toute responsabilité gouvernementale ou autre ? Utile un PS et une UMP surreprésentés à l’Assemblée par rapport au pluralisme français ?

Aux présidentielles, les « votes utiles » de gauche n’ont été utiles qu’à Sarkozy. Aux législatives, les mêmes « votes utiles » de gauche ne seront utiles qu’aux deux citadelles qui assument la coresponsabilité des affaires françaises depuis vingt-cinq ans, à coups de mandats impératifs : les « godillots » d’un côté, et les « chaussures à clous » (rouillés) de l’autre, les béni oui-oui et les béni non-non...

La liberté de parole de Hirsch

Un lot de consolation pour les socialistes : ils ont déjà l’occasion de dénoncer la « cacophonie » qui se fait entendre dans les sphères gouvernementales. C’est Martin Hirsch (haut commissaire et non secrétaire d’Etat) qui a confirmé son opposition aux projets de Sarkozy sur les « franchises » sur les examens biologiques, les médicaments, les visites médicales et les frais d’hospitalisation.

« J’ai dit il y a quinze jours, un mois, deux mois, trois mois, que ça ne me paraissait pas une bonne mesure », a-t-il déclaré sur les ondes de France Inter, soulignant qu’il pensait « vraiment que ce n’est pas ce qu’il faut faire ». Interrogé sur le fait que l’on puisse « lui reprocher sa liberté de parole », Hirsch a répondu : « Peut-être, mais comment voulez-vous faire autrement ? »

« L’opposition très nette de Martin Hirsch (...) montre le peu de crédibilité d’un gouvernement hétéroclite », a lancé Faouzi Lamdaoui, secrétaire national à l’égalité et au partenariat équitable du Parti socialiste. Selon le PS, « alors que François Fillon a annoncé une application « scrupuleuse » du programme de Nicolas Sarkozy, les débauchages médiatiques laissent déjà la place à la cacophonie et aux désaccords publics. »

Questions :

1) Pourquoi le PS n’a-t-il pas fait de ces « franchises » (dénoncées avec vigueur par Bayrou) un thème central de sa campagne ? Le meilleur allié de Sarko n’a-t-il pas été le PS, en fait ? Le président doit en sourire derrière ses lunettes de star...

2) En matière de cacophonie, le PS est-il le mieux placé pour jouer sur les registres de l’ironie ? Dans quel gouvernement trouve-t-on des ministres pleinement d’accord en tout, sur tout et pour tout ? « Quand on pense tous la même chose, c’est qu’on ne pense plus », redirait Bayrou... Il est vrai qu’au PS on ne réussit guère à penser, parce que tout le monde semble en désaccord sur tout.

Avec le PS en force d’opposition, Sarkozy et l’UMP jouent vraiment sur du velours...

Les sourires de victoire affichés en son soir de défaite par Ségolène Royal semblent de plus en plus impudiques et chargés d’inconscience.

Pour un libéralisme de gauche :

Une nécessité historique née au centre !

Enfin ! Je me suis longtemps défini comme un « libéral de gauche » et je n’ai jamais supporté cette escroquerie intellectuelle qui a fait de ce beau mot (comme Liberté) un gros mot... J’ai donc apprécié la tribune du cinéaste Eric Rochant dans le Monde  : « Hypnotisée par la victoire du non au référendum relatif à la Constitution européenne, la gauche a cru qu’elle était encore en vie dans ses certitudes d’un autre temps. Elle n’a pas compris qu’elle était morte. La gauche n’a pas compris non plus que la marche vers le libéralisme, comme une tentation irrésistible, ne pouvait être stoppée qu’au nom d’un libéralisme de gauche et non pas d’un quelconque modèle autosuffisant d’autant plus dangereux qu’inefficace. »

Rochant poursuit : « Ce libéralisme de gauche est apparu soudainement avec François Bayrou, qui a peut-être mis trop de temps pour s’émanciper de la droite classique. Il est apparu aussi, quoi qu’on en pense, avec Ségolène Royal, qui a dû composer autant que batailler avec ses soutiens habituels, au prix d’une lisibilité restreinte. (...) Ce libéralisme de gauche, François Bayrou et Ségolène Royal avaient quinze jours pour le proposer, lui donner un contenu, le soutenir d’un texte. (...) Ségolène Royal, François Bayrou, Dominique Strauss-Kahn, ils ont été trop loin pour reculer, et ils n’ont aucune chance les uns sans les autres. L’espoir d’une autre proposition pour la France repose sur eux. Ils ne sauraient l’ignorer »

Dans cette optique, en dépit de ses faiblesses en notables depuis l’exode des « taupes », la fuite des « félons » et la réussite à « Normal’soupe » des amateurs de rata, Bayrou a un avantage énorme sur DSK et sur SR  : Le MoDem est un mouvement neuf, du XXIe siècle...


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