Une île en colère

par Florence Dandin
mercredi 19 octobre 2005

Paisible, chaleureuse mais discrète, l’île de La Réunion, jusqu’à présent, n’avait pas à se soucier du regard envieux de certains et des allégations des autres. Des accusations formulées à l’encontre de quelques pêcheurs malveillants ont entaché l’image pittoresque et idyllique de « l’île intense ». Une île, une population humaine et une gente canine victimes d’un battage médiatique aussi ridicule que fantasque.

Tout commence par les accusations de Brigitte Bardot, outrée de l’attitude barbare de certains pêcheurs de requins utilisant des chiens errants comme appâts vivants. Une pratique barbare, qui alerta les autorités et bon nombre de partisans et complaisants des fondations Brigitte Bardot, et 30 millions d’Amis. Une accusation de grande ampleur qui, depuis peu, porte préjudice au tourisme réunionnais. Il est indiscutable que maltraiter des animaux est cruel. Les auteurs du délit ont, sans le moindre doute, mérité leur châtiment, malheureusement leur peine n’a, certes, pas été à la hauteur de leur crime : 3 mois de prison et 5000 euros d’amende au lieu de 2 ans et 10000 euros d’amende. Bien entendu, les Réunionnais partagent l’opinion publique, « l’acte de barbarie envers les animaux est cruel et honteux », mais restent mécontents des répercussions médiatiques qui mettent à mal la réputation de leur île.

L’île étant perçue d’un mauvais oeil, l’une des activités insulaires les plus importantes risque d’en pâtir. La présidente du Comité du tourisme réunionnais, Jocelyne LAURET, s’est sentie offensée par certains propos diffusés en métropole, qui n’étaient autres qu’un tissu de mensonges. Elle s’est empressée d’affirmer que certaines informations diffusées sur les chaînes audiovisuelles nationales faisaient allusion au « cas isolé et exceptionnel » d’un chien perforé d’un hameçon. « La Réunion a été choquée de découvrir ce cas isolé » a-t-elle dit. Mais le choc a été encore plus grand pour elle de découvrir « la pugnacité des médias à divulguer des mensonges ».

Du point de vue des artisans de la mer, des professionnels de l’art culinaire et des experts de la vie marine, la vente de requin n’est aucunement une pratique de grande envergure. « La vente de requin n’intéresse ni les pêcheurs, ni les marchands de poissons, pour la bonne raison que les Réunionnais rechignent à manger le poisson mangeur d’homme », a précisé un restaurateur de la capitale, Saint-Denis. Selon Géry Van Grevelynghe, un médecin auteur d’études et d’ouvrages sur les requins à La Réunion : « Il serait stupide et irréaliste de pêcher le requin avec un chien. » A son avis, les chiens hameçonnés vus en photo et à la télévision « n’auraient pas résisté à la moindre traction ». Les hameçons étant petits et peu solides, ils ne pouvaient supporter un poids volumineux, sachant que le "squale" pèse plus de 400 kilos.

Certes, il lui semble peu probable que le poisson le plus craint de toute l’humanité soit pêché, mais cela étant, il n’exclut pas que cette pratique illégale, et ô combien déplorable, soit adoptée par quelques hommes aussi bêtes que cruels. Aujourd’hui encore, cette sordide affaire fait parler d’elle. Mais, espérons-le, pas indéfiniment...


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