Parlons corruption…
par George L. ZETER
mardi 10 juin 2025
Plus de 2300 élus devraient être mis en cause sous la mandature 2020/2026. C’est ce qu’avance l’observatoire SMACL (Mutuelle d'Assurance des Collectivités Locales) qui est un outil de prévention et d'analyses qui observe la vie territoriale et associative en partenariat avec des associations d'élus locaux et de fonctionnaires territoriaux reconnus par les acteurs publics. Voir en lien le rapport annuel 2023.[i]
Pour vous donner un exemple afin de bien comprendre. Dans une ville de moyenne importance, l’adjoint au maire tape dans la caisse en détournant de l’argent sur les marchés des ordures ménagères. Le maire, un homme politique de 1er plan, laisse courir, mais se désolidarise, cependant, il ne se porte pas partie civile contre son bras droit, ce qui fait que l’édile au procès est condamné, mais s’étant rendu insolvable, l’état ne peut pas lui faire payer les sommes détournées.[ii] Le maire du fait qu’il ne l’ait pas assigné en justice, eh bien, c’est à la collectivité de rembourser le vol… Double peine donc pour les contribuables, puisque d’une main, ils sont volés et de l’autre, ils passeront à la caisse afin de rembourser le préjudice. Ah oui… C’était Larcher, maire de Rambouillet et président du Sénat et Jean-Philippe Assel son adjoint qui a pillé la caisse à hauteur de 20 millions.[iii] Voilà, vous êtes bien en France !
Condamnations des politiques : il a fallu classer en cinq ensembles différents ces condamnations pour bien comprendre en quelle pétaudière nous vivons tous. 1) Le financement des partis politiques qui représente 5% des condamnations. 2) Les fraudes électorales qui représentent 10% des délits. 3) L’enrichissement personnel et familial, soit 40%. 4) Les faits divers 25% : agressions sexuelles, viols, pédophilie, proxénétisme, trafic de drogue, etc. 5) Les derniers 20% sont les injures, diffamations, licenciements abusifs et fausses déclarations sous serment. Voilà en partie ce qui est reproché à nos élus de la république. À regarder la vidéo jointe narrée par Philippe Pascot.[iv]
Allons-y cas par cas.
1) Le financement des partis politiques. Sur le papier, le dispositif est solide et a la particularité de reposer sur officiellement des fonds publics, ce qui empêche toute dérive de financement privé.[v] Un système d’égalité entre candidats existe donc. Mais le système n’a pas les moyens de ses ambitions. Les affaires politico-financières viennent encore trop régulièrement nous rappeler qu’il faut rester vigilant. Sur les vingt-cinq dernières années, cinq campagnes présidentielles – 1995, 2007, 2012, 2017 et 2022 ont été marquées par des soupçons d’irrégularités découvertes non par les autorités de contrôle, mais grâce à l’action de lanceurs d’alerte, de journalistes d’investigation et la société civile. Dernier avatar en date, la condamnation de Nicolas Sarkozy et le financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007. Admettez qu’être financé par un dictateur pour être élu dans une démocratie, faut avoir un sacré culot, que l’homme aux talonnettes a eu tout au long de sa carrière.
2) Les fraudes électorales. Certaines technologies électorales (identification biométrique, e-vote, machines à voter, transmission électronique des résultats…) sont développées et commercialisées par des entreprises privées et étrangères, et donc soumises à des logiques marchandes et de transactions parfois corruptrices. Parallèlement à ces tendances à la technicisation et à l’emprise croissante de l’expertise, on assiste à des formes de « vernacularisation » de l’élection : des groupes affinitaires ou identitaires, mais aussi des groupes porteurs d’intérêts hétérogènes se saisissent des enjeux électoraux, alimentent des controverses, et parfois produisent des vérités alternatives et les diffusent largement, notamment sur les réseaux sociaux. Cas emblématique, le bourrage des urnes. Une vidéo de Mediapart[vi] où on voit deux agents administratifs de la municipalité de Saint-Pierre à l’île de la Réunion qui bourrent l’urne de bulletins de vote. Devant la preuve, ils avouent avoir mis des bulletins favorables au candidat Les Républicains, François-Xavier Bellamy.
3) L’enrichissement personnel et familial. C’est une ignominie que le maire d’une commune n’est pas l’obligation de se porter partie civile lorsqu’un des membres de son Conseil municipal détourne. Il y a aussi, les achats de terrain, qui par un tour de passe-passe de terres agricoles à terrain constructible, bien souvent à l’avantage d’un proche, qui, par reconnaissance donnera une commission qui ira dans les caisses du parti, ou dans la poche de l’élu. Les décisions de construction de ronds-points, qui partent d’un devis souvent gonflé permettant les rétros commissions sous la table. Pour s’enrichir, il suffit aux politiques de passer par des associations ou des entreprises amies et de faire monter la sauce, car tout le monde s’y retrouve. Un exemple d’enrichissement familial, le cas Fillon. À embauché et rémunéré grassement femme et enfants sur ses mandats électifs pendant des années, ce qui a dû financer le château de famille où on les voit trôner en famille, tout sourire, heureux. Bon au moins il y a eu une justice, car cela lui a coûté l’élection de 2017… Et pour notre malheur celle de macron.
4) Les faits divers. Là, on touche des personnalités en pleine dérive. De l’harassement sexuel afin d’obtenir des faveurs, en passant par du chantage, les pots-de-vin, la complicité avec les lobbies, l'extorsion de fonds, le copinage, le népotisme, l'esprit de clocher, le favoritisme, le trafic d'influence. Toute une palette de faits plus ou moins graves qui tristement ont habitué la population française à ne plus s’émouvoir des turpides des élus. Le dernier gros scandale en date, mêle le sordide, le mensonge et la mauvaise foi, est l’Affaire Bétharram qui implique le Premier ministre Bayrou.
5) Injures, diffamations, licenciements, etc. Que ce soit des dirigeants politiques ou des dirigeants d’entreprise, tous bénéficient à la fois d’un pouvoir discrétionnaire, et à la fois d’un pouvoir disciplinaire sur leurs collaborateurs. Si de par leur position hiérarchique, ils abusent de leur pouvoir, on parlera alors d’abus de pouvoir, utilisant toutes les formes pressions psychologiques afin d’arriver à des fins ou de faire plier les récalcitrants. L’abus très commun par les hommes politiques est celui du rapport aux femmes.[vii] Il est tentant d’utiliser cette position afin d’obtenir de la gente féminine des faveurs, qu’elle n’accorderait pas en temps normal. Un exemple. Joël Guerriau, élu de Loire-Atlantique, a été interpellé à son domicile après une plainte déposée par la députée Sandrine Josso. Soupçonné d'avoir drogué l'élue afin d'obtenir des faveurs sexuelles de sa part, il a été mis en examen.[viii]
Un triste panorama. Tout ce qui a été mentionné plus haut a pour racine le fait qu’arrivé dans une position de pouvoir, maints élus se pensent au dessus de la loi, et bien souvent, par copinage s’en tirent à bon compte et ainsi conforte un sentiment de toute puissance. Mais comme dirait l’autre, « on a les élus qu’on mérite ». Car l’État Providence a échoué sur le plan économique, il a vaincu le peuple et celui-ci est devenu aussi corrompu à l’image de ses élites.[ix] Le peuple ainsi corrompu a abandonné la vertu pour le vice. On l’y a aidé. La loi encourage les déviations, ou plutôt les règles chaque jour plus nombreuses et flou couvrent le pays comme un énorme nuage noir et réduisent le sens de la légalité comme peau de chagrin, d’ailleurs de nos jours, qui se soucis de respecter la loi ? Voir le cas Marine Le Pen dénonçant la décision de justice où elle est condamnée pour vol organisé et arguant que nous serons « privés » de sa future élection comme président de la République… Un cas pour illustrer où le peuple de France en est rendu concernant son vote : François Bernardini, du Parti socialiste, est un de ces petits barons locaux.[x] Il commence à avoir des démêlés avec la justice dès 1995, il est condamné en 2002, et est réélu en 2008 et en 2014, il est encore mis en examen en 2019 pour des frais graves, du genre : mis en garde à vue à la section de recherche parisienne de la gendarmerie à la demande du Parquet national financier (PNF), dans le cadre d'une enquête pour « association de malfaiteurs en vue de commettre les délits de prise illégale d’intérêts, de trafic d’influence par une personne chargée d’une mission de service public, de complicité et recel de ces délits ». Avec ce pedigree, il est actuellement Président du territoire d'Istres-Ouest-Provence depuis 2016. Maire d’Istres depuis 2008. Il a été député, puis député européen dans les années 90… Des comme lui sont légion. Le plus connu est le couple Balkani, élu et réélu dans la mairie de Lavallois malgré de nombreuses preuves.
La corruption est souveraine dans la République française. C'est la valeur républicaine par excellence. Elle est plus essentielle à la République que n'importe quelle espèce de Cathédrale. Quant à la devise républicaine, Liberté-Egalité-Fraternité... Pure ironie pour gogo ! Dans Les Luttes de classes en France, Karl Marx,[xi] décrivait déjà un Etat français hautement et fondamentalement corrompu par ses élites bourgeoises et aristocrates. Il expliquait « le pillage de l'État en grand, tel qu'il se pratiquait au moyen des emprunts, se renouvelait en détail dans les travaux publics et construction des chemins de fer. » Il rajoutait : « On se souvient des scandales qui éclatèrent à la Chambre des députés lorsqu'on découvrit, que tous les membres de la majorité, y compris une partie des ministres, étaient actionnaires des entreprises même de voies ferrées, à qui ils confiaient ensuite, à titre de législateurs, l'exécution de lignes de chemins de fer pour le compte de l'État. »
En conclusion. Ne dit-on pas que « le poisson pourrit d’abord par la tête »… Mais ne faudrait-il pas ajouter aussi, « que cette pourriture fait son chemin en passant par les arêtes. »
Georges ZETER/juin 2025
Video : L’ENRICHISSEMENT PERSONNEL ET FAMILIAL DES POLITIQUES - PHILIPPE PASCOT
[ii] https://www.leparisien.fr/yvelines-78/demande-de-confirmation-des-peines-dans-le-scandale-des-poubelles-10-12-2014-4361389.php
[iii] https://www.leparisien.fr/essonne-91/autopsie-d-un-scandale-a-25-millions-d-euros-16-07-2007-2008212056.php
[vi] https://la1ere.franceinfo.fr/reunion/peine-severe-pour-2-des-5-prevenus-dans-l-affaire-de-la-fraude-electorale-a-saint-pierre-1536064.html
[vii] https://bacphilocooldissertations.wordpress.com/2014/12/02/quelles-sont-les-multiples-formes-dabus-de-pouvoir/